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Heure d'Hiver

   

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   L'Hiver

 

 

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Vulnerant omnes
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Je suis comme je suis,
Je plais à qui je plais.

ego sum ego sum
sicut qui similis

 

 

 

 

Bonne Année



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Extraits

 

Rencontre en Forêt
carrefour11

J’ai fait une sortie hier soir en fin d’après midi, et je ne sais pas pourquoi, j’ai pris mon VTT au lieu du vélo. Dans les chemins de la forêt j’ai été doublée plusieurs fois par le même gros 4-4. J’ai eu l’impression que le mec voulait attirer mon attention. J’ai remarqué, au moment où il me doublait qu’il ne portait rien, il était torse nu. Nos regards se sont croisés, Puis il est parti loin devant. Il faisait doux, pas de vent, la forêt sentait bon. . . . . . . . . Un peu après, au coude du chemin, j’ai vu le 4-4 arrêté, dans un endroit où le chemin se rétrécissait, il n’y avait plus de place pour passer à droite, le taillis touchait la voiture, et un tout petit passage à gauche. 

La devise du Quebec
Hôtel du Parlement - Copie

Québec hiver 1876, en fin de matinée le soleil donnait à la ville gelée, les mille feux du diamant. Le froid était vif et les passants emmitouflés étaient peu nombreux. Pourtant, sur le trottoir ensoleillé, un homme ne semblait pas ressentir de gêne à déambuler tête nue, normalement vêtu, ou plutôt anormalement vêtu dans l’air glacé. Il n’avait pas de gants, et son regard bleu était perdu dans le rêve où il flottait. Il tenait à la main un petit rouleau de papier, et ce feuillet enroulé faisait de lui l’homme le plus heureux de la terre. Il suffisait de le regarder pour remarquer le sourire qui illuminait son visage d’homme intelligent et déterminé. Il venait d’avoir quarante ans, son allure était alerte, et son élégance impeccable attirait le regard.

Le testament de Benjamin  Briggs
Le testament de Benjamin Briggs

Les arbres du square Victoria commençaient à dérouler leurs feuilles. Florane-Marie D’Auteuil avançait à pas légers le long de la bordure du trottoir de la rue du Square Victoria. Malgré le soleil qui avait embelli la journée, l’air était encore frais. Elle tenait bien fermé contre sa gorge le col de fourrure de son manteau d’hiver. Florane était la fille d’un diplomate français décédé au cours de l’hiver dernier. Après un séjour de trois ans en Bavière. Elle vivait à Montréal depuis deux ans. Elle s’y plaisait mieux, et il y faisait moins froid qu’à Québec. Elle trouvait aussi la ville plus moderne et plus vivante. Elle ne venait pas souvent dans le parc, elle était généralement occupée dans l’institut où elle travaillait le plus souvent.

 Autoroute du Nord
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Autoroute du Nord, nuit de samedi à dimanche, 2 heures du matin, la chaussée est luisante, la pluie n’arrête pas de tomber, depuis des jours et des jours. Échangeur de Bapaume, les lumières de la cité toute proche se mêlent aux lumières bleues des gyrophares des ambulances et des voitures de gendarmerie. Les clignotants jaunes du Samu, et de puissants projecteurs éclairent une zone d’activité intense. De la fumée, des cris, des ordres jetés, des silhouettes fluorescentes s’agitent dans toutes les directions. Une très forte odeur d’essence s’est répandue, tout se déroule au milieu du bruit infernal des groupes électrogènes et des compresseurs. De l’autre coté du muret central les bolides ralentissent à peine sous l’œil préoccupé des gendarmes trempés.

            La Massane
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Les premières gouttes de l’averse s’écrasaient bruyamment sur les dalles de pierre. Lucile venait de refermer la porte du garage de l’hôtel, il était temps, à peine avait-elle reçu quelques gouttes. Elle adossa son vélo contre le mur et plaça avec soin l’antivol d’acier. Elle remonta directement à sa chambre par l’escalier de service. Il faut dire que l’équipement cycliste bariolé de réclames et de couleurs vives n’est pas tellement seyant pour les femmes habituées naturellement aux arcanes de l’élégance. Elle ouvrit tout de suite la fenêtre, et contempla avec ravissement l’orage au plus fort de sa fureur. Le tonnerre était d’une violence inouïe, et l’écho renvoyé par la montagne toute proche amplifiait les grondements incessants. 

Les Travers de Ms Philipson
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Le trajet entre Paris et Londres en Eurostar n’allait pas être suffisamment long pour calmer l’excitation de Magali. Elle regarda sa montre; dans 5 minutes ce sera le tunnel, et moins d’une heure pour arriver gare de Waterloo. Quinze jours auparavant, Magali avait quitté le lycée un peu plus tôt, pour absence de son professeur d’Anglais. C’est ce qui explique qu’elle ait elle-même ramassé le courrier dans l’entrée de l’immeuble cossu, rue de Turbigo, tout près de la place de la République. Au milieu d’un amoncellement de publicités, journaux, lettres etc, l’une d’entre elles lui était personnellement adressée. C’était une enveloppe anonyme, sans flamme ni cachet, ni marques reconnaissables. Elle attendit d’être à l’intérieur de l’appartement qui surplombait magnifiquement la capitale, pour ouvrir le pli qui, a priori, ne lui disait rien de bon. Elle monta directement dans sa chambre, d’où l’on découvrait toute la partie nord de Paris, jusqu’à la butte Montmartre, à demi visible dans la brume de printemps en cette fin d’après midi.

         La brosse à Dents
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Ce n’était pourtant pas un jour exceptionnel. Un samedi comme un autre, sauf que c’était l’été, que la chaleur était déjà accablante, et que je me sentais légère, en pleine forme et heureuse. Pourquoi ? Je ne saurais le dire, j’étais bien c’est tout. Madrid était une fournaise, mais cela faisait maintenant pas mal de temps que je m’y étais installée, et franchement, je ne regrettais rien. Ma fille était avec moi, et le samedi matin nous avions pris l’habitude de faire nos courses pour la semaine. Il était encore tôt, mais nous n’étions pas pressées, bien qu’étant attendues pour déjeuner à la finca où nous avions nos amis. Nos amis et nos habitudes, c’est là que nous avons logé avant de trouver cette petite villa du nord de Madrid, avec sa petite piscine et ses pins parasols. Cette villa, nous l’avons louée toute meublée. C'est-à-dire avec le minimum, ce qui lui donnait un genre particulièrement spartiate avec ses murs blancs et ses meubles foncés. On s’y était attachées, et pour nous, c’était le paradis. Nous n’avions plus que quelques achats de peu d’importance, mais je devais passer absolument à la pharmacie pour acheter de l’huile solaire.

 Résistance et Trahison
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Le 19 mai 1940 restera à jamais le jour le plus sombre de l’histoire d’Amiens. Tandis que le général de Gaulle, à la tête d’une division blindée, contient l’avancée des troupes allemandes dans le Vimeu et la région d’Abbeville, l’armée nazie bombarde la ville préfecture de la Somme. Tout le centre-ville et les gares de chemin de fer sont rasés. L’ancien secrétaire général de la Somme, Jean Moulin, apprend la nouvelle de la destruction de la ville, et revoit dans ses récents souvenirs la belle cité telle qu’il l’a connue, la préfecture d’Amiens et son propre bureau où il a travaillé au service de l’État. Il n’accepte pas que tout cela soit souillé par la présence ennemie. Amiens s’enfonce dans quatre années de souffrance et de terreur. La communauté amiénoise se divise. Certains acceptent la fatalité. D’autres la refusent et résistent. Et d’autres encore se mettent du côté des plus forts. Jean-Marc Laurent n’a que 16 ans en 1942 lorsqu’il entre dans le réseau “Centurie”. Simple cheminot, il intègre les FTP, unités combattantes clandestines. Il participe à de nombreuses opérations contre l’armée allemande.

  La Chapelle St Domice
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Depuis que Karen avait disparu, Adrianne vivait l'enfer. Elles étaient amies de longue date. Ce qui semblait être pour les autres une camaraderie d'adolescentes était en réalité un grand amour partagé. Karen et Adrianne poursuivaient avec brio leurs études de médecine. L'une serait Sage femme, et l'autre voulait être gynéco. Elles n'en étaient pas encore là, elles avaient encore quelques années à travailler comme des esclaves pour espérer arriver à quelque chose. Karen et Adrianne étaient des filles sans histoire. Discrètes, inséparables, Elles étaient admises et aimées par les étudiants de leur université. Elles étaient lesbiennes disaient quelques-uns, elles étaient amoureuses disaient les autres. Certains, les plus proches, disaient qu'elles s'aimaient passionnément. Toutes deux très jolies, leur sourire n'avait d'égal que le pétillement de leurs prunelles. Elles étaient gaies (joyeuses) elles aimaient la vie, elles aimaient le monde, les fleurs les animaux, elles étaient surtout le reflet du bonheur total. Mais tout cela, c'était avant. Avant ce terrible accident qui emporta en quelques secondes la vie de Karen. . .

              Aneseau
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Tout à côté du lieu dit « La Pierre aux Fées » à quelques pas du vieux château, à la lisière du grand bois qui bordait jadis le village de Folleville, elle vivait dans une pauvre chaumière. « La Vieille Dame » ! C’est ainsi qu’on l’appelait aux alentours, vivait en recluse, et ne sortait que le soir venu. On la craignait. On l’évitait .Elle possédait, dit-on, des pouvoirs démoniaques : « Elle jette des sorts, elle mène les loups les nuits de pleine lune …» C’est ce que l’on chuchotait, à l’abri des regards de peur d’être entendu de La Vieille Dame. Ou peut-être même des adeptes de ses remèdes ou de ses pratiques. En effet, on lui prêtait également bien d’autres pouvoirs, elle n’avait pas son pareil pour combattre la fièvre. De bon matin elle vous faisait marcher dans l’herbe d’un pré couvert de rosée, cueillir par-ci, quelques poignées de feuilles de plantain, les jetant par-là, derrière, sans vous retourner. La pratique était efficace, autant que celle qui consistait à guérir les maux de ventre en prenant à jeun une infusion de la deuxième pelure du sureau qu’elle avait cueilli à la nouvelle lune, en récitant une prière aux saints Côme et Damien.

     Destruction Massive
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Saddam est un homme qui doit être intelligent, et dangereux, Il a déclenché une guerre qu'il n'a pas su gagner, et s'en est pris plein les yeux. C'est maintenant un homme blessé, parce qu'il a perdu devant l'Occident et ça, il ne le pardonnera jamais. Il rumine sa vengeance et son esprit tordu imagine des milliers de scénarios tous plus terrifiants les uns que les autres. Il a beaucoup investi dans la fabrication des armes bactériologiques et chimiques, et les ateliers de fabrication de ces potions tragiques ont été vite reconstitués. Aujourd'hui il tient sa vengeance, il a convoqué ses fidèles pour leur faire part de son plan, leur demandant leur appui pour le mettre à exécution. En ressortant de son bureau, sur les trois "généraux" dans le secret, deux se sont suicidés, pour ne pas avoir à accomplir cette tâche, tant elle était terrifiante, irréversible et incontrôlée. Et le déroulement des opérations a commencé. L'arme absolue: Les Kurdes, et la compassion de l'occident pour les martyrs de l'Irak. Il fallait y penser.

  L'Infirmière d'Ambazac
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« Bonjour, excusez moi de vous déranger, je m’appelle Ghylaine, et je suis infirmière à Ambazac. » Laurence se retourna, et fut surprise de la vision qui s’offrait à elle. La jeune femme était assez jolie, la trentaine, brune et le visage assez fin. Elle était un peu plus grande, très mince, les cheveux mi-longs, coiffés « à la diable ». Le maquillage assez discret, un rouge à lèvres très rouge, les sourcils très noirs, les paupières ombrées. Un grain de beauté sur la lèvre supérieure gauche. Le premier examen était favorable. Ghylaine souriait, Laurence lui rendit son sourire. « Je suis Laurence, et je n’ai pas besoin de piqûres ! Que puis- je pour vous ? —Voilà, je vous ai aperçue au concert d’Aixe-sur-Vienne samedi soir. Je vous ai vue prendre des photos, j’en ai pris aussi, je vous propose que nous les regardions ensemble. » Le sourire ne l’avait pas quittée en prononçant ces mots. Laurence trouva l’idée excellente, quoique peut être un peu intéressée :

      Les Etoiles Eteintes
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Sarah restait dans le mausolée pour mieux méditer. Elle appréciait que le décor soit aussi sobre, que le lieu soit aussi calme, que la lumière soit diffuse, et la fraîcheur aussi agréable. Seul flottait dans l'air ce parfum de géraniums, mêlé à celui de la canne à sucre, omniprésent à Saint-Benoît de La Réunion. Elle tira la porte derrière elle. Coupée du monde extérieur, elle serait mieux pour prier et se recueillir sur la tombe de sa belle amie. Elle aimait ce mur de marbre brut, ce dépouillement de tout objet de culte: pas de croix, pas de Christ, pas de Maries. Dehors, les géraniums en fleur ceinturaient l'édifice, mais dedans, aucune fleur, que la pierre, le marbre, la lumière. Une plaque de bronze sculptée à l'effigie d'une jeune femme aux longs cheveux épars, au visage fin comme l'avait Florane quand elle était arrivée dans sa vie. Pour que cet endroit soit tel qu'il est, Florane avait dû en définir tous les détails elle-même. Sarah pensait que le service des pompes funèbres pourrait peut-être lui donner quelques détails sur les derniers jours de Florane, et peut-être, qui sait, lui faire rencontrer les gens qu'elle connaissait, ou même qu'elle fréquentait ?

      L'Adjudant Moreau
gendarmerie-nationale

Roger Lheureux arriva au 4 rue de Seclin. Il était 9 h 15. L’ouverture de la centrale était à huit heures. Quand il lança un « salut » à la ronde, aucun de ses collègues ne lui répondit. Roger n’était pas à proprement parler un bon copain, mais il était le numéro deux de la centrale syndicale départementale, et à ce titre, il était plus craint que respecté. Ce qui choquait ses collègues de travail, c’est qu’il arrivait régulièrement en retard, et généralement dans un état de violence éthylique mal dissimulé. Chaque matin, Roger faisait une halte au « Café de la Savonnerie » situé juste en face de l’usine qui produisait des millions de tonnes de lessive en poudre. Dans ce café, nul besoin de passer sa commande, le patron vous sert d’emblée un café accompagné d’une « bistouille ». La bistouille étant ce petit verre de genièvre qu’il fallait boire en premier lieu et vider le second verre dans le café. Souvent on remettait ça, et après la deuxième ou troisième bistouille, on allait travailler. À cette époque, les accidents du travail étaient nombreux, et bien sûr, l’employeur était toujours l’unique responsable.

        Un Douze Avril
Joëlle et moi

Un 12 avril …. Oui c’était un 12 avril, je m’en souviens très bien, c’était le jour d’anniversaire de ma maman, et j’étais allée déposer une potée de tulipes sur sa tombe, des tulipes perroquets rouges et blanches, ses préférées. C’était la fin de l’après midi, à l’heure où le soleil, bas sur l’horizon, allonge les ombres, et colore la nature du vert jaune des feuilles naissantes, du bleu de ciel et de blanc nuages. Il faisait beau, il faisait doux. Sur l’autoroute il y avait peu de circulation ou du moins elle était fluide. Pas d’excès de vitesse, j’étais en balade. Je rentrais chez moi, il me restait tout juste une demi-heure de trajet. J’arrivai à proximité d’une aire de repos : « Aire de Tilloloy Ouest » et machinalement je mis le clignotant, je ralentis dans la chicane et débouchai sur le grand parking. Je m’arrêtais souvent à cet endroit, d’abord parce que sur mon trajet habituel je n’ai pas tellement le choix, mais surtout pour le bois qui entoure ce parking, c’est vraiment très forêt, c’est superbe.

            Joyeuse Noelle
Joyeux Noelle

Pour moi, Noel est rarement joyeux. Ici, là où je vis, à Madrid, La Navidad se fête bien entendu, mais ce n'est pas le même Noel qu'en France. Les jouets pour les enfants sont offerts le jour de l'épi Fanny, La Navidad est surtout une fête religieuse, où la messe de minuit se paie l'intérêt général. Autre raison et pas des moindres, ma grande fille rejoint son père en France. Ainsi elle ne souffre pas d'un dépaysement total. Voir son père, c'est bien vite dit. C'est un homme orgueilleux, très occupé, pas du tout papa gâteau. Mais Axelle a le coeur sur la main et elle accepte avec le sourire l'accueil réservé de son papa. Heureusement, le papa s'est remarié, forcément, il avait besoin d'une esclave pour lui porter le café au lit. Cette esclave s'appelle Rachel. C'est une de mes amies, elle est très belle, nous nous aimons beaucoup, en secret bien sûr. Je crois qu'elle est plus jolie que moi, un peu plus jeune il est vrai, Nous nous voyons rarement maintenant que je suis expatriée. Elle s'occupe très bien de ma fille, elle l'adore, elle n'a pas d'enfant, tous ses efforts n'ont jamais abouti. Rachel est pharmacienne. Son officine n'était pas très loin de mon immeuble, ainsi je ne rechignais jamais à aller me chercher les rares médicaments que je prenais. J'ai toujours fait beaucoup de sport. Du vélo, de la piscine. C'est ce qui me vaut sans doute d'être encore présentable aux 44 ans que je viens de fêter il y a deux jours. Rachel aussi fait du sport, mais en vraie compiégnoise, elle a choisi de faire du cheval.

         Le Petit Laurent
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Entre son bonnet bleu et son masque de chirurgien, on ne voyait que ses yeux noirs. Pourtant, quand il tournait son regard sombre vers l’une ou l’autre d’entre nous, on comprenait instantanément ses désirs, sans qu’il eût prononcé la moindre parole. J’étais devant lui, et j’étais l’assistante de l’autre chirurgien qui lui faisait face. L’entente des deux hommes était remarquable, c’était le meilleur « bloc » de tout l’hôpital. Je passais les instruments qu’on me réclamait, tout en essayant de ne pas regarder le champ opératoire, je ne m’y habituerai jamais. Pourtant, délimité par le drap bleu ciel et les linges blancs tâchés de rouge, l’ouverture ne ressemblait à rien que l’on puisse identifier, sans être du métier. Moi je ne l’étais pas, je passais les outils, comme une autre fille aurait pu le faire aussi bien. Et pour ne pas regarder l’opération en direct, je portais les yeux sur le chirurgien aux yeux noirs, ou sur son assistante qui me faisait face, dont les yeux étaient d’un bleu sauvage. De l’assistante on ne voyait que la proéminence de son imposante poitrine.

 Le Chaos de Targasonne
Le Chaos de Targasone

Sur les hauteurs des Pyrénées-Orientales, la Cerdagne est un vaste plateau ensoleillé, un encorbellement entre le mont du Carlit, et celui de Puigmal, tous deux culminants aux alentours de 3000 mètres. La Cerdagne est à une altitude de 1600 mètres en moyenne, et elle a la particularité d’être une région fertile, bien que de haute montagne, puisque l’on y récolte des céréales, du blé principalement. On y vient de Perpignan par la route qui monte à Font Romeu, ou par le côté Espagnol en traversant l’Andorre. Dans la partie occidentale de la Cerdagne, on trouve un lieu particulièrement mythique, « Le Chaos de Targasonne » Plutôt qu’un lieu, on pourrait dire un pays, voire une région, puisqu’il s’étend sur 50km. Le Chaos est un amoncellement de roches granitiques -par exemple- dont l’origine et la formation ne paraissent pas évidentes. Curieusement, on trouve aussi ce genre de relief dans la forêt de Fontainebleau ou dans la Lozère.

        Le Coupe Chou
Le coupe chou-1

S’il existe un lieu magique à Paris, c’est bien la gare de Lyon. Pas cette gare TGV souterrainement austère et sans âme, mais la gare de surface, la vraie, celle qui fait vibrer le cœur dès que l’on aperçoit l’horloge, du boulevard. J’ai toujours aimé les trains, depuis ma plus tendre enfance quand, avec mes parents et ma sœur, nous partions à la mer. La Gare de Lyon à l’heure des grands départs est habitée d’un esprit particulier. Peut-être est-ce simplement la concentration des voyageurs en attente. C’est cette odeur particulière, faite d’humanité, d’ozone et de poussière. Ce grand espace face aux quais, animé de ses panneaux affichant les horaires, et les milliers d’yeux, levés vers les chiffres verts qu’ils ne semblent pas comprendre. Et puis ce sont tous ces jeunes avec sacs au dos, assis sur les murets des escaliers descendant au sous-sol. Ils fument, ils mangent d’énormes sandwiches, vident quantité de boîtes de bière ou de Coca. Ils dorment ou s’embrassent, l’amour des fois, se fout du décor. En haut de l’escalier, ce superbe restaurant : « Le Train Bleu » qui fit briller de ses ors, la redoutable Nikita, alias Anne Parillaud.

            Jolie Luna
Lena Gercke

Sur les pavés de la place St Jacques, Rachel avait beaucoup de difficulté à marcher avec ses talons aiguilles, et se casser un talon maintenant, ne serait pas pour lui remonter le moral ! Rien n’allait vraiment bien depuis une semaine. Elle avait du mal à effacer de son esprit ce qui s’était passé, et ce soir-là, elle n’avait pas envie de rentrer chez elle, et de se retrouver seule avec ses idées noires. Sa petite fille était pour le week-end chez sa grand-mère. Elle entra dans le café le plus proche. Le Coq d’Or l’un des plus joliment décorés de la ville. Elle n’était pas une habituée des lieux, d’ailleurs elle entrait rarement dans un café. Il y avait du monde, de la musique jazzy, de la fumée, comme dans tous ces endroits-là, en fin d’après-midi. Elle s’approcha difficilement du bar et demanda un Tonic. Le barman la servit, puis, son verre à la main, elle chercha dans la salle un endroit libre pour se poser.

            La Mante
Les DrusCouleur

Je la reconduisis à la porte. Les quelques pas qu’elle fit devant moi suffirent à provoquer mes plus secrètes fêlures. Sa démarche, ses bottines à hauts talons, son jean élimé aux fesses, ses fesses rondes perchées sur des jambes interminables, ce perfecto, qui était choisi sans doute uniquement pour mettre ses fesses en valeur, et cette chevelure de jais, coupée court, très bas sur la nuque, avec cette mèche savamment rebelle qu’elle remettait en place d’un mouvement de tête des plus étudié. Deux anneaux dorés apparaissaient alternativement au rythme de son pas décidé…..Elle s’arrêta sur le palier, se retourna… Gros plan sur une poitrine agressive, moulée dans un pull col roulé blanc. Visage bronzé, ses yeux noirs lancèrent un éclair, histoire d’humaniser son sourire crispé. Elle commença à descendre les degrés, je fermai la porte appuyai mon front sur le chambranle, et je restai ainsi les yeux fermés, imprégnée de ces images qui repassaient en boucle, dans mon souvenir immédiat.

      Les Jeux de St Elme
Les Jeux de St Elme

Juin 1999 ! décès de mon père, puis en octobre, celui de ma mère. Après 63 années de mariage, la pauvre femme n'a sans doute plus estimé utile de continuer à vivre. Ils ont ainsi rejoint au paradis, leur fille décédée neuf ans plus tôt, à l'âge de quarante-huit ans. Il avait quatre-vingt-sept ans, elle en avait quatre-vingt-deux. Ils ont donc élevé trois enfants : deux filles et le garçon que je suis. Quelques mois plus tard, il fallut se décider à tirer un trait sur la matérialité de leurs existences : Vendre la maison où nous avons grandi, et la débarrasser de tous les meubles et objets leur ayant appartenu. Voir la maison de notre enfance complètement vide fut pour ma sœur et moi, une douloureuse épreuve. Au moment de charger les derniers cartons, ma sœur me désigna celui qui était resté un peu à l'écart.

     Les Jours de Liesse
Les Jours de Liesse

Il faisait un temps superbe ce jour-là. Dans la petite bourgade de Saint André, cette petite ville touristique de Haute-Provence près du lac du Castillon, la saison touristique était à peine commencée. Pourtant, il y avait pas mal de monde en ville, et déjà quelques nageurs courageux dans les eaux glacées. Pour certains c’était déjà les vacances, mais pour d’autres, le travail était encore d’actualité. Il faisait déjà chaud. Pourtant, la ville est à neuf cents mètres d’altitude. Le soleil comme toujours dans cette région était de la partie. Derrière les baies vitrées des bureaux, les employés commençaient à souffrir de la chaleur. Heureusement, la matinée de travail touchait à sa fin. Guillaume avait l’impression que ses clients étaient convaincus, et qu’il remporterait ce marché difficile. Il était assez fier de cette présentation. Bien sûr, il n’était pas seul à avoir réussi à établir ce climat de confiance, qu’il sentait maintenant installé chez ses interlocuteurs.

   Les Tricots de Marguie
Les Tricots de Marguie

Marguerite Dupain était une femme au grand cœur. Pourtant on ne peut pas dire qu’elle avait été gâtée par la vie. Née de parents miséreux de la région de Douai, à Goeulzin plus exactement, elle avait, toute sa jeunesse, traîné ses galoches le long du canal, trouvant dans cette campagne ouvrière tous les motifs qui pouvaient alimenter ses rêves. Elle s’imaginait par exemple qu’un intrépide marinier l’emporterait un jour sur sa péniche, et l’emmènerait ainsi de l’autre côté du monde, là où il n’y aurait que joies et que richesses. Son père, fut l’un des derniers ouvrier de la dernière brasserie du village, et comme bien souvent, il était le meilleur client de son patron.

   Le Miracle Impossible
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C'est ainsi que Jésus parvint dans une ville de Samarie appelée Sychar, non loin de la terre donnée par Jacob à son fils Joseph, là même où se trouve le puits de Jacob. Fatigué du chemin, Jésus était assis tout simplement au bord du puits. C'était environ la sixième heure.Arrive une femme de Samarie pour puiser de l'eau. Jésus lui dit: "Donne-moi à boire." Ses disciples, en effet, étaient allés à la ville pour acheter de quoi manger.Mais cette femme, cette Samaritaine lui dit: "Comment? Toi, un Juif, tu me demandes à boire à moi, une femme samaritaine!" Les Juifs, en effet, ne veulent rien avoir de commun avec les Samaritains.Jésus lui répondit: "Si tu connaissais le don de Dieu et qui est celui qui te dit: "Donne-moi à boire", c'est toi qui aurais demandé et il t'aurait donné de l'eau vive."La femme lui dit: "Seigneur, tu n'as même pas un seau et le puits est profond; d'où la tiens-tu donc cette eau vive?

          Noire d'Ecume
Noire d'écume

Voyager est sûrement ce qui me motive le plus. Lorsque j'ai choisi de faire ce métier, je n'y avais pas spécialement songé, ou alors, ce n'était pas l'élément fondamental de mon choix. Et pourtant, c'est ce qui m'apporte le maximum de joies. J'adore voyager. Me rendre au pied levé dans telle ou telle ville, dans ce pays ou un autre, est pour moi le plus grand des plaisirs. Ce n'était pas a priori évident. Il faut apprendre à voyager, comme il faut acquérir l'envie de voyager. Tout ce que l'on va rencontrer sera un étonnement. Je ne dis pas un enchantement, puisque sur notre terre, il se trouve malheureusement quantité d'endroits d’où l'on a plus envie de fuir plutôt que de séjourner. Quand j'ai su que je devais me rendre à Cadix (Cadiz en espagnol), j'ai ressenti ce petit pincement au cœur, signe de plaisir intense. Ce n'était pourtant pas la première fois. Je m'y étais déjà rendue, en coup de vent, une seule journée, et je m'étais juré d'y revenir. Cette fois, j'étais décidée à rester le temps qu'il faudrait pour la visiter, et pour en ressentir l’ambiance et le passé.

              Soledad
Roissy

Elle est moche cette voiture, avec cette inscription comme un tatouage ridicule à l’arrière « Taxis Lefèbvre » « Longues distances » « Roissy-Compiègne » C’était une Espace Renault, ce gros machin carré qui, à peine parti était déjà arrêté deux cents mètres plus loin au premier feu rouge. C’était comme une hésitation, cette voiture arrêtée. C’était la dernière chance, soit d’en descendre, soit de courir pour la rattraper. Mais Jane ne bougea pas, et personne n’en descendit. Les yeux pleins de larmes, elle ne distinguait plus nettement le véhicule. Elle le vit repartir, tourner au coin de la rue et disparaître. Axelle lui serrait la main comme pour dire, « ne pleure pas je suis là ». Ce n’était pas la première fois que sa « tata » partait en voyage. Mais Jane bien sûr ne lui avait pas dit que ce départ était le dernier, et qu’il n’y aurait pas de retour. Ainsi va la vie des gens qui assument leurs choix, la vie est unique, il n’est pas toujours écrit qu’une rencontre change forcément la vie, la vie se vit en suivant le chemin décidé. La vie ne change pas toujours de vie.

              Manon
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Quand la boîte aux lettres fut ouverte, les trois quarts de son contenu se répandirent sur le sol. Manon se baissa, difficilement, car les talons et la jupe serrée ne sont pas spécialement faits pour cet exercice. Elle ramassa un à un tous les journaux de pub de télé, toutes les propositions des mages de la région, toutes ces enveloppes pleines de factures, et d’autres feuillets divers. Au beau milieu de ce fatras, un document attira son attention. Elle le plaça sur le haut de la pile que sa main contenait avec difficulté. Puis elle referma la boîte, se dirigea vers l’ascenseur, après avoir pianoté le digicode. Elle retrouva avec délice l’appartement illuminé de soleil, avec son parquet brillant, ses jolis rideaux de voile de lin, ses fleurs et ses tableaux, sa bonne odeur de parfums et de cire, cette odeur si caractéristique des alcôves féminines. Manon posa le tout sur la table du salon, et partit dans la salle de bain au cas où quelque réparation serait nécessaire. Il fallait qu’elle se change pour aller faire quelques courses au Champion tout proche. Ceci étant fait, elle jeta un coup d’œil sur le document qu’elle avait ramassé.

            Fait Divers
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A 300km /heure, le Thalys filait vers Bruxelles en longeant l’autoroute du Nord. Dans le compartiment de première classe, confortablement installé, bercé par le ronronnement régulier du TGV, Albert se laissait aller à sommeiller. Il adorait ce train, où le confort était parfait, le seul endroit où il savait pouvoir réellement se reposer. Il faut dire que sa vie était quelque peu agitée, et le stress prenait souvent le relais de la volonté et de la détermination. Il était installé sur le fauteuil à coté de la vitre qui donnait coté autoroute. Il savait que les voitures qu’il voyait, roulaient au moins à 150km/h. Pourtant, il avait l’impression qu’elles allaient au ralenti. Il remarqua une BMW qui sur la file de gauche doublait toutes les voitures avec une aisance étonnante. Malgré tout il la perdit de vue très rapidement. Sur les fauteuils de l’autre coté de l’allée, il y avait deux jeunes femmes, qui se regardaient en se parlant à voix basse, quelques fois un sourire illuminait les visages.

 

Les Dryades

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J'ai déjà par mes nouvelles, abordé beaucoup de sujets. Peut être font-ils partie de "tout le reste". Je ne suis pas une fervente admiratrice de Simone de Beauvoir, (sauf quand le rôle est tenu par la divine Anna Mouglalis) et je ne me reconnais pas dans les féministes de tous bords. Pourtant, s'il y a un trait de ma personnalité qui surclasse tous les autres, c'est bien mon amour de la femme. Je suis lesbienne donc, puisque c'est l'étiquette que l'on colle aux tribades modernes, mais là encore, ce n'est pas vraiment ça, puisque je suis mariée, et j'ai une fille d'un premier mariage. Je tiens à vivre ma vie comme tout le monde, le plus simplement possible. J'allais dire le plus "normalement" possible, mais je sais que cela aurait fait bondir certaines âmes guerrières. Rassurez-vous, je ne vise personne. Une vie de famille, c'est ce que j'ai toujours souhaité, en faisant la part de ma vie et de mon autre vie. Mon alter ego est une entité qui existe, qui influe bien évidemment sur mon autre vie. J'espère simplement que personne autour de moi, n'en souffre. Si quelqu'un ignore ma bisexualité, c'est que ça ne l'intéresse pas, car je ne dissimule rien, je vis comme ça vient. Je vis au grand jour, et j'aime au grand jour. Je n'ai aucune arrière-pensée, aucune envie de dissimulation. "Je roule plein phares". Ma devise pourrait être le titre de ce blog, "O me quieres O me dejas. Ce qui veut dire en clair, "Ou tu m'aimes ou tu me laisses". C'est d'autant plus facile à comprendre que je vis en Espagne, banlieue de Madrid près de l'aéroport. Je suis en Espagne depuis 6 ans bientôt. Je m'y suis installée pour raison professionnelle, quand l'envie m'est venue de faire "autre chose, autrement". Ce n'est pas pour raconter ma vie, mais plutôt pour raconter mon histoire, ce qui bien sûr, est différent. Je ne suis pas une pro des blogs. Il y a encore quelques mois, j'ignorais tout de cette façon de s'exprimer. J'avais vu bien sûr les merveilles réalisées par ma belle amie Ana, et sans ce stupide accident qui m'a clouée durant quelques semaines, je ne me serais jamais lancée dans cet exercice. 

 

Chapitre 1

Les Demoiselles de St Ladre

 

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Samedi 15 décembre 2007 La petite route était noire et luisante au milieu de toute cette neige grisâtre. À peine dégagé, le ruban d’asphalte était étroit, et les voitures se croisaient avec difficultés. Il avait neigé fortement depuis le début de ce mois de décembre. Déjà, mi-novembre, quelques flocons avaient blanchi la campagne. Et depuis, une neige très fine, humide et pénétrante, n’arrêtait pas de tomber, virevoltante au moindre souffle de vent. Ce n’était pas suffisant pour recouvrir la route abondamment salée, mais assez pour effacer en une journée toutes les traces de la veille. La circulation n’était pas très intense, il semblait que l’activité, comme la nature, s’était endormie. Il faisait froid et humide, d’autres précipitations importantes, peut-être neigeuses, étaient attendues. Le ciel était gris bien sûr, et la nuit ne tarderait pas à accabler le paysage d’un sombre avenir. Les arbres des taillis tendaient désespérément leurs squelettes vers de gros nuages terrifiants. Depuis les quinze jours que la neige était omniprésente, la plupart des branches de ces arbres nus avaient perdu leur chargement de poudre blanche. Et pour d’autres, il suffisait d’un souffle de vent pour qu’elles se dévêtissent, dans un chuintement à peine perceptible. La petite route reliait la départementale à la petite ville de Cagny. C’était un raccourci bien pratique qui permettait de rejoindre le parking de la gare de Longueau. À quelques centaines de mètres de la station, la route était surplombée par cet immense viaduc qui enjambait la vallée marécageuse. Ce que l’on appelait la rocade, mais en réalité c’était l’autoroute qui contournait la ville par le sud en surplombant la vallée. Le flot des véhicules épargnait ainsi le centre-ville qui, à grands frais, avait été tristement abandonné aux piétons. Parallèlement à la route, sur un remblai de quelques mètres, la ligne de chemin de fer émergeait tout juste, elle aussi, de la couche de neige. On ne distinguait que les rails, les traverses n’étaient plus visibles qu’à de rares endroits. Comme la petite route, les voies s’engouffraient sous le viaduc dans la direction de Paris. De l’autre côté des voies, la falaise de craie du plateau picard ajoutait sa grisaille au décor ambiant. En face, dans la vallée, le marais. Cette immense étendue d’étangs constitue le lit de la rivière qui coule sa tranquillité dans la réserve Saint-Ladre, avant de se mêler à la Somme à Camon, entre Longueau et Amiens. 

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XL-Ombrages
 

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 Voici que vient l'été, la saison violente.
    Et ma jeunesse est morte ainsi que le printemps


Guillaume Apollinaire

                                         
                                        J’appelai Luigi pour lui dire que nous étions contentes. Cela lui fit plaisir, je le sentis dans sa voix. Je lui demandai s’il aimerait me voir comme je lui avais promis, et il me fixa rendez vous pour le lendemain soir. J’arrivai un peu en retard, et je m’en excusais. Il paraissait en pleine forme, il était souriant et accueillant.
« C’est vrai que Marie-Noëlle a été très contente. Elle m’a confié n’avoir jamais joui de cette façon avec un garçon.
— On n’a pas eu à se forcer, c’est une femme d’une grande beauté.
—Je suis venue te rendre ce qui t’appartient.
—C'est-à-dire ?
—Voilà, j’ai cinq mille francs que tu m’as donnés, que je ne peux conserver. Je t’ai fait marcher, je n’ai pas encore eu besoin de faire le tapin, et ce que j’ai fait avec toi, je l’ai toujours fait avec un très grand plaisir.
—C’est vrai que tu ne ressemblais pas aux filles dont c’est le métier. Tu peux les garder, j’ai vraiment pris beaucoup de plaisir avec toi et avec ton amie. Et si l’on pouvait continuer à se voir, ça serait super. Et tu n’as rien à craindre, quand je fais l’amour avec des garçons, je suis toujours protégé.
—C’est tout à fait rassurant.
—Ta compagnie me plait beaucoup aussi, Et si tu voulais faire autre chose que l’amour, je suis preneur, pour le seul plaisir évidemment.
—En attendant, tu reprends cet argent, je gagne bien ma vie, je n’en ai aucun besoin.
—Ok, je le garde. Tu me réduis à ton bon plaisir alors ? Je te propose un arrangement. Si tu as envie d’un homme tu m’appelles, et si j’ai envie d’une femme, je t’appelle.
—C’est un bon début, et mon bon plaisir c’est que tu me fasses l’amour comme si tu étais amoureux.
—Hum, je vais essayer dit-il en riant. » Quand il voulait, il savait s’y prendre. Je passai un de ces moments délicieux : Quand la virilité s’allie à tendresse. J’étais comblée, épuisée, je ne regrettais rien. Souvent, je me repassais ces instants, et je me posais à chaque fois la question : étais-je amoureuse de Luigi ?
Simone arriva le Jeudi soir. Elle prit possession de sa chambre au Domaine. Elle parut enchantée de la beauté et du confort du lieu. Elle avait prévu de passer la journée du lendemain avec Maud. J’allai dîner avec elle le soir, et je la trouvai un peu triste. Elle finit par me confier qu’elle ne se plaisait pas sur la côte, et qu’elle était très préoccupée par la santé d’Axel. C’est la raison pour laquelle elle repartirait dès le Dimanche soir. Je l’emmenai à La Bonne Idée A Saint Jean. Là où nous étions allés le lendemain du mariage. Que le temps passe vite ! Elle s’intéressa beaucoup à mes affaires, et parut heureuse que ça marche aussi bien. Elle me dit que Josépha cherchait du travail. Elle me laissa son numéro, en me priant de ne pas la mentionner, si je l’appelais. Elle m’apprit qu’elle avait été sollicitée par la voisine de l’appartement du Boulevard Malesherbes. Son appartement était à vendre, et elle pensait qu’il y avait la possibilité de faire communiquer les deux logements pour en faire un très vaste, ou de garder ce projet pour une éventualité. Je trouvais la proposition intéressante, je pourrais très bien quitter Compiègne et aller vivre à Paris, à deux pas de mon travail. Simone me laissa les coordonnées de son ex voisine. Et puis je racontai à Simone les derniers potins de nos relations, et curieusement, ce fut l’épisode Luigi qui l’intéressa le plus. Je la reconduisis à son hôtel. Elle refusa que je monte, vu mes occupations prochaines. Je savais que Maud l’appellerait dès que je lui donnerai le top, pour éviter qu’elle ne se sente trop seule. Maud saurait faire ce qu’il fallait. Je l’appelais, je lui glissais deux mots doux. Elle me dit que Marie-No l’avait appelée pour lui dire qu’elle l’aimait. Je sentais encore son émotion dans sa voix.
« Elles sont comme ça les femmes, Maud, elles savent dire merci quand elles reçoivent autant d’amour. Si nous sommes deux à t’aimer et à te le dire, c’est parce que tu le mérites. Et bientôt, il y en aura trois. Occupe toi d’elle, elle n’a pas le moral.
—Sois rassurée, je sais le faire.» J’avais toute confiance, Maud était la générosité faite femme. Le lendemain, c’est Marie-No qui arriva toute joyeuse. Elle m’avait réservé une surprise, Linda était avec elle. Elles s’étaient données rendez vous à la gare du Nord, et elles ont pris le train de Compiègne ensemble.
« Le seul problème, c’est que je ne sais pas où elle pourra dormir ?
—Je vais y réfléchir dis-je en embrassant mes chéries avec une joie sincère. » Axelle était très heureuse. C’est la première fois qu’elle avait ses deux « amours » en même temps. On aura du mal à l’envoyer au lit quand il sera l’heure.
Le lendemain, il faisait un temps magnifique. Il y avait eu beaucoup de brume, et la forêt exhalait des senteurs surnaturelles. Linda essaya le vélo que j’avais avant, et que je ne voulais pas revendre. Il lui allait bien, nous étions du même gabarit, sauf qu’elle avait des cuisses plus fortes que les miennes. C’est la première fois que Linda venait pédaler avec nous. Mon père était là aussi, toujours avec l’air préoccupé. Il fit les ultimes réglages du vélo pour Linda.
« Pourvu que ça ne soit pas un problème de santé » pensé-je. Il ne le dirait pas, mais si c’était le cas, il ne ferait pas la balade avec nous ! Linda nous étonna tous. On avait l’impression qu’elle s’entraînait avec nous depuis des années. Les cents km ne lui posèrent aucun problème, à l’arrivée elle était fraîche comme une rose. A nos questions, elle répondit qu’elle faisait beaucoup de gym, et un footing tous les jours. Ce que j’ignorais totalement. Elle était toujours d’une fraîcheur radieuse quand j’arrivais le matin. L’après midi, on s’exposa au soleil au Carandeau. Il y avait pas mal de monde, beaucoup de garçons. Trois femmes ensemble assez bien balancées, ne passent pas inaperçues. Linda surtout, dont la couleur et la musculature attiraient tous les regards..
« J’ai l’impression que tu fais beaucoup d’effet à ces garçons!
—Oh j’ai l’habitude, ils aiment bien mater les négresses ! Ils ne savent pas que l’esclavage est fini.» Pourtant, aucun n’osa nous approcher. L’aura des lesbiennes se transforme en bouclier dissuasif face aux hommes. On leur fait peur. Et c’est la vérité. Axelle faisait des pâtés de sable, et elle allait régulièrement rincer son seau, elle était très occupée !
Dans un petit groupe à coté, il y avait une jeune fille assez jolie qui n’arrêtait pas de nous regarder. Sans doute une jeune fille qui se cherchait. A ma grande surprise, Linda l’avait remarquée aussi. Etant visiblement du même âge, elle prit l’initiative de lier connaissance. La jeune fille était radieuse, son sourire était resplendissant.
« Dis donc Blackie , c’est comme ça que tu chasses la gazelle dans ta savane ?
—C’est comme ça ! Bwana y en a jalouse ?
—Evidemment ! » Et Linda prit la fille par la main, et l’entraîna dans le petit chemin vers la forêt. On se regarda avec Marie-No, nous étions sur le cul !
« Tu avais déjà vu ça ?
—Non jamais. Elle va la manger toute crue ! » Elles restèrent dans la forêt une bonne heure, quand elles réapparurent, elles se tenaient par les épaules, et Linda avait perdu son haut de maillot. C’est pour le coup que les garçons faillirent en avaler leur serviette de bain. Elles étaient souriantes.
« Je vous présente Florence. Florence, voilà Marie-Noëlle, eve anne et sa petite Axelle. » La fille nous embrassa et s’installa. Linda était aux anges. Elle avait au moins le mérite d’avoir montré qu’elle n’avait rien à faire des garçons qui la dévoraient des yeux. Marie-No s’approcha pour me murmurer :
« Quand on s’est connu, tu aurais été capable de me draguer comme ça ? Bien sûr, qu’est ce que tu crois ? Même encore maintenant. Surtout que tu es de plus en plus craquante !
—Merci, tu auras un sucre !
—Je n’ai pas pu t’en parler encore, Demain Michèle sera là.
—Tu l’as invitée ?
—Non, pas du tout ! Elle a été prévenue par radio-Madrid, et elle m’a demandé si elle pouvait venir apporter un cadeau à Axelle.
—Je lui ai dit que ce n’était pas interdit.
—Chic ! Je vais enfin voir la merveilleuse maîtresse d’école. Je pourrai prendre des cours particuliers ?
—Si ça te chante, pourquoi pas ? Tu ne regretteras sûrement pas. C’est Jocelyne qui ne serait pas contente.
—Pfft elle a un mari ! Elle n’a qu’à s’en servir !
Le lendemain, le soleil était encore au rendez vous. Une chaleur raisonnable, et un ensoleillement maximum. Nous étions au Domaine dès onze heures trente. Les premiers arrivés furent mes parents. Ma mère n’était pas brillante, mais je ne sus pas pourquoi. Mon père était refermé comme la veille, ma sœur s’était invitée et paraissait aimable et tout sourire, cela cachait quelque chose, forcément.
Puis ce fut Gustave le parrain et son épouse. Toujours le même homme avec une barbe à la Gainsbourg en plus. La véritable utilité de cette barbe, c’est qu’elle cache bien les défauts des hommes qui veulent paraître plus jeune.
Le Colonel Dumas et sa femme Claudine ; ils n’avaient pour ainsi dire pas changé. Je retrouvai le Colonel ému, et son épouse rayonnante. Elle me prit à part pour me demander si je pouvais lui réserver quelques minutes en particulier, ce que je lui promis. Simone était déjà là avec Maud, et son mari venait juste d’arriver, ce qui ne changerait rien dans sa façon d’être, et c’était bien. Louis et Jocelyne arrivèrent tout juste avant midi, et Jocelyne passée aux UV était au summum de sa beauté.
« Elle veut être compétitive pensé-je. Je l’embrassai en la félicitant de sa beauté. Je sentis frémir sa joue lorsque je l’embrassai. Elle apprenait vite ! Odile, somptueusement décolletée, son mari, et la petite Eliande, merveilleuse petite fille, la grande amie d’Axelle. Guillemette arriva en taxi, et Patricia peu après. L’invité de dernière heure fit une entrée discrète ; Luigi, qui vint nous embrasser, Marie-Noëlle et moi, et Linda qu’il découvrit avec plaisir. J’avais joué là une carte difficile. Au cas où Christian aurait la malencontreuse idée de venir. Peut être était-ce un simple réflexe pervers. J’avais dit à Luigi que je ne l’avais pas invité. Mais il pouvait très bien arriver par surprise.
Michèle arriva. Inconnue de tous, excepté de Maud, de mes parents, et de Louis et Jocelyne. Je fus la première à la voir venir, de sa démarche de top-modèle, talons aiguilles, jeans blanc, et chemisier semi-transparent bleu marine qui laissait deviner les seins libres. Elle était magnifique de simplicité et d’élégance. Elle avait la poitrine idéale pour paraître comme ça. Ni trop menue, ni trop volumineuse, une forme délicate, que beaucoup de jeunes filles pourraient lui envier. Elle avait quarante huit ans, elle en paraissait dix de moins. Sa coupe de cheveux à la garçonne, modifiée lesbie, me faisait un effet fou. J’allais à sa rencontre, on s’embrassa sur les joues, on se regarda dans les yeux, elle n’avait pas changé, pas même d’eau de parfum. Son regard pénétra au fond de moi, allumant des feux follets dans toute ma personne. Et tout de suite elle me dit :
« Ta femme est là ?
—Oui, la tienne aussi. Tu veux que je te la présente, ou tu la trouves toute seule ? —Je la vois, elle est là-bas. Je suis sûre que c’est elle.
—Tu veux peut être voir ma fille avant Non? Peut être aussi me dire que tu me trouves belle ?
—Oh oui, excuse-moi, je suis obsédée par ma rivale.
—Comment veux tu que je te présente ?
—Comme tu veux, celle que tu as abandonnée jadis par exemple.
—Tu veux être désagréable ?
—Je ne sais pas encore.
—Si tu me fais ça, je ne t’adresse plus jamais la parole. Juré craché.» Je la prenais par le bras, et l’emmenais. Je lui présentais Axelle. :
« Axelle ma puce ? Regarde, c’est la maîtresse d'école de maman quand j’étais petite.
—Mais elle était petite aussi alors?
—Oui ma chérie, elle était petite aussi, mais déjà très belle.
—Alors tu l’aimais beaucoup ?
—A la folie. » Axelle avait réussi à arracher une larme à Michèle. Je lui tendis un kleenex. Marie-No arrivait vers nous, souriante, blonde ensoleillée ; c’est Michèle qui parla la première.
« Bonjour Marie-Noëlle,
—Bonjour Michèle, ça va faire dix ans qu’elle me parle de toi.
—On ne m’a pas menti, tu es vraiment très belle.
—Sûrement moins que toi, pour qu’elle t’aime encore autant !
—Tu sais bien que non. eve anne est le plus grand bonheur qui me soit arrivé, mais ce fut aussi mon plus grand malheur. On peut mourir de désamour. Hélas, on ne peut pas refaire l’histoire. On s’embrasse ? »
« Bon, quand vous aurez fini la brosse à reluire, on continue les présentations ? Voilà Gustave, que tu as rencontré une fois je crois à Villeneuve d’Asc, avec la meilleure des épouses.
—Oui, je m’en souviens. J’espère qu’on pourra parler un peu. J’ai des choses à vous dire.
—Je ne te présente pas Louis et Jocelyne. Tu peux admirer Jocelyne qui est absolument divine,
—Absolument, je confirme
—Linda mon associée.
—Très bon goût eve anne, elle est superbe.
—Et très efficace.
—Patricia mon Psy préféré.
—Vous devez être très occupée Patricia, avec ce genre de cliente ?
—Hélas non, pas suffisamment, les temps sont durs.
—Odile, Nicolas et Eliande mes voisins. Si je dois déménager, je les emmène.
—Maud, je ne te présente pas ?
—Maud, c’est pour eve anne que tu es aussi belle ?
—Bien sûr, pour qui d’autre ?
—Et Simone, mon employeur Parisien, ma confidente, ma conseillère, ma maîtresse, mon ange gardien, et beaucoup plus encore. Une amie irremplaçable. —Très heureuse de te connaître Michèle. Tu as fait de ton élève une femme d’exception. J’aimerais que l’on parle un peu un de ces jours.
—Avec plaisir Simone..
—Luigi, mon copain, mon ami. Mon chevalier servant….
—Et il sert souvent ?
—Très drôle ! Nous sommes devenus inséparables… Tu vas voir Radio Madrid ? Tu vas faire des économies de téléphone.
—Oui, je vais l’embrasser. Tiens ta chipie de sœur est là. Putain, quelle garce celle là !
—Je ne te le fais pas dire. Je t’ai réservé le meilleur pour la fin : Le colonel Dumas, l’homme qui m’a fait aimer l’armée. Et Claudine son épouse, qui a le mérite de l’aimer. Nous avons bien travaillé ensemble. J’ai tout appris avec le Commandant Ducrocq qui est à Istres, et j’ai pu mettre tout en application sous les ordres du Colonel Dumas. Tous deux se sont pris d’affection pour Marie-No et moi. Nous sommes toutes les deux très fières d’avoir servi sous leurs ordres.
—Le Capitaine Lenoir exagère. Elle s’est révélée être un officier de qualité, qui a apporté énormément à la compagnie qui lui a été confiée. Elle a su transmettre son savoir faire et sa passion à l’Adjudant-chef Duval. Toutes deux sont des exemples pour notre régiment. Je ne connais pas un seul militaire du génie de l’air qui n’aurait pas aimé servir sous leurs ordres.
—Hé bien eve anne ! Que de louanges. Je n’imaginais pas que ton passage à l’armée avait remporté un tel succès. C’est Austerlitz !
—Ce n’était pas un succès. C’était une mission que nous avons menée à bien.
—Je peux vous révéler "confidentiellement," qu’eve anne est « proposable » C'est-à-dire qu’elle a toutes les chances d’obtenir ses barrettes de Commandant de réserve. Il faut qu’elle fasse sa dernière période. Cette fois ci, je ne pourrai pas signer sa promotion, cela viendra du Ministère.
« Dites-moi Colonel. Après le déménagement des Sablons, qu’allez vous faire ? » Je vis le Colonel sourire et regarder sa femme qui souriait aussi.
« J’avais parié que vous aborderiez le sujet ! Après les sablons, je prends le commandement de l’EMGA, Je remplace votre ami, le Général !
—Et le Général s’en va Boulevard Victor ?
—Voilà, on ne peut rien vous cacher. Vous êtes la logique même.
—Et au ministère, celui qui signera ma promo sera ? Le Général Thiriet !
—Vous avez tout compris, comme d’habitude. eve anne, félicitation pour votre future promotion. Vous pourriez croire, madame, à nous entendre, que cette promotion se fait au choix ? Ce n’est qu’un aspect de la question. La véritable raison, et le Général la connaît bien, c’est que le Capitaine de réserve eve anne Lenoir a été de loin le meilleur officier que nous ayons eu dans nos rangs.
—Mes compliments, c’est sans doute grâce à l’excellente éducation que tu as reçue ? Tu as du avoir d’excellents professeurs !
—Bien sûr ma chérie, sans toi je ne serais rien. Et aussi grâce à Gustave qui a réussi ma sortie de l’enseignement.» Michèle resta un moment à discuter avec le Colonel. Et Claudine me prit par la main et m’entraîna à l’écart.
« On se tutoie ?
—Bien sûr.
—Je voulais te transmettre toute ma sympathie. J’ai toujours su que le Colonel était amoureux de toi. Il était fasciné, il parlait de toi en dormant. Et je suis reconnaissante que tu n’aies pas profité de la situation.
—Pour être franche, je ne peux assurer que je fus maître des évènements.
—Je le sais aussi, mais il ne s’est rien passé, et tu n’as pas cherché à renouer ce lien. Sinon, il m’aurait abandonnée, et je n’aurais rien pu faire. Il a passé une longue période de stress. Je ne savais pas comment l’aider à en sortir. Et tu as eu la bonne idée de nous inviter à votre mariage. Il a été surpris, Il avait peur d’accepter. Ce fut l’électrochoc qui l’a fait revenir dans le raisonnable. Tu lui as montré que votre estime réciproque était intacte. Voilà, c’est tout ce que je voulais te dire. Et c’est pour cela que je veux t’embrasser. J’ajoute que je comprends pourquoi toutes ces femmes sont amoureuses de toi. Tu le mérites bien, et j’en fais partie maintenant. » Et elle m’embrassa sur la joue. Et voilà comment on perd son Rimmel, je finirai par ressembler à Maud.
Puis c’est le Colonel qui vint vers moi :
« eve anne, tu ne seras pas obligée de me répondre, mais il y a une question qui me revient toujours : Comment as-tu fait pour que le Général te donne un tel avancement ?
—Vous vous imaginez sans doute que je lui ai fait des choses ? Hé bien Non ! Pas du tout ! J’ai accepté de laisser ma place à un garçon qu’il voulait pistonner. Ce n’est pas plus compliqué que ça. Je suis revenue de Versailles trois mois plus tôt, vous le savez bien !
—Oui, c’est vrai, mais je ne savais pas pourquoi, il semblait que c’était un mystère.
—Rassurez vous Colonel, ce que je viens de vous dire est la pure vérité, et n’en reste pas moins un secret ! Je vous jure sur la tête de ma fille!
—Merci, merci d’accepter de rester mon amie. »
Le buffet avait été dressé dehors, sur la terrasse, à l’abri de velums blancs. C’était magnifiquement présenté. Et c’était succulent. Axelle recevait une montagne de cadeaux. Elle passerait l’année pour profiter de tout. Michèle revint me rejoindre.
« Alors, tu avais des choses à me dire ?
—Des quantités. Au sujet de Jocelyne, je sais tout.
—Mais comment l’as-tu su ?
—T’a-t-elle dit qu’elle était venue me voir à Paris?
—Non, elle ne m’a rien dit.
—Tu peux le garder pour toi ?
—Je te le promets.
—Et bien voilà, elle est venue à mon agence à Paris, et elle s’est laissé séduire trop facilement. Alors qu’elle n’avait aucune expérience homosexuelle. J’ai immédiatement pensé qu’elle ne voulait pas passer pour une « débutante » à votre prochaine rencontre. Et l’autre jour, j’étais allée rencontrer un futur client qui passait par Amiens. Nous avions rendez vous à son hôtel, le Sofitel. Nous étions dans le petit salon, à droite en entrant, et je t’ai vue arriver. Et quand j’ai quitté mon client, juste au moment d’entrer dans le hall, j’ai vu arriver Jocelyne, qui s’est adressée à la réception, et qui a pris l’ascenseur. Après je suis partie.
—C’est incroyable.
—N’est ce pas ? Quelle coïncidence ! Si vous aviez à parler affaires, vous l’auriez fait à l’usine ? Remarque, que ça ne me gêne pas du tout. Elle n’est pas très adroite, mais elle a un corps splendide, et elle jouit très bien. Tu as raison d’en profiter.
—Oui, j’ai appris à faire comme toi. Quand on n’a plus l’amour qui mobilise toute ta personne, tout le temps, on tire à vue sur tout ce qui bouge, sauf les hommes, alors que toi, tu en joues aussi.
—Tu es en forme pour les allusions aujourd’hui ! J’en joue très peu.
—J’espère que l’on pourra se parler plus longuement ?»
(Si ce n’est pas un beau mensonge ça !)
Et soudain, au coin de la terrasse, je vis arriver Christian, un paquet cadeau sous le bras. Je fonçai sur lui !
« Que viens-tu faire ici ? Tu n’es pas le bienvenu.
—Je sais, je viens juste apporter ce cadeau à Axelle et je me sauve. N’aie pas peur, je ne suis pas venu pour me disputer. Ni pour faire un scandale. Occupe toi de tes pouffes.» Je le suivis des yeux. Il se dirigea vers Axelle qui se laissa embrasser, prit le paquet, le posa par terre et continua son jeu avec Eliande. Christian fit demi-tour, et je vis son visage s’éclairer dans ce magnifique sourire que j’avais tant aimé. Je suivis son regard pour voir qui était bénéficiaire de cette attention, je m’approchai pour entendre Christian s’exclamer :
« Luigi ! Mais que fais-tu là ? Tu t’es paumé ? T’es un ami de la famille maintenant ? Il n’y a rien pour toi ici ! » Luigi se trouva excessivement gêné. Il regarda tout autour pour voir si quelqu’un avait assisté à la scène. Son regard croisa le mien, et piteusement il baissa la tête. Une autre paire d’yeux avait aussi été témoin de la rencontre, C’était Maud qui aussi chercha mon regard. Les deux garçons s’éloignèrent un peu, discutèrent un moment, et je vis le beau sourire de Christian partir en déliquescence, pour faire place à un visage gagné par la colère. Il me regarda, il avait la même lueur dans les yeux que la dernière fois. Je m’approchai et sans baisser les yeux, je lui dis :
« Que t’arrive-t- il mon amour ? Il me semble que tu as perdu le sourire. Je t’ai déjà vu une fois avec ces yeux là ! Tu peux me frapper, si tu en as encore envie et si c’est ta seule façon de t’exprimer ! Je ne comprends pas ta colère. Etre homosexuel n’est plus un délit, la seule contrainte qui nous reste, à moi comme à toi, c’est de l’assumer. Alors dégage ! Disparais. Luigi n’y est pour rien. Je ne pouvais pas imaginer que tu serais assez con pour mettre les pieds ici. » Je me retournai, juste derrière moi, il y avait Gustave et le Colonel. Marie-No, Linda, et mon père. Une escorte de choc. Christian quitta le Domaine. Je m’approchai de Luigi.
« Je te jure que ce n’était pas prévu. Je ne pensais pas qu’il oserait se présenter. Luigi, dis moi la vérité ; C’est pour me ménager que tu as truqué les photos ?
—C’était pour que tu ne sois pas malheureuse.
Je voulais vous laisser une chance de vous retrouver.
—Mon pauvre Luigi, ton bon cœur te perdra. » Maud s’approcha :
« Bonjour Luigi.
—Bonjour madame Lenoir. Je vous demande pardon.
—Ce n’est pas grave, tu seras toujours un mauvais élève ! »
« Ca dépend pourquoi Maud. Il y a des matières pour lesquelles il est très doué. —Alors là, je jure que je ne lui ai jamais rien enseigné de tel ! » Je retrouvai Marie-No. Elle était avec Michèle qui lui tenait la main.
« Tu as mal agi. Tu aurais dû l’ignorer tout simplement. Ne pas chercher à savoir. Je n’aime pas quand tu es agressive.
Ce n’est qu’un homo, comme moi, comme toi, comme elle, comme nous.
Il est malheureux c’est tout !


—Non, mon cœur. On n’est pas à la gay-pride. C’est le père de ma fille.»



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Suite 

tn Ombrages G 

tn Ombrages D 

 

Par eve anne
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