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Heure d'Hiver

   

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   L'Hiver

 

 

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Vulnerant omnes
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Je suis comme je suis,
Je plais à qui je plais.

ego sum ego sum
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Bonne Année



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Extraits

 

Rencontre en Forêt
carrefour11

J’ai fait une sortie hier soir en fin d’après midi, et je ne sais pas pourquoi, j’ai pris mon VTT au lieu du vélo. Dans les chemins de la forêt j’ai été doublée plusieurs fois par le même gros 4-4. J’ai eu l’impression que le mec voulait attirer mon attention. J’ai remarqué, au moment où il me doublait qu’il ne portait rien, il était torse nu. Nos regards se sont croisés, Puis il est parti loin devant. Il faisait doux, pas de vent, la forêt sentait bon. . . . . . . . . Un peu après, au coude du chemin, j’ai vu le 4-4 arrêté, dans un endroit où le chemin se rétrécissait, il n’y avait plus de place pour passer à droite, le taillis touchait la voiture, et un tout petit passage à gauche. 

La devise du Quebec
Hôtel du Parlement - Copie

Québec hiver 1876, en fin de matinée le soleil donnait à la ville gelée, les mille feux du diamant. Le froid était vif et les passants emmitouflés étaient peu nombreux. Pourtant, sur le trottoir ensoleillé, un homme ne semblait pas ressentir de gêne à déambuler tête nue, normalement vêtu, ou plutôt anormalement vêtu dans l’air glacé. Il n’avait pas de gants, et son regard bleu était perdu dans le rêve où il flottait. Il tenait à la main un petit rouleau de papier, et ce feuillet enroulé faisait de lui l’homme le plus heureux de la terre. Il suffisait de le regarder pour remarquer le sourire qui illuminait son visage d’homme intelligent et déterminé. Il venait d’avoir quarante ans, son allure était alerte, et son élégance impeccable attirait le regard.

Le testament de Benjamin  Briggs
Le testament de Benjamin Briggs

Les arbres du square Victoria commençaient à dérouler leurs feuilles. Florane-Marie D’Auteuil avançait à pas légers le long de la bordure du trottoir de la rue du Square Victoria. Malgré le soleil qui avait embelli la journée, l’air était encore frais. Elle tenait bien fermé contre sa gorge le col de fourrure de son manteau d’hiver. Florane était la fille d’un diplomate français décédé au cours de l’hiver dernier. Après un séjour de trois ans en Bavière. Elle vivait à Montréal depuis deux ans. Elle s’y plaisait mieux, et il y faisait moins froid qu’à Québec. Elle trouvait aussi la ville plus moderne et plus vivante. Elle ne venait pas souvent dans le parc, elle était généralement occupée dans l’institut où elle travaillait le plus souvent.

 Autoroute du Nord
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Autoroute du Nord, nuit de samedi à dimanche, 2 heures du matin, la chaussée est luisante, la pluie n’arrête pas de tomber, depuis des jours et des jours. Échangeur de Bapaume, les lumières de la cité toute proche se mêlent aux lumières bleues des gyrophares des ambulances et des voitures de gendarmerie. Les clignotants jaunes du Samu, et de puissants projecteurs éclairent une zone d’activité intense. De la fumée, des cris, des ordres jetés, des silhouettes fluorescentes s’agitent dans toutes les directions. Une très forte odeur d’essence s’est répandue, tout se déroule au milieu du bruit infernal des groupes électrogènes et des compresseurs. De l’autre coté du muret central les bolides ralentissent à peine sous l’œil préoccupé des gendarmes trempés.

            La Massane
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Les premières gouttes de l’averse s’écrasaient bruyamment sur les dalles de pierre. Lucile venait de refermer la porte du garage de l’hôtel, il était temps, à peine avait-elle reçu quelques gouttes. Elle adossa son vélo contre le mur et plaça avec soin l’antivol d’acier. Elle remonta directement à sa chambre par l’escalier de service. Il faut dire que l’équipement cycliste bariolé de réclames et de couleurs vives n’est pas tellement seyant pour les femmes habituées naturellement aux arcanes de l’élégance. Elle ouvrit tout de suite la fenêtre, et contempla avec ravissement l’orage au plus fort de sa fureur. Le tonnerre était d’une violence inouïe, et l’écho renvoyé par la montagne toute proche amplifiait les grondements incessants. 

Les Travers de Ms Philipson
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Le trajet entre Paris et Londres en Eurostar n’allait pas être suffisamment long pour calmer l’excitation de Magali. Elle regarda sa montre; dans 5 minutes ce sera le tunnel, et moins d’une heure pour arriver gare de Waterloo. Quinze jours auparavant, Magali avait quitté le lycée un peu plus tôt, pour absence de son professeur d’Anglais. C’est ce qui explique qu’elle ait elle-même ramassé le courrier dans l’entrée de l’immeuble cossu, rue de Turbigo, tout près de la place de la République. Au milieu d’un amoncellement de publicités, journaux, lettres etc, l’une d’entre elles lui était personnellement adressée. C’était une enveloppe anonyme, sans flamme ni cachet, ni marques reconnaissables. Elle attendit d’être à l’intérieur de l’appartement qui surplombait magnifiquement la capitale, pour ouvrir le pli qui, a priori, ne lui disait rien de bon. Elle monta directement dans sa chambre, d’où l’on découvrait toute la partie nord de Paris, jusqu’à la butte Montmartre, à demi visible dans la brume de printemps en cette fin d’après midi.

         La brosse à Dents
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Ce n’était pourtant pas un jour exceptionnel. Un samedi comme un autre, sauf que c’était l’été, que la chaleur était déjà accablante, et que je me sentais légère, en pleine forme et heureuse. Pourquoi ? Je ne saurais le dire, j’étais bien c’est tout. Madrid était une fournaise, mais cela faisait maintenant pas mal de temps que je m’y étais installée, et franchement, je ne regrettais rien. Ma fille était avec moi, et le samedi matin nous avions pris l’habitude de faire nos courses pour la semaine. Il était encore tôt, mais nous n’étions pas pressées, bien qu’étant attendues pour déjeuner à la finca où nous avions nos amis. Nos amis et nos habitudes, c’est là que nous avons logé avant de trouver cette petite villa du nord de Madrid, avec sa petite piscine et ses pins parasols. Cette villa, nous l’avons louée toute meublée. C'est-à-dire avec le minimum, ce qui lui donnait un genre particulièrement spartiate avec ses murs blancs et ses meubles foncés. On s’y était attachées, et pour nous, c’était le paradis. Nous n’avions plus que quelques achats de peu d’importance, mais je devais passer absolument à la pharmacie pour acheter de l’huile solaire.

 Résistance et Trahison
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Le 19 mai 1940 restera à jamais le jour le plus sombre de l’histoire d’Amiens. Tandis que le général de Gaulle, à la tête d’une division blindée, contient l’avancée des troupes allemandes dans le Vimeu et la région d’Abbeville, l’armée nazie bombarde la ville préfecture de la Somme. Tout le centre-ville et les gares de chemin de fer sont rasés. L’ancien secrétaire général de la Somme, Jean Moulin, apprend la nouvelle de la destruction de la ville, et revoit dans ses récents souvenirs la belle cité telle qu’il l’a connue, la préfecture d’Amiens et son propre bureau où il a travaillé au service de l’État. Il n’accepte pas que tout cela soit souillé par la présence ennemie. Amiens s’enfonce dans quatre années de souffrance et de terreur. La communauté amiénoise se divise. Certains acceptent la fatalité. D’autres la refusent et résistent. Et d’autres encore se mettent du côté des plus forts. Jean-Marc Laurent n’a que 16 ans en 1942 lorsqu’il entre dans le réseau “Centurie”. Simple cheminot, il intègre les FTP, unités combattantes clandestines. Il participe à de nombreuses opérations contre l’armée allemande.

  La Chapelle St Domice
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Depuis que Karen avait disparu, Adrianne vivait l'enfer. Elles étaient amies de longue date. Ce qui semblait être pour les autres une camaraderie d'adolescentes était en réalité un grand amour partagé. Karen et Adrianne poursuivaient avec brio leurs études de médecine. L'une serait Sage femme, et l'autre voulait être gynéco. Elles n'en étaient pas encore là, elles avaient encore quelques années à travailler comme des esclaves pour espérer arriver à quelque chose. Karen et Adrianne étaient des filles sans histoire. Discrètes, inséparables, Elles étaient admises et aimées par les étudiants de leur université. Elles étaient lesbiennes disaient quelques-uns, elles étaient amoureuses disaient les autres. Certains, les plus proches, disaient qu'elles s'aimaient passionnément. Toutes deux très jolies, leur sourire n'avait d'égal que le pétillement de leurs prunelles. Elles étaient gaies (joyeuses) elles aimaient la vie, elles aimaient le monde, les fleurs les animaux, elles étaient surtout le reflet du bonheur total. Mais tout cela, c'était avant. Avant ce terrible accident qui emporta en quelques secondes la vie de Karen. . .

              Aneseau
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Tout à côté du lieu dit « La Pierre aux Fées » à quelques pas du vieux château, à la lisière du grand bois qui bordait jadis le village de Folleville, elle vivait dans une pauvre chaumière. « La Vieille Dame » ! C’est ainsi qu’on l’appelait aux alentours, vivait en recluse, et ne sortait que le soir venu. On la craignait. On l’évitait .Elle possédait, dit-on, des pouvoirs démoniaques : « Elle jette des sorts, elle mène les loups les nuits de pleine lune …» C’est ce que l’on chuchotait, à l’abri des regards de peur d’être entendu de La Vieille Dame. Ou peut-être même des adeptes de ses remèdes ou de ses pratiques. En effet, on lui prêtait également bien d’autres pouvoirs, elle n’avait pas son pareil pour combattre la fièvre. De bon matin elle vous faisait marcher dans l’herbe d’un pré couvert de rosée, cueillir par-ci, quelques poignées de feuilles de plantain, les jetant par-là, derrière, sans vous retourner. La pratique était efficace, autant que celle qui consistait à guérir les maux de ventre en prenant à jeun une infusion de la deuxième pelure du sureau qu’elle avait cueilli à la nouvelle lune, en récitant une prière aux saints Côme et Damien.

     Destruction Massive
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Saddam est un homme qui doit être intelligent, et dangereux, Il a déclenché une guerre qu'il n'a pas su gagner, et s'en est pris plein les yeux. C'est maintenant un homme blessé, parce qu'il a perdu devant l'Occident et ça, il ne le pardonnera jamais. Il rumine sa vengeance et son esprit tordu imagine des milliers de scénarios tous plus terrifiants les uns que les autres. Il a beaucoup investi dans la fabrication des armes bactériologiques et chimiques, et les ateliers de fabrication de ces potions tragiques ont été vite reconstitués. Aujourd'hui il tient sa vengeance, il a convoqué ses fidèles pour leur faire part de son plan, leur demandant leur appui pour le mettre à exécution. En ressortant de son bureau, sur les trois "généraux" dans le secret, deux se sont suicidés, pour ne pas avoir à accomplir cette tâche, tant elle était terrifiante, irréversible et incontrôlée. Et le déroulement des opérations a commencé. L'arme absolue: Les Kurdes, et la compassion de l'occident pour les martyrs de l'Irak. Il fallait y penser.

  L'Infirmière d'Ambazac
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« Bonjour, excusez moi de vous déranger, je m’appelle Ghylaine, et je suis infirmière à Ambazac. » Laurence se retourna, et fut surprise de la vision qui s’offrait à elle. La jeune femme était assez jolie, la trentaine, brune et le visage assez fin. Elle était un peu plus grande, très mince, les cheveux mi-longs, coiffés « à la diable ». Le maquillage assez discret, un rouge à lèvres très rouge, les sourcils très noirs, les paupières ombrées. Un grain de beauté sur la lèvre supérieure gauche. Le premier examen était favorable. Ghylaine souriait, Laurence lui rendit son sourire. « Je suis Laurence, et je n’ai pas besoin de piqûres ! Que puis- je pour vous ? —Voilà, je vous ai aperçue au concert d’Aixe-sur-Vienne samedi soir. Je vous ai vue prendre des photos, j’en ai pris aussi, je vous propose que nous les regardions ensemble. » Le sourire ne l’avait pas quittée en prononçant ces mots. Laurence trouva l’idée excellente, quoique peut être un peu intéressée :

      Les Etoiles Eteintes
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Sarah restait dans le mausolée pour mieux méditer. Elle appréciait que le décor soit aussi sobre, que le lieu soit aussi calme, que la lumière soit diffuse, et la fraîcheur aussi agréable. Seul flottait dans l'air ce parfum de géraniums, mêlé à celui de la canne à sucre, omniprésent à Saint-Benoît de La Réunion. Elle tira la porte derrière elle. Coupée du monde extérieur, elle serait mieux pour prier et se recueillir sur la tombe de sa belle amie. Elle aimait ce mur de marbre brut, ce dépouillement de tout objet de culte: pas de croix, pas de Christ, pas de Maries. Dehors, les géraniums en fleur ceinturaient l'édifice, mais dedans, aucune fleur, que la pierre, le marbre, la lumière. Une plaque de bronze sculptée à l'effigie d'une jeune femme aux longs cheveux épars, au visage fin comme l'avait Florane quand elle était arrivée dans sa vie. Pour que cet endroit soit tel qu'il est, Florane avait dû en définir tous les détails elle-même. Sarah pensait que le service des pompes funèbres pourrait peut-être lui donner quelques détails sur les derniers jours de Florane, et peut-être, qui sait, lui faire rencontrer les gens qu'elle connaissait, ou même qu'elle fréquentait ?

      L'Adjudant Moreau
gendarmerie-nationale

Roger Lheureux arriva au 4 rue de Seclin. Il était 9 h 15. L’ouverture de la centrale était à huit heures. Quand il lança un « salut » à la ronde, aucun de ses collègues ne lui répondit. Roger n’était pas à proprement parler un bon copain, mais il était le numéro deux de la centrale syndicale départementale, et à ce titre, il était plus craint que respecté. Ce qui choquait ses collègues de travail, c’est qu’il arrivait régulièrement en retard, et généralement dans un état de violence éthylique mal dissimulé. Chaque matin, Roger faisait une halte au « Café de la Savonnerie » situé juste en face de l’usine qui produisait des millions de tonnes de lessive en poudre. Dans ce café, nul besoin de passer sa commande, le patron vous sert d’emblée un café accompagné d’une « bistouille ». La bistouille étant ce petit verre de genièvre qu’il fallait boire en premier lieu et vider le second verre dans le café. Souvent on remettait ça, et après la deuxième ou troisième bistouille, on allait travailler. À cette époque, les accidents du travail étaient nombreux, et bien sûr, l’employeur était toujours l’unique responsable.

        Un Douze Avril
Joëlle et moi

Un 12 avril …. Oui c’était un 12 avril, je m’en souviens très bien, c’était le jour d’anniversaire de ma maman, et j’étais allée déposer une potée de tulipes sur sa tombe, des tulipes perroquets rouges et blanches, ses préférées. C’était la fin de l’après midi, à l’heure où le soleil, bas sur l’horizon, allonge les ombres, et colore la nature du vert jaune des feuilles naissantes, du bleu de ciel et de blanc nuages. Il faisait beau, il faisait doux. Sur l’autoroute il y avait peu de circulation ou du moins elle était fluide. Pas d’excès de vitesse, j’étais en balade. Je rentrais chez moi, il me restait tout juste une demi-heure de trajet. J’arrivai à proximité d’une aire de repos : « Aire de Tilloloy Ouest » et machinalement je mis le clignotant, je ralentis dans la chicane et débouchai sur le grand parking. Je m’arrêtais souvent à cet endroit, d’abord parce que sur mon trajet habituel je n’ai pas tellement le choix, mais surtout pour le bois qui entoure ce parking, c’est vraiment très forêt, c’est superbe.

            Joyeuse Noelle
Joyeux Noelle

Pour moi, Noel est rarement joyeux. Ici, là où je vis, à Madrid, La Navidad se fête bien entendu, mais ce n'est pas le même Noel qu'en France. Les jouets pour les enfants sont offerts le jour de l'épi Fanny, La Navidad est surtout une fête religieuse, où la messe de minuit se paie l'intérêt général. Autre raison et pas des moindres, ma grande fille rejoint son père en France. Ainsi elle ne souffre pas d'un dépaysement total. Voir son père, c'est bien vite dit. C'est un homme orgueilleux, très occupé, pas du tout papa gâteau. Mais Axelle a le coeur sur la main et elle accepte avec le sourire l'accueil réservé de son papa. Heureusement, le papa s'est remarié, forcément, il avait besoin d'une esclave pour lui porter le café au lit. Cette esclave s'appelle Rachel. C'est une de mes amies, elle est très belle, nous nous aimons beaucoup, en secret bien sûr. Je crois qu'elle est plus jolie que moi, un peu plus jeune il est vrai, Nous nous voyons rarement maintenant que je suis expatriée. Elle s'occupe très bien de ma fille, elle l'adore, elle n'a pas d'enfant, tous ses efforts n'ont jamais abouti. Rachel est pharmacienne. Son officine n'était pas très loin de mon immeuble, ainsi je ne rechignais jamais à aller me chercher les rares médicaments que je prenais. J'ai toujours fait beaucoup de sport. Du vélo, de la piscine. C'est ce qui me vaut sans doute d'être encore présentable aux 44 ans que je viens de fêter il y a deux jours. Rachel aussi fait du sport, mais en vraie compiégnoise, elle a choisi de faire du cheval.

         Le Petit Laurent
Laurent (4)

Entre son bonnet bleu et son masque de chirurgien, on ne voyait que ses yeux noirs. Pourtant, quand il tournait son regard sombre vers l’une ou l’autre d’entre nous, on comprenait instantanément ses désirs, sans qu’il eût prononcé la moindre parole. J’étais devant lui, et j’étais l’assistante de l’autre chirurgien qui lui faisait face. L’entente des deux hommes était remarquable, c’était le meilleur « bloc » de tout l’hôpital. Je passais les instruments qu’on me réclamait, tout en essayant de ne pas regarder le champ opératoire, je ne m’y habituerai jamais. Pourtant, délimité par le drap bleu ciel et les linges blancs tâchés de rouge, l’ouverture ne ressemblait à rien que l’on puisse identifier, sans être du métier. Moi je ne l’étais pas, je passais les outils, comme une autre fille aurait pu le faire aussi bien. Et pour ne pas regarder l’opération en direct, je portais les yeux sur le chirurgien aux yeux noirs, ou sur son assistante qui me faisait face, dont les yeux étaient d’un bleu sauvage. De l’assistante on ne voyait que la proéminence de son imposante poitrine.

 Le Chaos de Targasonne
Le Chaos de Targasone

Sur les hauteurs des Pyrénées-Orientales, la Cerdagne est un vaste plateau ensoleillé, un encorbellement entre le mont du Carlit, et celui de Puigmal, tous deux culminants aux alentours de 3000 mètres. La Cerdagne est à une altitude de 1600 mètres en moyenne, et elle a la particularité d’être une région fertile, bien que de haute montagne, puisque l’on y récolte des céréales, du blé principalement. On y vient de Perpignan par la route qui monte à Font Romeu, ou par le côté Espagnol en traversant l’Andorre. Dans la partie occidentale de la Cerdagne, on trouve un lieu particulièrement mythique, « Le Chaos de Targasonne » Plutôt qu’un lieu, on pourrait dire un pays, voire une région, puisqu’il s’étend sur 50km. Le Chaos est un amoncellement de roches granitiques -par exemple- dont l’origine et la formation ne paraissent pas évidentes. Curieusement, on trouve aussi ce genre de relief dans la forêt de Fontainebleau ou dans la Lozère.

        Le Coupe Chou
Le coupe chou-1

S’il existe un lieu magique à Paris, c’est bien la gare de Lyon. Pas cette gare TGV souterrainement austère et sans âme, mais la gare de surface, la vraie, celle qui fait vibrer le cœur dès que l’on aperçoit l’horloge, du boulevard. J’ai toujours aimé les trains, depuis ma plus tendre enfance quand, avec mes parents et ma sœur, nous partions à la mer. La Gare de Lyon à l’heure des grands départs est habitée d’un esprit particulier. Peut-être est-ce simplement la concentration des voyageurs en attente. C’est cette odeur particulière, faite d’humanité, d’ozone et de poussière. Ce grand espace face aux quais, animé de ses panneaux affichant les horaires, et les milliers d’yeux, levés vers les chiffres verts qu’ils ne semblent pas comprendre. Et puis ce sont tous ces jeunes avec sacs au dos, assis sur les murets des escaliers descendant au sous-sol. Ils fument, ils mangent d’énormes sandwiches, vident quantité de boîtes de bière ou de Coca. Ils dorment ou s’embrassent, l’amour des fois, se fout du décor. En haut de l’escalier, ce superbe restaurant : « Le Train Bleu » qui fit briller de ses ors, la redoutable Nikita, alias Anne Parillaud.

            Jolie Luna
Lena Gercke

Sur les pavés de la place St Jacques, Rachel avait beaucoup de difficulté à marcher avec ses talons aiguilles, et se casser un talon maintenant, ne serait pas pour lui remonter le moral ! Rien n’allait vraiment bien depuis une semaine. Elle avait du mal à effacer de son esprit ce qui s’était passé, et ce soir-là, elle n’avait pas envie de rentrer chez elle, et de se retrouver seule avec ses idées noires. Sa petite fille était pour le week-end chez sa grand-mère. Elle entra dans le café le plus proche. Le Coq d’Or l’un des plus joliment décorés de la ville. Elle n’était pas une habituée des lieux, d’ailleurs elle entrait rarement dans un café. Il y avait du monde, de la musique jazzy, de la fumée, comme dans tous ces endroits-là, en fin d’après-midi. Elle s’approcha difficilement du bar et demanda un Tonic. Le barman la servit, puis, son verre à la main, elle chercha dans la salle un endroit libre pour se poser.

            La Mante
Les DrusCouleur

Je la reconduisis à la porte. Les quelques pas qu’elle fit devant moi suffirent à provoquer mes plus secrètes fêlures. Sa démarche, ses bottines à hauts talons, son jean élimé aux fesses, ses fesses rondes perchées sur des jambes interminables, ce perfecto, qui était choisi sans doute uniquement pour mettre ses fesses en valeur, et cette chevelure de jais, coupée court, très bas sur la nuque, avec cette mèche savamment rebelle qu’elle remettait en place d’un mouvement de tête des plus étudié. Deux anneaux dorés apparaissaient alternativement au rythme de son pas décidé…..Elle s’arrêta sur le palier, se retourna… Gros plan sur une poitrine agressive, moulée dans un pull col roulé blanc. Visage bronzé, ses yeux noirs lancèrent un éclair, histoire d’humaniser son sourire crispé. Elle commença à descendre les degrés, je fermai la porte appuyai mon front sur le chambranle, et je restai ainsi les yeux fermés, imprégnée de ces images qui repassaient en boucle, dans mon souvenir immédiat.

      Les Jeux de St Elme
Les Jeux de St Elme

Juin 1999 ! décès de mon père, puis en octobre, celui de ma mère. Après 63 années de mariage, la pauvre femme n'a sans doute plus estimé utile de continuer à vivre. Ils ont ainsi rejoint au paradis, leur fille décédée neuf ans plus tôt, à l'âge de quarante-huit ans. Il avait quatre-vingt-sept ans, elle en avait quatre-vingt-deux. Ils ont donc élevé trois enfants : deux filles et le garçon que je suis. Quelques mois plus tard, il fallut se décider à tirer un trait sur la matérialité de leurs existences : Vendre la maison où nous avons grandi, et la débarrasser de tous les meubles et objets leur ayant appartenu. Voir la maison de notre enfance complètement vide fut pour ma sœur et moi, une douloureuse épreuve. Au moment de charger les derniers cartons, ma sœur me désigna celui qui était resté un peu à l'écart.

     Les Jours de Liesse
Les Jours de Liesse

Il faisait un temps superbe ce jour-là. Dans la petite bourgade de Saint André, cette petite ville touristique de Haute-Provence près du lac du Castillon, la saison touristique était à peine commencée. Pourtant, il y avait pas mal de monde en ville, et déjà quelques nageurs courageux dans les eaux glacées. Pour certains c’était déjà les vacances, mais pour d’autres, le travail était encore d’actualité. Il faisait déjà chaud. Pourtant, la ville est à neuf cents mètres d’altitude. Le soleil comme toujours dans cette région était de la partie. Derrière les baies vitrées des bureaux, les employés commençaient à souffrir de la chaleur. Heureusement, la matinée de travail touchait à sa fin. Guillaume avait l’impression que ses clients étaient convaincus, et qu’il remporterait ce marché difficile. Il était assez fier de cette présentation. Bien sûr, il n’était pas seul à avoir réussi à établir ce climat de confiance, qu’il sentait maintenant installé chez ses interlocuteurs.

   Les Tricots de Marguie
Les Tricots de Marguie

Marguerite Dupain était une femme au grand cœur. Pourtant on ne peut pas dire qu’elle avait été gâtée par la vie. Née de parents miséreux de la région de Douai, à Goeulzin plus exactement, elle avait, toute sa jeunesse, traîné ses galoches le long du canal, trouvant dans cette campagne ouvrière tous les motifs qui pouvaient alimenter ses rêves. Elle s’imaginait par exemple qu’un intrépide marinier l’emporterait un jour sur sa péniche, et l’emmènerait ainsi de l’autre côté du monde, là où il n’y aurait que joies et que richesses. Son père, fut l’un des derniers ouvrier de la dernière brasserie du village, et comme bien souvent, il était le meilleur client de son patron.

   Le Miracle Impossible
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C'est ainsi que Jésus parvint dans une ville de Samarie appelée Sychar, non loin de la terre donnée par Jacob à son fils Joseph, là même où se trouve le puits de Jacob. Fatigué du chemin, Jésus était assis tout simplement au bord du puits. C'était environ la sixième heure.Arrive une femme de Samarie pour puiser de l'eau. Jésus lui dit: "Donne-moi à boire." Ses disciples, en effet, étaient allés à la ville pour acheter de quoi manger.Mais cette femme, cette Samaritaine lui dit: "Comment? Toi, un Juif, tu me demandes à boire à moi, une femme samaritaine!" Les Juifs, en effet, ne veulent rien avoir de commun avec les Samaritains.Jésus lui répondit: "Si tu connaissais le don de Dieu et qui est celui qui te dit: "Donne-moi à boire", c'est toi qui aurais demandé et il t'aurait donné de l'eau vive."La femme lui dit: "Seigneur, tu n'as même pas un seau et le puits est profond; d'où la tiens-tu donc cette eau vive?

          Noire d'Ecume
Noire d'écume

Voyager est sûrement ce qui me motive le plus. Lorsque j'ai choisi de faire ce métier, je n'y avais pas spécialement songé, ou alors, ce n'était pas l'élément fondamental de mon choix. Et pourtant, c'est ce qui m'apporte le maximum de joies. J'adore voyager. Me rendre au pied levé dans telle ou telle ville, dans ce pays ou un autre, est pour moi le plus grand des plaisirs. Ce n'était pas a priori évident. Il faut apprendre à voyager, comme il faut acquérir l'envie de voyager. Tout ce que l'on va rencontrer sera un étonnement. Je ne dis pas un enchantement, puisque sur notre terre, il se trouve malheureusement quantité d'endroits d’où l'on a plus envie de fuir plutôt que de séjourner. Quand j'ai su que je devais me rendre à Cadix (Cadiz en espagnol), j'ai ressenti ce petit pincement au cœur, signe de plaisir intense. Ce n'était pourtant pas la première fois. Je m'y étais déjà rendue, en coup de vent, une seule journée, et je m'étais juré d'y revenir. Cette fois, j'étais décidée à rester le temps qu'il faudrait pour la visiter, et pour en ressentir l’ambiance et le passé.

              Soledad
Roissy

Elle est moche cette voiture, avec cette inscription comme un tatouage ridicule à l’arrière « Taxis Lefèbvre » « Longues distances » « Roissy-Compiègne » C’était une Espace Renault, ce gros machin carré qui, à peine parti était déjà arrêté deux cents mètres plus loin au premier feu rouge. C’était comme une hésitation, cette voiture arrêtée. C’était la dernière chance, soit d’en descendre, soit de courir pour la rattraper. Mais Jane ne bougea pas, et personne n’en descendit. Les yeux pleins de larmes, elle ne distinguait plus nettement le véhicule. Elle le vit repartir, tourner au coin de la rue et disparaître. Axelle lui serrait la main comme pour dire, « ne pleure pas je suis là ». Ce n’était pas la première fois que sa « tata » partait en voyage. Mais Jane bien sûr ne lui avait pas dit que ce départ était le dernier, et qu’il n’y aurait pas de retour. Ainsi va la vie des gens qui assument leurs choix, la vie est unique, il n’est pas toujours écrit qu’une rencontre change forcément la vie, la vie se vit en suivant le chemin décidé. La vie ne change pas toujours de vie.

              Manon
tn Manon (101)

Quand la boîte aux lettres fut ouverte, les trois quarts de son contenu se répandirent sur le sol. Manon se baissa, difficilement, car les talons et la jupe serrée ne sont pas spécialement faits pour cet exercice. Elle ramassa un à un tous les journaux de pub de télé, toutes les propositions des mages de la région, toutes ces enveloppes pleines de factures, et d’autres feuillets divers. Au beau milieu de ce fatras, un document attira son attention. Elle le plaça sur le haut de la pile que sa main contenait avec difficulté. Puis elle referma la boîte, se dirigea vers l’ascenseur, après avoir pianoté le digicode. Elle retrouva avec délice l’appartement illuminé de soleil, avec son parquet brillant, ses jolis rideaux de voile de lin, ses fleurs et ses tableaux, sa bonne odeur de parfums et de cire, cette odeur si caractéristique des alcôves féminines. Manon posa le tout sur la table du salon, et partit dans la salle de bain au cas où quelque réparation serait nécessaire. Il fallait qu’elle se change pour aller faire quelques courses au Champion tout proche. Ceci étant fait, elle jeta un coup d’œil sur le document qu’elle avait ramassé.

            Fait Divers
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A 300km /heure, le Thalys filait vers Bruxelles en longeant l’autoroute du Nord. Dans le compartiment de première classe, confortablement installé, bercé par le ronronnement régulier du TGV, Albert se laissait aller à sommeiller. Il adorait ce train, où le confort était parfait, le seul endroit où il savait pouvoir réellement se reposer. Il faut dire que sa vie était quelque peu agitée, et le stress prenait souvent le relais de la volonté et de la détermination. Il était installé sur le fauteuil à coté de la vitre qui donnait coté autoroute. Il savait que les voitures qu’il voyait, roulaient au moins à 150km/h. Pourtant, il avait l’impression qu’elles allaient au ralenti. Il remarqua une BMW qui sur la file de gauche doublait toutes les voitures avec une aisance étonnante. Malgré tout il la perdit de vue très rapidement. Sur les fauteuils de l’autre coté de l’allée, il y avait deux jeunes femmes, qui se regardaient en se parlant à voix basse, quelques fois un sourire illuminait les visages.

 

Les Dryades

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J'ai déjà par mes nouvelles, abordé beaucoup de sujets. Peut être font-ils partie de "tout le reste". Je ne suis pas une fervente admiratrice de Simone de Beauvoir, (sauf quand le rôle est tenu par la divine Anna Mouglalis) et je ne me reconnais pas dans les féministes de tous bords. Pourtant, s'il y a un trait de ma personnalité qui surclasse tous les autres, c'est bien mon amour de la femme. Je suis lesbienne donc, puisque c'est l'étiquette que l'on colle aux tribades modernes, mais là encore, ce n'est pas vraiment ça, puisque je suis mariée, et j'ai une fille d'un premier mariage. Je tiens à vivre ma vie comme tout le monde, le plus simplement possible. J'allais dire le plus "normalement" possible, mais je sais que cela aurait fait bondir certaines âmes guerrières. Rassurez-vous, je ne vise personne. Une vie de famille, c'est ce que j'ai toujours souhaité, en faisant la part de ma vie et de mon autre vie. Mon alter ego est une entité qui existe, qui influe bien évidemment sur mon autre vie. J'espère simplement que personne autour de moi, n'en souffre. Si quelqu'un ignore ma bisexualité, c'est que ça ne l'intéresse pas, car je ne dissimule rien, je vis comme ça vient. Je vis au grand jour, et j'aime au grand jour. Je n'ai aucune arrière-pensée, aucune envie de dissimulation. "Je roule plein phares". Ma devise pourrait être le titre de ce blog, "O me quieres O me dejas. Ce qui veut dire en clair, "Ou tu m'aimes ou tu me laisses". C'est d'autant plus facile à comprendre que je vis en Espagne, banlieue de Madrid près de l'aéroport. Je suis en Espagne depuis 6 ans bientôt. Je m'y suis installée pour raison professionnelle, quand l'envie m'est venue de faire "autre chose, autrement". Ce n'est pas pour raconter ma vie, mais plutôt pour raconter mon histoire, ce qui bien sûr, est différent. Je ne suis pas une pro des blogs. Il y a encore quelques mois, j'ignorais tout de cette façon de s'exprimer. J'avais vu bien sûr les merveilles réalisées par ma belle amie Ana, et sans ce stupide accident qui m'a clouée durant quelques semaines, je ne me serais jamais lancée dans cet exercice. 

 

Chapitre 1

Les Demoiselles de St Ladre

 

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Samedi 15 décembre 2007 La petite route était noire et luisante au milieu de toute cette neige grisâtre. À peine dégagé, le ruban d’asphalte était étroit, et les voitures se croisaient avec difficultés. Il avait neigé fortement depuis le début de ce mois de décembre. Déjà, mi-novembre, quelques flocons avaient blanchi la campagne. Et depuis, une neige très fine, humide et pénétrante, n’arrêtait pas de tomber, virevoltante au moindre souffle de vent. Ce n’était pas suffisant pour recouvrir la route abondamment salée, mais assez pour effacer en une journée toutes les traces de la veille. La circulation n’était pas très intense, il semblait que l’activité, comme la nature, s’était endormie. Il faisait froid et humide, d’autres précipitations importantes, peut-être neigeuses, étaient attendues. Le ciel était gris bien sûr, et la nuit ne tarderait pas à accabler le paysage d’un sombre avenir. Les arbres des taillis tendaient désespérément leurs squelettes vers de gros nuages terrifiants. Depuis les quinze jours que la neige était omniprésente, la plupart des branches de ces arbres nus avaient perdu leur chargement de poudre blanche. Et pour d’autres, il suffisait d’un souffle de vent pour qu’elles se dévêtissent, dans un chuintement à peine perceptible. La petite route reliait la départementale à la petite ville de Cagny. C’était un raccourci bien pratique qui permettait de rejoindre le parking de la gare de Longueau. À quelques centaines de mètres de la station, la route était surplombée par cet immense viaduc qui enjambait la vallée marécageuse. Ce que l’on appelait la rocade, mais en réalité c’était l’autoroute qui contournait la ville par le sud en surplombant la vallée. Le flot des véhicules épargnait ainsi le centre-ville qui, à grands frais, avait été tristement abandonné aux piétons. Parallèlement à la route, sur un remblai de quelques mètres, la ligne de chemin de fer émergeait tout juste, elle aussi, de la couche de neige. On ne distinguait que les rails, les traverses n’étaient plus visibles qu’à de rares endroits. Comme la petite route, les voies s’engouffraient sous le viaduc dans la direction de Paris. De l’autre côté des voies, la falaise de craie du plateau picard ajoutait sa grisaille au décor ambiant. En face, dans la vallée, le marais. Cette immense étendue d’étangs constitue le lit de la rivière qui coule sa tranquillité dans la réserve Saint-Ladre, avant de se mêler à la Somme à Camon, entre Longueau et Amiens. 

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LI-Les Doutes
 

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Elle marche déjà sur la pointe des pieds
de son absence.

Alain Borne 

               
                                           Quand la jolie Pandore ouvrit la boîte mystérieuse, elle libéra tous les maux de l’humanité : La vieillesse, la maladie, la guerre, la famine, la misère, la folie, le vice, la tromperie, la passion, ainsi que l’espérance. Elle se rendit compte de son erreur trop tard, et voulut refermer le couvercle. Seule l’espérance, plus lente à réagir y resta enfermée.
Et dans ce deuxième semestre 2001, c’est bien de l’espérance dont j’aurais eu besoin. J’aurais espéré avoir des nouvelles de Marie-Noëlle. Je m’étais faite à l’idée qu’elle était avec quelqu’un, mais pourquoi m’imposer ce silence inutile et destructeur ? J’étais sûre qu’elle ne m’avait pas pardonné Lorena. C’était la femme de trop, celle dont elle avait estimé qu’elle pouvait être sa rivale. Si elle pensait que j’aurais pu ne plus l’aimer, c’est qu’elle ne m’aimait plus elle-même. L’espérance se recroquevilla un peu plus au fond de la boîte quand Kiss vint m’apprendre qu’elle changeait d’employeur, et qu’elle partait pour Milan. Je m’y étais préparée, forcément, mais ce fut un désespoir total. Au moment où, professionnellement j’étais au faîte de ma réussite, j’étais la plus malheureuse des femmes.
Je fis appel à Patricia. Elle seule pouvait faire quelque chose pour moi. Je ne lui demandai rien d’autres que d’essuyer mes larmes, pour que je puisse tirer un trait sur tous ces malheurs, qui, à la réflexion n’en étaient pas vraiment. Marie-No m’avait quittée? Ça faisait déjà longtemps, et j’avais, depuis aimé des hommes et des femmes. Kiss était partie ? Je le savais, c’était écrit, une fille de 18 ans plus jeune, d’une telle beauté, il m’était impossible de la mettre en cage. C’est dans ce sens que Patricia voulut transformer mes sentiments, et elle usa de tous ses moyens pour me redonner goût à la vie. En me redonnant le goût de ses seins, une fois de plus elle me remit les idées en place. La cure dura sûrement plus longtemps que nécessaire, mais je n’allais pas m’en plaindre. Petit à petit, je compris que je ne reverrai plus Marie-No, et qu’il fallait que je souhaite à la "Venezolana" la meilleure réussite. Et je gardai pour moi, et pour encore quelques temps, le corps sublime de Patricia.
Maud n’était pas très contente. Elle voulait avant tout ma guérison, alors elle attendit que l’envie me passe. Ce qui ne tarda pas, avec la séduction dont elle jouait à merveille, elle me ramena petit à petit entre ses seins, où je retrouvai mes marques préférées. Une fois de plus, je repris le cours de mes affaires. Je pouvais me permettre ce genre de fantaisie, « mes filles » étaient là pour assumer ce que je ne pouvais plus.
« Tu n’as pas trente huit ans, tu ne vas pas nous lâcher ? » Ainsi s’exprimait Linda, la plus jeune et la plus vieille de mes amies. Je n’avais pas encore 38 ans, mais je n’en étais pas loin. D’ici un mois ce serait homologué. Je me jetai à corps perdu dans la création d’une école de mannequins. Je me rendis compte, que je remettais le doigt dans le métier duquel je m’étais sauvée il y avait 25 ans. Dès que l’on prononce le nom d’école, on entre dans un système, une mélasse dont on ne sait plus sortir. Heureusement, je m’en rendis compte très vite. Et je changeai mon fusil d’épaule, j’allais créer une « agence de mannequins » supplémentaire. Et là, il n’y eut plus aucuns problèmes majeurs. Cette agence fournirait sa production à « La Lorena » et aussi à XXX .Je m’attelai donc à ce travail difficile et périlleux, que de créer quelque chose en France. Le moral me revenait peu à peu. J’avais revu Simone, J’étais retournée voir « Kellermann » Je me demandais parfois si je portais l’étiquette France II ou France III. Toujours est-il qu’elle était toujours aussi séduisante et aussi experte dans les arts amoureux. J’avais reçu quelque fois Linda chez moi, et la petite Laurie l’accompagna un week end de pur bonheur. Je ne sais pas pourquoi je dis la petite Laurie, parce que c’était une grande fille comme sa sœur, aussi agréable dans l’amour que son aînée. Je passai une année d’intense activité. Du côté « La Lorena », nous eûmes de bons résultats et des renouvellements de contrats assez facilement. Les nouveaux clients étaient plus difficiles à persuader, on sentait nettement un ralentissement d’activité. Il fallut apprendre la sobriété dans nos prestations. Claudine sut parfaitement se plier à ces nouvelles exigences. C’est l’époque où l’on commençait à sentir l’influence d’internet dans les marchés de la vente par correspondance. C’était un problème. On se promit de passer l’année suivante à étudier ce problème, et peut être à changer complètement notre façon de vendre.
 Axelle avait neuf ans maintenant, c’était une grande et belle fille, dont la ressemblance avec son père était troublante. On ne pouvait pas m’accuser d’avoir fait cette enfant là, avec le facteur. On passa l’été 2002 en Espagne, à Sitges, là où l’on trouvait sûrement la plus grande concentration d’homos au mètre carré. Il n’y avait pas que des « Têtus ». Il y avait beaucoup de filles aussi, et Maud vécut là bas les vacances les plus libertines de sa vie. Elle consomma à elle seule, plus d’une fille par jour. Et moi en plus. Puis on se dirigea à nouveau vers la fin d’année, vers mes 39 ans.
Un matin de soleil gelé ; C’était le 13 décembre 2002. Le vendredi 13. Nous étions en discussion avec Claudine, sur le plateau. La gamine de l’accueil vint me chercher.
« Il y a deux messieurs et une dame qui vous demandent.
—Qui sont-ils ?
—Je ne sais pas.
—Et tu es payée pour quoi ? Pour savoir ou ne pas savoir ? Demander le nom d’un visiteur, et le noter, c’est trop difficile pour toi ? Accompagne-les dans mon bureau. Tu sauras faire ça ? Dis leurs que j’arrive.
Puis, soudain, j’eus comme un frisson glacial. Je serrai le bras de Claudine et lui dis « Viens, viens avec moi. » Dans le bureau, debout devant le mur de verre, il y avait deux hommes et une femme qui regardaient l’animation du boulevard. Quand je refermai la porte, ils se retournèrent d’un même mouvement. Je vis tout d’abord Guillemette, toute de noir vêtue, et avec elle, le Colonel et le Général. Contrairement à mon habitude, je ne tombai pas dans les pommes. Je me cramponnai au bras de Claudine, et je fixai Guillemette qui pleurait en silence. Le soleil, au travers de la vitre, illuminait ses cheveux blonds. Sa ressemblance avec Marie-No me fit l’effet d’une flèche en plein cœur. Le colonel se précipita avant que mes ongles ne lacèrent le bras de Claudine.
« Assied toi eve anne. Sois courageuse. . . .
Le Capitaine Duval à trouvé la mort en service… Nous lui rendrons les honneurs qu’il mérite.
Le Général est venu en ami, partager ta douleur et celle de sa maman.
Conduis-toi en officier. Comme tu as toujours su le faire. 
Je ne pleurai pas. Où aurais-je bien pu trouver des larmes ? J’étais simplement pétrifiée. Je me sentais rigide, je ressentais des douleurs violentes dans les mâchoires, tétanisées pour ne pas hurler. Les officiers eurent la patience d’attendre que me revienne un peu de vie. Claudine pleurait dans les bras de son mari. Je vis Linda caresser le visage et les cheveux de Guillemette. Le Général vint vers moi, et me reçut contre sa poitrine, ce qui, sans doute m’empêcha de tomber. Je sais que ce n’était pas une attitude protocolaire, mais je mesurai sans pouvoir réagir, la bonté de cet homme, et l’affection qu’il avait pour moi. Je réussis à reprendre un peu de dignité.
« Pardonnez-moi Général.
—Elle est tombée dans une embuscade avec deux de ses hommes. C’était Mercredi ; Il y avait une émeute à Nouméa. Elle a reçu l’ordre de se rendre sur place pour évaluer la situation, ils ont tiré à la rocket. Elle n’a eu aucune chance. L’appareil s’est écrasé. J’imaginai la scène et je baissai la tête. Il y avait une erreur flagrante de commandement. Je regardai le général dans les yeux, avec étonnement. Il comprit ma pensée.
—Oui, on en reparlera » Je me dirigeai vers Guillemette. Elle était courageuse, elle avait sans doute épuisé ses larmes, elle aussi.
« Le corps sera rapatrié mardi. Les honneurs militaires lui seront rendus Jeudi, à Villacoublay et l’inhumation se fera Samedi 21 à Dijon-Chenôve, après une messe à la cathédrale Saint Bénigne. Le jour de mon anniversaire. C’est une date maudite. Lorena renvoya tous les gens, et ferma l’agence. Il ne resta que mes proches, celles qui connaissaient Marie-Noëlle et notre histoire. Lorena prévint Maud, Rosine prévint Jocelyne. Les deux officiers repartirent, et Guillemette resta avec nous. Lorena proposa de nous reconduire à Compiègne.
« En attendant Puce, fais nous monter du café, s'il te plait. Rosine prendra ta voiture, et on te ramène à Compiègne, on reviendra par le train. En attendant repose-toi. Nous savons toutes que tu ne pourras plus jamais aimer autant que tu as aimé Marie-No. .......
Elle connaissait les risques qu’elle prenait, et s’il t’a semblé qu’elle se détachait de toi, c’était pour que le chagrin soit moindre s’il lui arrivait malheur. C’était le secret qu’elle m’avait confié. Elle n’a jamais cessé un seul instant de t’aimer. Elle voulait que je t’aide à l’oublier, ce que je n’ai pas essayé de faire bien entendu. Elle n’a jamais pris ombrage de l’amour que tu nous donnais. Elle disait que tu étais une fontaine d’amour, et qu’il y en avait trop pour elle seule. Maintenant, il faut que tu penses à toi, il faut que tu vives. Tout ce que tu nous as donné, nous te le devons, et nous te rendrons heureuse. On n’essaiera pas de te faire oublier, on partagera simplement ton mal. Et tu dois vivre pour ta fille et pour nous, tes amies pour l’éternité. » La  gamine du bas arriva avec le plateau et le café. Lorena alla chercher son violon, et alla se placer tout au bout de la pièce, dans le dernier rayon de soleil. Elle se mit à jouer « La méditation de Thaïs » c’était une musique qui semblait avoir été crée pour le timbre de son violon. Elle excellait dans les aigus, sans user du vibrato. C’était une musique qui nous amenait la paix et le repos. Lorena était devenue l’animal Alpha de notre groupe. Elle était devenue la plus forte, après avoir été proche de la destruction. Elle nous démontrait que l’on pouvait venir à bout de tous les malheurs, si seulement on pouvait mettre sa main dans une autre. Cette musique nous collait à la peau : Thaïs était la courtisane dévouée à la déesse Vénus. C’était Marie-Noëlle, c’était moi, Lorena, nous toutes, qui aimions la féminité par-dessus tout. Je ne vis pas le temps passer. Je restais prostrée, essayant de mettre mes pensées, les unes au bout des autres. Lorena continuait son concert, et sa musique nous transportait près d’elle, là haut, tout près de Vénus. C’est parce qu’elle décida d’arrêter de jouer que je pus sortir de ma torpeur. Linda m’apporta mon manteau, et après les avoir toutes embrassées, nous sommes parties toutes les quatre. Pour reconduire guillemette au train. Et moi dans la voiture, j’avais dans les yeux, le cauchemar que j’avais fait à plusieurs reprises, de cet hélicoptère tournoyant dans une gerbe de feu. Son commandement l’avait envoyée à la mort. C’était une faute inexcusable. Dans nos exercices de combat, je répétais sans cesse à Marie-Noëlle, « Ne jamais arriver là où l’on t’attend. Ne jamais y aller seule. Sur le terrain, il n’y a pas d’action individuelle possible. Et dernier conseil, celui là m’appartenait en propre : toujours tirer en premier. Après on peut toujours se justifier parce qu’on est encore vivant. » Le commandement de Nouméa n’avait pas dû faire l’école de guerre. Ou peut être ne savait-il pas qu’une émeute est avant tout un guet apens ? Tous les CRS savent ça par cœur, depuis Mai 68 : On met le feu à une bagnole, et quand les flics arrivent, on les tire comme des lapins. Tout le monde sait ça ? Non, il reste quelques ignares qui ont un commandement et qui ne le savent pas. Celui là, je le tuerai ! Je retrouvais Maud sur mon lit, complètement lessivée. Elle avait le visage défait, elle avait en quelques heures pris Vingt ans. Patricia était là, elle rangeait sa serviette, elle avait dû pratiquer quelque chose, une piqûre, un anti dépresseur… Je me jetais dans ses bras et la serrai le plus fort que je pus. Patricia intervint :
« Laisse là respirer. Calme-toi. Donne-moi ton épaule. Et sans que j’ai pu réagir, elle m’avait injecté je ne sais quelle mixture. Cela me fit du bien, quelques instants plus tard, j’avais retrouvé ma lucidité. Odile vint nous embrasser.
« Reposez vous, je vous prépare le souper. Je fais le lit pour toi Lorena et pour toi Rosine. Vous repartirez demain. Demain vous ne travaillez pas, vous aurez plus de temps. Patricia intervint en s’adressant à Maud. Tu resteras avec eve anne. Tant que Marie-Noëlle sera dans votre cœur, elle restera vivante. Dites vous qu’elle est loin, qu’elle pense à vous, et qu’elle vous aime. La soupe d’Odile et les mots apaisants de Patricia nous apportèrent le réconfort dont nous avions besoin. Dehors, il commençait à neiger. Le lendemain, Puce appela au téléphone.
« Je viens d’avoir la visite d’Isabelle, la secrétaire du Colonel Dumas. Elle m’a apporté un uniforme pour toi, le Général souhaiterait que tu sois en uniforme pour les honneurs militaires. Si ça ne te dérange pas, je viens cet après midi pour te l’apporter et faire les retouches..
—Un uniforme ?
—Oui, un tailleur Bleu-marine avec un manteau et un bibi. Il y a aussi les galons. Elle conseille des bottines noires. A hauts talons. Elle me charge de t’embrasser, et te fait dire qu’elle sera avec toi à Villacoublay. C’est pour être au plus près d’elle, sinon, les civils seront à cent mètres.
—Ok j’ai compris. Je t’attends. Au N°34 Square Eugénie tu te souviens ?
—Non.
—Ce n’est pas grave. Sois prudente. » En réalité, les deux filles décidèrent de rester le week end avec moi. C’était sympa de leur part. Maud rentrerait chez elle le soir, elle ne pouvait pas abandonner totalement son homme, qui m’avait gentiment téléphoné pour me présenter ses condoléances. Elle reviendrait dans la journée.
Dans l’après midi, c’est Luigi qui vint pour m’embrasser. Il resta un bon moment avec nous. Et ce fut un moment agréable. Il savait plaire aux filles sans être la caricature habituelle de l’homo. Luigi était un beau mec, et il pouvait être heureux, il était avec trois femmes qui l’adoraient. Sa visite fut une diversion salutaire. Il en profita pour nous dire la satisfaction d’Armand de travailler avec nous. Nous étions aussi très contentes de lui. C’était un Luigi bis. Luigi sut nous parler de Marie-No sans tristesse. Il nous dit l’immense bonheur qu’il avait eu de pouvoir l’aimer, comme il nous avait aimées toutes les trois. Quand il en parlait, le bonheur éclairait son visage, et la tristesse n’était plus de mise. Il nous quitta en nous assurant qu’il serait à Dijon pour les obsèques.
Puce arriva dans le courant de l’après midi. On fit les essayages, et il n’y eut que très peu de retouches. Libérer un peu les pinces de la poitrine, et resserrer un peu celles de la taille. Sinon, le tailleur était de qualité, d’une coupe récente. Les filles furent impressionnées de me voir ainsi vêtue avec mes quatre barrettes sur chaque épaule. Et j’attendais la question. « C’est quoi un Commandant ?
—Dans le génie de l’air on appelle ça un chef de bataillon c'est-à-dire que dans une brigade il peut y avoir plusieurs bataillons d’environ cinq cents hommes, qui sont divisés en compagnies de Cent cinquante hommes, elles même divisées en sections, d’une cinquantaine de soldats. Il peut y avoir des commandants sans commandement, ceux qui travaillent dans les états-majors par exemple. J’ai eu à faire à un Commandant de cette espèce » Et je racontai mes problèmes avec le Commandant X à Versailles, et la rencontre qui s’en suivit avec le Général. J’étais venue au secours de Marie-Noëlle, qui, parce qu’elle était homosexuelle,
« ne méritait pas » d’être dans l’armée. Ce connard, ne savait pas qu’elle pouvait mourir pour son pays tout comme les autres. Si je n’avais pas réussi à le faire virer, je l’aurais tué tout comme je tuerai celui qui a envoyé Marie-No au casse pipe par bêtise. Les filles parurent intimidées de ma résolution.
« Ne vous faites pas de bile. Quand le moment sera venu, il faudra que ce criminel paie sa faute. Il a quand même fait tuer trois de ses hommes.» D’ailleurs, le Général et les Colonels, savent très bien que c’est à ça que je pense, et que j’en suis tout à fait capable.
—Tu serais capable de tuer cet homme de sang froid ?
—La question ne se pose pas..
—Ça ne te rendra pas Marie-No ?
—Je le sais, ça évitera qu’une autre Marie-No se fasse tuer pour rien. »
—Vu comme ça !
—Quand il y a des morts dans un conflit, c’est une guerre. Et les guerres il faut que quelqu’un les fasses. Jeudi, je mettrai cet uniforme, et je ne le mettrai pas seulement pour faire beau. » Mes paroles eurent pour effet de refroidir un peu l’atmosphère. Mais je n’en avais rien à cirer. Je savais deux choses. Un, que les militaires ne servaient à rien dans l’esprit de la majorité des gens, et deux, que la moitié au moins des officiers étaient des ânes bâtés. Dans la disposition d’esprit où je me trouvais, j’avais besoin de parler, et peut être aussi de justifier le choix que Marie-Noëlle avait fait d’épouser ce métier. Elles ne savaient pas non plus comment nous nous étions connues, engagées. Les pelotons que l’on avait fait, l’école d’officier, comment Marie-No fut agressée, durant un exercice. Elles ne savaient pas comment nous avions connu nos maris, militaires comme nous. Finalement, elles ne connaissaient rien de nous. eve anne aimait Marie-No, et Marie-No aimait eve anne. Et tout le reste n’était qu’une brume opaque dans l’esprit de ces demoiselles. Nous avions une histoire, c’était nos mille et une nuits. Et de cette histoire, tous ces garçons qui avaient servis sous nos ordres avec respect et discipline, pouvaient en témoigner. Et ce régiment entier qui avait mis la main à la poche pour offrir ce superbe vélo en cadeau de mariage à Marie-Noëlle? Et notre mariage, avec la prise d’armes de son régiment, et la musique militaire qui s’était déplacée sous les ordres du Général pour Marie-Noëlle; Ou encore cette fabuleuse attitude de Marie Noëlle, dans son fourreau blanc, et son décolleté vertigineux, quand la musique jouait « Auprès de ma blonde » ! Nous avons vécu plusieurs vies. Nous avons vécu des moments d’une telle intensité…Et Marie-Noëlle voulait encore vivre cette intensité. C’est pour ça qu’il n’est pas acceptable que toute une vie aussi riche, soit sacrifiée par un connard.
Coup de sonnette à l’entrée, c’était Jane. Elle arriva toute surprise de voir autant de monde dans l’appartement.
« C’est Maud qui m’a prévenue. Je viens te présenter mes condoléances. J’aimais beaucoup Marie-Noëlle. C’était une fille bien. Elle n’était pas comme toi.
—Si c’est pour me dire ça ?
—Ne te fâche pas, présente moi plutôt tes copines.
—Ce sont mes collègues de travail. Lorena, Rosine, et Josépha que tu connais.
—Enchantée. Tu as prévenu ton ex ?
—Non, je ne vois pas pourquoi je l’aurais fait.
—Pauvre Marie-No. C’est à cause de toi tout ça ! Ta puce est à côté ? Je vais l’embrasser. Salut ! »
« Excusez là, elle est comme ça. C'est la reine des connes. » Puce se prépara à repartir. Je la regardai poser le tailleur sur un cintre, je l’aimais bien. C’était une belle femme, modeste, élégante, adroite. Et très fidèle. Le temps n’avait aucune prise sur elle. Je savais qu’elle faisait beaucoup de sport pour garder sa superbe allure. Mais elle n’en parlait jamais. Elle était homo bien sur, mais elle ne draguait pas. Si on la draguait, elle ne disait jamais non. C’était la version de Simone. A vrai dire, j’ignorais tout de sa vie. On l’embrassa à tour de rôle, et on la regarda partir dans sa grosse Audi noire.
Le Jeudi matin, il faisait très froid. La cérémonie se déroula dans un des grands hangars de la base, qui avait été vidé de ses appareils pour la circonstance. J’avais rejoint les officiers à l’Etat Major. Je ne connaissais plus personne. Isabelle vint à ma rencontre, en uniforme elle aussi. Je remarquai qu’elle avait toujours le même grade. Puis elle me conduisit vers le Général, Le Colonel Dumas, et le Lieutenant Colonel Ducrocq, Henri, qui me serra dans ses bras. Les autres officiers me saluèrent, comme si j’étais un personnage important. Les cercueils étaient encore à bord de l’hélicoptère de transport de troupes qui était garé sur le tarmac. Il y avait de la neige fondante un peu partout. On monta dans les voitures, et on partit en file indienne vers le hangar. Il y avait à peine un km. Les détachements militaires étaient stationnés, alignés au carré. Je reconnus les armes du Génie de l’Air. Sur le côté, la musique de la deuxième région aérienne. On descendit des voitures. Et regroupés en face de la musique, on attendit. Le hangar était tellement vaste, qu’un mât avait pu être dressé. Le drapeau était en berne. Il n’y avait aucun souffle de vent pour le faire onduler.
La Musique entama « Les Dragons de Noailles », alors que les trois véhicules de commandement arrivaient chargés des cercueils. Ceux-ci furent déchargés, et alignés devant le drapeau. Et moi je fredonnais cette chanson que nous avions chantée cent fois pour les exercices de défilés:

 Ils ont traversé le Rhin ;
avec monsieur de Turenne.
Au son des fifres et tambourins,
ils ont traversé le Rhin.

 Lon lon la, laissez les passer,
Les Français reprennent la Lorraine.
Lon lon la, laissez les passer
ils ont eu du mal assez. 


Le cercueil de Marie Noëlle était au centre. Une main anonyme avait déposé sur le drapeau, un œillet rouge. Le Général vint se placer face aux cercueils. Le Colonel me prit la main pour me placer à sa droite. Le Colonel se plaça à sa gauche. Et le Colonel Ducrocq se plaça à ma droite. Je me demandai si cette cérémonie contribuerait à faire accepter l’homosexualité dans l’armée. Je n’étais là que parce que nous nous aimions d’un amour fou, dont l’armée avait été témoin en l’acceptant sans équivoque. Je savais que la treizième compagnie était là, quelque part, et que dans les civils là bas, des ex soldats venaient rendre hommage à celle qu’ils avaient sûrement aimée en secret. Puis la musique se tût. Et le silence se fit. Je fixais l’œillet rouge, qui était sur le blanc du drapeau, juste au-dessus de son visage. Que restait-il de son visage, de son si beau visage ? Rien, sûrement rien. Je ne sentais pas sa présence, je ne ressentais aucune onde, je n’étais pas partie prenante de cette cérémonie. J’avais froid, je pensai simplement que c’était le froid de la mort, qui ne la quitterait plus pour l’éternité. Je savais que sa vraie place était en moi. J’avais dans les yeux la beauté infinie de ses formes, la douceur de son regard, ses lèvres entre ouvertes réclamant les baisers. Sa beauté illuminera ma vie de l intérieur. Et dans mon cœur, elle ne vieillira jamais. Les musiques s’enchaînaient, puis je reconnus ce morceau bizarre joué entièrement avec les percussions. Une voiture arriva, et le ministre des armées descendit et vint se recueillir devant les cercueils. Puis il dit quelques mots au nom du président de la république, et un officier lui présenta les coussins sur lesquels trois médailles de la légion d’honneur étaient épinglées. La musique joua la Marseillaise. Je revoyais le Colonel Dumas, troublé par le contact de la poitrine de Marie-No le jour de notre mariage, quand il lui avait épinglé la médaille du 25 ème BGA. C’est comme ça que je sus, qu’avec Marie-Noëlle, il y avait un sous lieutenant et un caporal. Beau résultat. Pendant que nous étions là, le salopard de Colonel de Nouméa devait être en train de se taper une kanake vérolée dans un boxon de la ville! Puis le ministre se dirigea vers Guillemette qui était là pas loin, et que je n’avais pas vue. Il lui dit trois mots et l’embrassa. Puis il vint vers le Général, l’entraîna à l’écart, et pendant qu’ils discutaient, les sonneries aux morts retentirent. C’était la fin de la cérémonie. On attendit que le Général finisse sa conversation. Et je sentis dans la mienne la main d’Isabelle. On regagna les bâtiments de l’état major. On nous servit des boissons chaudes. Isabelle eut quelques mots réconfortants. Elle n’avait pas tellement changée. Je lui posais la question sur son avancement. Elle me dit qu’elle avait refusé pour rester près de « lui ». Le Général nous fit venir près de lui pour Nous dire : « Le ministre vient de me faire savoir que le lieutenant colonel XY venait d’être mis aux arrêts de rigueurs et qu’on allait le rapatrier pour le soumettre à l’enquête diligentée par « le Tribunal aux Armées de Paris » Puis il prit Isabelle par les épaules, et moi par le bras, on fit quelques pas, puis avec un triste sourire, il me dit :
« Nous nous sommes toujours croisés pour des problèmes difficiles.
Celui d’aujourd’hui, l’est particulièrement. Je souhaiterais très sincèrement que l’on se retrouve dans des moments plus sereins, nous avons des choses à nous dire, vous avez des choses à vous dire, et ne serait-ce que pour une fois, être ensemble au soleil. Maintenant, eve anne, je sais exactement à quoi vous pensez. Et je ne vous critique pas. Je sais que vous en auriez le courage. Mais ce n’est pas la solution de l’armée, à laquelle vous appartenez toujours. Laissez les juges faire leur travail. 
—Je vous comprends Général, mais il doit y avoir à Nouméa comme ici, des gens capables d’analyser ce qui s’est passé, et de comprendre qu’il ya eu faute de commandement ?
—Sûrement, mais il faut respecter la loi, et vous le savez, vous l’avez prouvé. »



Je pensai quand même qu’il eût été plus simple de m’envoyer là bas, pour "enquêter".

 

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Par eve anne
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