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Heure d'Hiver

   

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   L'Hiver

 

 

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Vulnerant omnes
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Je suis comme je suis,
Je plais à qui je plais.

ego sum ego sum
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Bonne Année



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Extraits

 

Rencontre en Forêt
carrefour11

J’ai fait une sortie hier soir en fin d’après midi, et je ne sais pas pourquoi, j’ai pris mon VTT au lieu du vélo. Dans les chemins de la forêt j’ai été doublée plusieurs fois par le même gros 4-4. J’ai eu l’impression que le mec voulait attirer mon attention. J’ai remarqué, au moment où il me doublait qu’il ne portait rien, il était torse nu. Nos regards se sont croisés, Puis il est parti loin devant. Il faisait doux, pas de vent, la forêt sentait bon. . . . . . . . . Un peu après, au coude du chemin, j’ai vu le 4-4 arrêté, dans un endroit où le chemin se rétrécissait, il n’y avait plus de place pour passer à droite, le taillis touchait la voiture, et un tout petit passage à gauche. 

La devise du Quebec
Hôtel du Parlement - Copie

Québec hiver 1876, en fin de matinée le soleil donnait à la ville gelée, les mille feux du diamant. Le froid était vif et les passants emmitouflés étaient peu nombreux. Pourtant, sur le trottoir ensoleillé, un homme ne semblait pas ressentir de gêne à déambuler tête nue, normalement vêtu, ou plutôt anormalement vêtu dans l’air glacé. Il n’avait pas de gants, et son regard bleu était perdu dans le rêve où il flottait. Il tenait à la main un petit rouleau de papier, et ce feuillet enroulé faisait de lui l’homme le plus heureux de la terre. Il suffisait de le regarder pour remarquer le sourire qui illuminait son visage d’homme intelligent et déterminé. Il venait d’avoir quarante ans, son allure était alerte, et son élégance impeccable attirait le regard.

Le testament de Benjamin  Briggs
Le testament de Benjamin Briggs

Les arbres du square Victoria commençaient à dérouler leurs feuilles. Florane-Marie D’Auteuil avançait à pas légers le long de la bordure du trottoir de la rue du Square Victoria. Malgré le soleil qui avait embelli la journée, l’air était encore frais. Elle tenait bien fermé contre sa gorge le col de fourrure de son manteau d’hiver. Florane était la fille d’un diplomate français décédé au cours de l’hiver dernier. Après un séjour de trois ans en Bavière. Elle vivait à Montréal depuis deux ans. Elle s’y plaisait mieux, et il y faisait moins froid qu’à Québec. Elle trouvait aussi la ville plus moderne et plus vivante. Elle ne venait pas souvent dans le parc, elle était généralement occupée dans l’institut où elle travaillait le plus souvent.

 Autoroute du Nord
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Autoroute du Nord, nuit de samedi à dimanche, 2 heures du matin, la chaussée est luisante, la pluie n’arrête pas de tomber, depuis des jours et des jours. Échangeur de Bapaume, les lumières de la cité toute proche se mêlent aux lumières bleues des gyrophares des ambulances et des voitures de gendarmerie. Les clignotants jaunes du Samu, et de puissants projecteurs éclairent une zone d’activité intense. De la fumée, des cris, des ordres jetés, des silhouettes fluorescentes s’agitent dans toutes les directions. Une très forte odeur d’essence s’est répandue, tout se déroule au milieu du bruit infernal des groupes électrogènes et des compresseurs. De l’autre coté du muret central les bolides ralentissent à peine sous l’œil préoccupé des gendarmes trempés.

            La Massane
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Les premières gouttes de l’averse s’écrasaient bruyamment sur les dalles de pierre. Lucile venait de refermer la porte du garage de l’hôtel, il était temps, à peine avait-elle reçu quelques gouttes. Elle adossa son vélo contre le mur et plaça avec soin l’antivol d’acier. Elle remonta directement à sa chambre par l’escalier de service. Il faut dire que l’équipement cycliste bariolé de réclames et de couleurs vives n’est pas tellement seyant pour les femmes habituées naturellement aux arcanes de l’élégance. Elle ouvrit tout de suite la fenêtre, et contempla avec ravissement l’orage au plus fort de sa fureur. Le tonnerre était d’une violence inouïe, et l’écho renvoyé par la montagne toute proche amplifiait les grondements incessants. 

Les Travers de Ms Philipson
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Le trajet entre Paris et Londres en Eurostar n’allait pas être suffisamment long pour calmer l’excitation de Magali. Elle regarda sa montre; dans 5 minutes ce sera le tunnel, et moins d’une heure pour arriver gare de Waterloo. Quinze jours auparavant, Magali avait quitté le lycée un peu plus tôt, pour absence de son professeur d’Anglais. C’est ce qui explique qu’elle ait elle-même ramassé le courrier dans l’entrée de l’immeuble cossu, rue de Turbigo, tout près de la place de la République. Au milieu d’un amoncellement de publicités, journaux, lettres etc, l’une d’entre elles lui était personnellement adressée. C’était une enveloppe anonyme, sans flamme ni cachet, ni marques reconnaissables. Elle attendit d’être à l’intérieur de l’appartement qui surplombait magnifiquement la capitale, pour ouvrir le pli qui, a priori, ne lui disait rien de bon. Elle monta directement dans sa chambre, d’où l’on découvrait toute la partie nord de Paris, jusqu’à la butte Montmartre, à demi visible dans la brume de printemps en cette fin d’après midi.

         La brosse à Dents
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Ce n’était pourtant pas un jour exceptionnel. Un samedi comme un autre, sauf que c’était l’été, que la chaleur était déjà accablante, et que je me sentais légère, en pleine forme et heureuse. Pourquoi ? Je ne saurais le dire, j’étais bien c’est tout. Madrid était une fournaise, mais cela faisait maintenant pas mal de temps que je m’y étais installée, et franchement, je ne regrettais rien. Ma fille était avec moi, et le samedi matin nous avions pris l’habitude de faire nos courses pour la semaine. Il était encore tôt, mais nous n’étions pas pressées, bien qu’étant attendues pour déjeuner à la finca où nous avions nos amis. Nos amis et nos habitudes, c’est là que nous avons logé avant de trouver cette petite villa du nord de Madrid, avec sa petite piscine et ses pins parasols. Cette villa, nous l’avons louée toute meublée. C'est-à-dire avec le minimum, ce qui lui donnait un genre particulièrement spartiate avec ses murs blancs et ses meubles foncés. On s’y était attachées, et pour nous, c’était le paradis. Nous n’avions plus que quelques achats de peu d’importance, mais je devais passer absolument à la pharmacie pour acheter de l’huile solaire.

 Résistance et Trahison
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Le 19 mai 1940 restera à jamais le jour le plus sombre de l’histoire d’Amiens. Tandis que le général de Gaulle, à la tête d’une division blindée, contient l’avancée des troupes allemandes dans le Vimeu et la région d’Abbeville, l’armée nazie bombarde la ville préfecture de la Somme. Tout le centre-ville et les gares de chemin de fer sont rasés. L’ancien secrétaire général de la Somme, Jean Moulin, apprend la nouvelle de la destruction de la ville, et revoit dans ses récents souvenirs la belle cité telle qu’il l’a connue, la préfecture d’Amiens et son propre bureau où il a travaillé au service de l’État. Il n’accepte pas que tout cela soit souillé par la présence ennemie. Amiens s’enfonce dans quatre années de souffrance et de terreur. La communauté amiénoise se divise. Certains acceptent la fatalité. D’autres la refusent et résistent. Et d’autres encore se mettent du côté des plus forts. Jean-Marc Laurent n’a que 16 ans en 1942 lorsqu’il entre dans le réseau “Centurie”. Simple cheminot, il intègre les FTP, unités combattantes clandestines. Il participe à de nombreuses opérations contre l’armée allemande.

  La Chapelle St Domice
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Depuis que Karen avait disparu, Adrianne vivait l'enfer. Elles étaient amies de longue date. Ce qui semblait être pour les autres une camaraderie d'adolescentes était en réalité un grand amour partagé. Karen et Adrianne poursuivaient avec brio leurs études de médecine. L'une serait Sage femme, et l'autre voulait être gynéco. Elles n'en étaient pas encore là, elles avaient encore quelques années à travailler comme des esclaves pour espérer arriver à quelque chose. Karen et Adrianne étaient des filles sans histoire. Discrètes, inséparables, Elles étaient admises et aimées par les étudiants de leur université. Elles étaient lesbiennes disaient quelques-uns, elles étaient amoureuses disaient les autres. Certains, les plus proches, disaient qu'elles s'aimaient passionnément. Toutes deux très jolies, leur sourire n'avait d'égal que le pétillement de leurs prunelles. Elles étaient gaies (joyeuses) elles aimaient la vie, elles aimaient le monde, les fleurs les animaux, elles étaient surtout le reflet du bonheur total. Mais tout cela, c'était avant. Avant ce terrible accident qui emporta en quelques secondes la vie de Karen. . .

              Aneseau
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Tout à côté du lieu dit « La Pierre aux Fées » à quelques pas du vieux château, à la lisière du grand bois qui bordait jadis le village de Folleville, elle vivait dans une pauvre chaumière. « La Vieille Dame » ! C’est ainsi qu’on l’appelait aux alentours, vivait en recluse, et ne sortait que le soir venu. On la craignait. On l’évitait .Elle possédait, dit-on, des pouvoirs démoniaques : « Elle jette des sorts, elle mène les loups les nuits de pleine lune …» C’est ce que l’on chuchotait, à l’abri des regards de peur d’être entendu de La Vieille Dame. Ou peut-être même des adeptes de ses remèdes ou de ses pratiques. En effet, on lui prêtait également bien d’autres pouvoirs, elle n’avait pas son pareil pour combattre la fièvre. De bon matin elle vous faisait marcher dans l’herbe d’un pré couvert de rosée, cueillir par-ci, quelques poignées de feuilles de plantain, les jetant par-là, derrière, sans vous retourner. La pratique était efficace, autant que celle qui consistait à guérir les maux de ventre en prenant à jeun une infusion de la deuxième pelure du sureau qu’elle avait cueilli à la nouvelle lune, en récitant une prière aux saints Côme et Damien.

     Destruction Massive
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Saddam est un homme qui doit être intelligent, et dangereux, Il a déclenché une guerre qu'il n'a pas su gagner, et s'en est pris plein les yeux. C'est maintenant un homme blessé, parce qu'il a perdu devant l'Occident et ça, il ne le pardonnera jamais. Il rumine sa vengeance et son esprit tordu imagine des milliers de scénarios tous plus terrifiants les uns que les autres. Il a beaucoup investi dans la fabrication des armes bactériologiques et chimiques, et les ateliers de fabrication de ces potions tragiques ont été vite reconstitués. Aujourd'hui il tient sa vengeance, il a convoqué ses fidèles pour leur faire part de son plan, leur demandant leur appui pour le mettre à exécution. En ressortant de son bureau, sur les trois "généraux" dans le secret, deux se sont suicidés, pour ne pas avoir à accomplir cette tâche, tant elle était terrifiante, irréversible et incontrôlée. Et le déroulement des opérations a commencé. L'arme absolue: Les Kurdes, et la compassion de l'occident pour les martyrs de l'Irak. Il fallait y penser.

  L'Infirmière d'Ambazac
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« Bonjour, excusez moi de vous déranger, je m’appelle Ghylaine, et je suis infirmière à Ambazac. » Laurence se retourna, et fut surprise de la vision qui s’offrait à elle. La jeune femme était assez jolie, la trentaine, brune et le visage assez fin. Elle était un peu plus grande, très mince, les cheveux mi-longs, coiffés « à la diable ». Le maquillage assez discret, un rouge à lèvres très rouge, les sourcils très noirs, les paupières ombrées. Un grain de beauté sur la lèvre supérieure gauche. Le premier examen était favorable. Ghylaine souriait, Laurence lui rendit son sourire. « Je suis Laurence, et je n’ai pas besoin de piqûres ! Que puis- je pour vous ? —Voilà, je vous ai aperçue au concert d’Aixe-sur-Vienne samedi soir. Je vous ai vue prendre des photos, j’en ai pris aussi, je vous propose que nous les regardions ensemble. » Le sourire ne l’avait pas quittée en prononçant ces mots. Laurence trouva l’idée excellente, quoique peut être un peu intéressée :

      Les Etoiles Eteintes
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Sarah restait dans le mausolée pour mieux méditer. Elle appréciait que le décor soit aussi sobre, que le lieu soit aussi calme, que la lumière soit diffuse, et la fraîcheur aussi agréable. Seul flottait dans l'air ce parfum de géraniums, mêlé à celui de la canne à sucre, omniprésent à Saint-Benoît de La Réunion. Elle tira la porte derrière elle. Coupée du monde extérieur, elle serait mieux pour prier et se recueillir sur la tombe de sa belle amie. Elle aimait ce mur de marbre brut, ce dépouillement de tout objet de culte: pas de croix, pas de Christ, pas de Maries. Dehors, les géraniums en fleur ceinturaient l'édifice, mais dedans, aucune fleur, que la pierre, le marbre, la lumière. Une plaque de bronze sculptée à l'effigie d'une jeune femme aux longs cheveux épars, au visage fin comme l'avait Florane quand elle était arrivée dans sa vie. Pour que cet endroit soit tel qu'il est, Florane avait dû en définir tous les détails elle-même. Sarah pensait que le service des pompes funèbres pourrait peut-être lui donner quelques détails sur les derniers jours de Florane, et peut-être, qui sait, lui faire rencontrer les gens qu'elle connaissait, ou même qu'elle fréquentait ?

      L'Adjudant Moreau
gendarmerie-nationale

Roger Lheureux arriva au 4 rue de Seclin. Il était 9 h 15. L’ouverture de la centrale était à huit heures. Quand il lança un « salut » à la ronde, aucun de ses collègues ne lui répondit. Roger n’était pas à proprement parler un bon copain, mais il était le numéro deux de la centrale syndicale départementale, et à ce titre, il était plus craint que respecté. Ce qui choquait ses collègues de travail, c’est qu’il arrivait régulièrement en retard, et généralement dans un état de violence éthylique mal dissimulé. Chaque matin, Roger faisait une halte au « Café de la Savonnerie » situé juste en face de l’usine qui produisait des millions de tonnes de lessive en poudre. Dans ce café, nul besoin de passer sa commande, le patron vous sert d’emblée un café accompagné d’une « bistouille ». La bistouille étant ce petit verre de genièvre qu’il fallait boire en premier lieu et vider le second verre dans le café. Souvent on remettait ça, et après la deuxième ou troisième bistouille, on allait travailler. À cette époque, les accidents du travail étaient nombreux, et bien sûr, l’employeur était toujours l’unique responsable.

        Un Douze Avril
Joëlle et moi

Un 12 avril …. Oui c’était un 12 avril, je m’en souviens très bien, c’était le jour d’anniversaire de ma maman, et j’étais allée déposer une potée de tulipes sur sa tombe, des tulipes perroquets rouges et blanches, ses préférées. C’était la fin de l’après midi, à l’heure où le soleil, bas sur l’horizon, allonge les ombres, et colore la nature du vert jaune des feuilles naissantes, du bleu de ciel et de blanc nuages. Il faisait beau, il faisait doux. Sur l’autoroute il y avait peu de circulation ou du moins elle était fluide. Pas d’excès de vitesse, j’étais en balade. Je rentrais chez moi, il me restait tout juste une demi-heure de trajet. J’arrivai à proximité d’une aire de repos : « Aire de Tilloloy Ouest » et machinalement je mis le clignotant, je ralentis dans la chicane et débouchai sur le grand parking. Je m’arrêtais souvent à cet endroit, d’abord parce que sur mon trajet habituel je n’ai pas tellement le choix, mais surtout pour le bois qui entoure ce parking, c’est vraiment très forêt, c’est superbe.

            Joyeuse Noelle
Joyeux Noelle

Pour moi, Noel est rarement joyeux. Ici, là où je vis, à Madrid, La Navidad se fête bien entendu, mais ce n'est pas le même Noel qu'en France. Les jouets pour les enfants sont offerts le jour de l'épi Fanny, La Navidad est surtout une fête religieuse, où la messe de minuit se paie l'intérêt général. Autre raison et pas des moindres, ma grande fille rejoint son père en France. Ainsi elle ne souffre pas d'un dépaysement total. Voir son père, c'est bien vite dit. C'est un homme orgueilleux, très occupé, pas du tout papa gâteau. Mais Axelle a le coeur sur la main et elle accepte avec le sourire l'accueil réservé de son papa. Heureusement, le papa s'est remarié, forcément, il avait besoin d'une esclave pour lui porter le café au lit. Cette esclave s'appelle Rachel. C'est une de mes amies, elle est très belle, nous nous aimons beaucoup, en secret bien sûr. Je crois qu'elle est plus jolie que moi, un peu plus jeune il est vrai, Nous nous voyons rarement maintenant que je suis expatriée. Elle s'occupe très bien de ma fille, elle l'adore, elle n'a pas d'enfant, tous ses efforts n'ont jamais abouti. Rachel est pharmacienne. Son officine n'était pas très loin de mon immeuble, ainsi je ne rechignais jamais à aller me chercher les rares médicaments que je prenais. J'ai toujours fait beaucoup de sport. Du vélo, de la piscine. C'est ce qui me vaut sans doute d'être encore présentable aux 44 ans que je viens de fêter il y a deux jours. Rachel aussi fait du sport, mais en vraie compiégnoise, elle a choisi de faire du cheval.

         Le Petit Laurent
Laurent (4)

Entre son bonnet bleu et son masque de chirurgien, on ne voyait que ses yeux noirs. Pourtant, quand il tournait son regard sombre vers l’une ou l’autre d’entre nous, on comprenait instantanément ses désirs, sans qu’il eût prononcé la moindre parole. J’étais devant lui, et j’étais l’assistante de l’autre chirurgien qui lui faisait face. L’entente des deux hommes était remarquable, c’était le meilleur « bloc » de tout l’hôpital. Je passais les instruments qu’on me réclamait, tout en essayant de ne pas regarder le champ opératoire, je ne m’y habituerai jamais. Pourtant, délimité par le drap bleu ciel et les linges blancs tâchés de rouge, l’ouverture ne ressemblait à rien que l’on puisse identifier, sans être du métier. Moi je ne l’étais pas, je passais les outils, comme une autre fille aurait pu le faire aussi bien. Et pour ne pas regarder l’opération en direct, je portais les yeux sur le chirurgien aux yeux noirs, ou sur son assistante qui me faisait face, dont les yeux étaient d’un bleu sauvage. De l’assistante on ne voyait que la proéminence de son imposante poitrine.

 Le Chaos de Targasonne
Le Chaos de Targasone

Sur les hauteurs des Pyrénées-Orientales, la Cerdagne est un vaste plateau ensoleillé, un encorbellement entre le mont du Carlit, et celui de Puigmal, tous deux culminants aux alentours de 3000 mètres. La Cerdagne est à une altitude de 1600 mètres en moyenne, et elle a la particularité d’être une région fertile, bien que de haute montagne, puisque l’on y récolte des céréales, du blé principalement. On y vient de Perpignan par la route qui monte à Font Romeu, ou par le côté Espagnol en traversant l’Andorre. Dans la partie occidentale de la Cerdagne, on trouve un lieu particulièrement mythique, « Le Chaos de Targasonne » Plutôt qu’un lieu, on pourrait dire un pays, voire une région, puisqu’il s’étend sur 50km. Le Chaos est un amoncellement de roches granitiques -par exemple- dont l’origine et la formation ne paraissent pas évidentes. Curieusement, on trouve aussi ce genre de relief dans la forêt de Fontainebleau ou dans la Lozère.

        Le Coupe Chou
Le coupe chou-1

S’il existe un lieu magique à Paris, c’est bien la gare de Lyon. Pas cette gare TGV souterrainement austère et sans âme, mais la gare de surface, la vraie, celle qui fait vibrer le cœur dès que l’on aperçoit l’horloge, du boulevard. J’ai toujours aimé les trains, depuis ma plus tendre enfance quand, avec mes parents et ma sœur, nous partions à la mer. La Gare de Lyon à l’heure des grands départs est habitée d’un esprit particulier. Peut-être est-ce simplement la concentration des voyageurs en attente. C’est cette odeur particulière, faite d’humanité, d’ozone et de poussière. Ce grand espace face aux quais, animé de ses panneaux affichant les horaires, et les milliers d’yeux, levés vers les chiffres verts qu’ils ne semblent pas comprendre. Et puis ce sont tous ces jeunes avec sacs au dos, assis sur les murets des escaliers descendant au sous-sol. Ils fument, ils mangent d’énormes sandwiches, vident quantité de boîtes de bière ou de Coca. Ils dorment ou s’embrassent, l’amour des fois, se fout du décor. En haut de l’escalier, ce superbe restaurant : « Le Train Bleu » qui fit briller de ses ors, la redoutable Nikita, alias Anne Parillaud.

            Jolie Luna
Lena Gercke

Sur les pavés de la place St Jacques, Rachel avait beaucoup de difficulté à marcher avec ses talons aiguilles, et se casser un talon maintenant, ne serait pas pour lui remonter le moral ! Rien n’allait vraiment bien depuis une semaine. Elle avait du mal à effacer de son esprit ce qui s’était passé, et ce soir-là, elle n’avait pas envie de rentrer chez elle, et de se retrouver seule avec ses idées noires. Sa petite fille était pour le week-end chez sa grand-mère. Elle entra dans le café le plus proche. Le Coq d’Or l’un des plus joliment décorés de la ville. Elle n’était pas une habituée des lieux, d’ailleurs elle entrait rarement dans un café. Il y avait du monde, de la musique jazzy, de la fumée, comme dans tous ces endroits-là, en fin d’après-midi. Elle s’approcha difficilement du bar et demanda un Tonic. Le barman la servit, puis, son verre à la main, elle chercha dans la salle un endroit libre pour se poser.

            La Mante
Les DrusCouleur

Je la reconduisis à la porte. Les quelques pas qu’elle fit devant moi suffirent à provoquer mes plus secrètes fêlures. Sa démarche, ses bottines à hauts talons, son jean élimé aux fesses, ses fesses rondes perchées sur des jambes interminables, ce perfecto, qui était choisi sans doute uniquement pour mettre ses fesses en valeur, et cette chevelure de jais, coupée court, très bas sur la nuque, avec cette mèche savamment rebelle qu’elle remettait en place d’un mouvement de tête des plus étudié. Deux anneaux dorés apparaissaient alternativement au rythme de son pas décidé…..Elle s’arrêta sur le palier, se retourna… Gros plan sur une poitrine agressive, moulée dans un pull col roulé blanc. Visage bronzé, ses yeux noirs lancèrent un éclair, histoire d’humaniser son sourire crispé. Elle commença à descendre les degrés, je fermai la porte appuyai mon front sur le chambranle, et je restai ainsi les yeux fermés, imprégnée de ces images qui repassaient en boucle, dans mon souvenir immédiat.

      Les Jeux de St Elme
Les Jeux de St Elme

Juin 1999 ! décès de mon père, puis en octobre, celui de ma mère. Après 63 années de mariage, la pauvre femme n'a sans doute plus estimé utile de continuer à vivre. Ils ont ainsi rejoint au paradis, leur fille décédée neuf ans plus tôt, à l'âge de quarante-huit ans. Il avait quatre-vingt-sept ans, elle en avait quatre-vingt-deux. Ils ont donc élevé trois enfants : deux filles et le garçon que je suis. Quelques mois plus tard, il fallut se décider à tirer un trait sur la matérialité de leurs existences : Vendre la maison où nous avons grandi, et la débarrasser de tous les meubles et objets leur ayant appartenu. Voir la maison de notre enfance complètement vide fut pour ma sœur et moi, une douloureuse épreuve. Au moment de charger les derniers cartons, ma sœur me désigna celui qui était resté un peu à l'écart.

     Les Jours de Liesse
Les Jours de Liesse

Il faisait un temps superbe ce jour-là. Dans la petite bourgade de Saint André, cette petite ville touristique de Haute-Provence près du lac du Castillon, la saison touristique était à peine commencée. Pourtant, il y avait pas mal de monde en ville, et déjà quelques nageurs courageux dans les eaux glacées. Pour certains c’était déjà les vacances, mais pour d’autres, le travail était encore d’actualité. Il faisait déjà chaud. Pourtant, la ville est à neuf cents mètres d’altitude. Le soleil comme toujours dans cette région était de la partie. Derrière les baies vitrées des bureaux, les employés commençaient à souffrir de la chaleur. Heureusement, la matinée de travail touchait à sa fin. Guillaume avait l’impression que ses clients étaient convaincus, et qu’il remporterait ce marché difficile. Il était assez fier de cette présentation. Bien sûr, il n’était pas seul à avoir réussi à établir ce climat de confiance, qu’il sentait maintenant installé chez ses interlocuteurs.

   Les Tricots de Marguie
Les Tricots de Marguie

Marguerite Dupain était une femme au grand cœur. Pourtant on ne peut pas dire qu’elle avait été gâtée par la vie. Née de parents miséreux de la région de Douai, à Goeulzin plus exactement, elle avait, toute sa jeunesse, traîné ses galoches le long du canal, trouvant dans cette campagne ouvrière tous les motifs qui pouvaient alimenter ses rêves. Elle s’imaginait par exemple qu’un intrépide marinier l’emporterait un jour sur sa péniche, et l’emmènerait ainsi de l’autre côté du monde, là où il n’y aurait que joies et que richesses. Son père, fut l’un des derniers ouvrier de la dernière brasserie du village, et comme bien souvent, il était le meilleur client de son patron.

   Le Miracle Impossible
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C'est ainsi que Jésus parvint dans une ville de Samarie appelée Sychar, non loin de la terre donnée par Jacob à son fils Joseph, là même où se trouve le puits de Jacob. Fatigué du chemin, Jésus était assis tout simplement au bord du puits. C'était environ la sixième heure.Arrive une femme de Samarie pour puiser de l'eau. Jésus lui dit: "Donne-moi à boire." Ses disciples, en effet, étaient allés à la ville pour acheter de quoi manger.Mais cette femme, cette Samaritaine lui dit: "Comment? Toi, un Juif, tu me demandes à boire à moi, une femme samaritaine!" Les Juifs, en effet, ne veulent rien avoir de commun avec les Samaritains.Jésus lui répondit: "Si tu connaissais le don de Dieu et qui est celui qui te dit: "Donne-moi à boire", c'est toi qui aurais demandé et il t'aurait donné de l'eau vive."La femme lui dit: "Seigneur, tu n'as même pas un seau et le puits est profond; d'où la tiens-tu donc cette eau vive?

          Noire d'Ecume
Noire d'écume

Voyager est sûrement ce qui me motive le plus. Lorsque j'ai choisi de faire ce métier, je n'y avais pas spécialement songé, ou alors, ce n'était pas l'élément fondamental de mon choix. Et pourtant, c'est ce qui m'apporte le maximum de joies. J'adore voyager. Me rendre au pied levé dans telle ou telle ville, dans ce pays ou un autre, est pour moi le plus grand des plaisirs. Ce n'était pas a priori évident. Il faut apprendre à voyager, comme il faut acquérir l'envie de voyager. Tout ce que l'on va rencontrer sera un étonnement. Je ne dis pas un enchantement, puisque sur notre terre, il se trouve malheureusement quantité d'endroits d’où l'on a plus envie de fuir plutôt que de séjourner. Quand j'ai su que je devais me rendre à Cadix (Cadiz en espagnol), j'ai ressenti ce petit pincement au cœur, signe de plaisir intense. Ce n'était pourtant pas la première fois. Je m'y étais déjà rendue, en coup de vent, une seule journée, et je m'étais juré d'y revenir. Cette fois, j'étais décidée à rester le temps qu'il faudrait pour la visiter, et pour en ressentir l’ambiance et le passé.

              Soledad
Roissy

Elle est moche cette voiture, avec cette inscription comme un tatouage ridicule à l’arrière « Taxis Lefèbvre » « Longues distances » « Roissy-Compiègne » C’était une Espace Renault, ce gros machin carré qui, à peine parti était déjà arrêté deux cents mètres plus loin au premier feu rouge. C’était comme une hésitation, cette voiture arrêtée. C’était la dernière chance, soit d’en descendre, soit de courir pour la rattraper. Mais Jane ne bougea pas, et personne n’en descendit. Les yeux pleins de larmes, elle ne distinguait plus nettement le véhicule. Elle le vit repartir, tourner au coin de la rue et disparaître. Axelle lui serrait la main comme pour dire, « ne pleure pas je suis là ». Ce n’était pas la première fois que sa « tata » partait en voyage. Mais Jane bien sûr ne lui avait pas dit que ce départ était le dernier, et qu’il n’y aurait pas de retour. Ainsi va la vie des gens qui assument leurs choix, la vie est unique, il n’est pas toujours écrit qu’une rencontre change forcément la vie, la vie se vit en suivant le chemin décidé. La vie ne change pas toujours de vie.

              Manon
tn Manon (101)

Quand la boîte aux lettres fut ouverte, les trois quarts de son contenu se répandirent sur le sol. Manon se baissa, difficilement, car les talons et la jupe serrée ne sont pas spécialement faits pour cet exercice. Elle ramassa un à un tous les journaux de pub de télé, toutes les propositions des mages de la région, toutes ces enveloppes pleines de factures, et d’autres feuillets divers. Au beau milieu de ce fatras, un document attira son attention. Elle le plaça sur le haut de la pile que sa main contenait avec difficulté. Puis elle referma la boîte, se dirigea vers l’ascenseur, après avoir pianoté le digicode. Elle retrouva avec délice l’appartement illuminé de soleil, avec son parquet brillant, ses jolis rideaux de voile de lin, ses fleurs et ses tableaux, sa bonne odeur de parfums et de cire, cette odeur si caractéristique des alcôves féminines. Manon posa le tout sur la table du salon, et partit dans la salle de bain au cas où quelque réparation serait nécessaire. Il fallait qu’elle se change pour aller faire quelques courses au Champion tout proche. Ceci étant fait, elle jeta un coup d’œil sur le document qu’elle avait ramassé.

            Fait Divers
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A 300km /heure, le Thalys filait vers Bruxelles en longeant l’autoroute du Nord. Dans le compartiment de première classe, confortablement installé, bercé par le ronronnement régulier du TGV, Albert se laissait aller à sommeiller. Il adorait ce train, où le confort était parfait, le seul endroit où il savait pouvoir réellement se reposer. Il faut dire que sa vie était quelque peu agitée, et le stress prenait souvent le relais de la volonté et de la détermination. Il était installé sur le fauteuil à coté de la vitre qui donnait coté autoroute. Il savait que les voitures qu’il voyait, roulaient au moins à 150km/h. Pourtant, il avait l’impression qu’elles allaient au ralenti. Il remarqua une BMW qui sur la file de gauche doublait toutes les voitures avec une aisance étonnante. Malgré tout il la perdit de vue très rapidement. Sur les fauteuils de l’autre coté de l’allée, il y avait deux jeunes femmes, qui se regardaient en se parlant à voix basse, quelques fois un sourire illuminait les visages.

 

Les Dryades

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J'ai déjà par mes nouvelles, abordé beaucoup de sujets. Peut être font-ils partie de "tout le reste". Je ne suis pas une fervente admiratrice de Simone de Beauvoir, (sauf quand le rôle est tenu par la divine Anna Mouglalis) et je ne me reconnais pas dans les féministes de tous bords. Pourtant, s'il y a un trait de ma personnalité qui surclasse tous les autres, c'est bien mon amour de la femme. Je suis lesbienne donc, puisque c'est l'étiquette que l'on colle aux tribades modernes, mais là encore, ce n'est pas vraiment ça, puisque je suis mariée, et j'ai une fille d'un premier mariage. Je tiens à vivre ma vie comme tout le monde, le plus simplement possible. J'allais dire le plus "normalement" possible, mais je sais que cela aurait fait bondir certaines âmes guerrières. Rassurez-vous, je ne vise personne. Une vie de famille, c'est ce que j'ai toujours souhaité, en faisant la part de ma vie et de mon autre vie. Mon alter ego est une entité qui existe, qui influe bien évidemment sur mon autre vie. J'espère simplement que personne autour de moi, n'en souffre. Si quelqu'un ignore ma bisexualité, c'est que ça ne l'intéresse pas, car je ne dissimule rien, je vis comme ça vient. Je vis au grand jour, et j'aime au grand jour. Je n'ai aucune arrière-pensée, aucune envie de dissimulation. "Je roule plein phares". Ma devise pourrait être le titre de ce blog, "O me quieres O me dejas. Ce qui veut dire en clair, "Ou tu m'aimes ou tu me laisses". C'est d'autant plus facile à comprendre que je vis en Espagne, banlieue de Madrid près de l'aéroport. Je suis en Espagne depuis 6 ans bientôt. Je m'y suis installée pour raison professionnelle, quand l'envie m'est venue de faire "autre chose, autrement". Ce n'est pas pour raconter ma vie, mais plutôt pour raconter mon histoire, ce qui bien sûr, est différent. Je ne suis pas une pro des blogs. Il y a encore quelques mois, j'ignorais tout de cette façon de s'exprimer. J'avais vu bien sûr les merveilles réalisées par ma belle amie Ana, et sans ce stupide accident qui m'a clouée durant quelques semaines, je ne me serais jamais lancée dans cet exercice. 

 

Chapitre 1

Les Demoiselles de St Ladre

 

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Samedi 15 décembre 2007 La petite route était noire et luisante au milieu de toute cette neige grisâtre. À peine dégagé, le ruban d’asphalte était étroit, et les voitures se croisaient avec difficultés. Il avait neigé fortement depuis le début de ce mois de décembre. Déjà, mi-novembre, quelques flocons avaient blanchi la campagne. Et depuis, une neige très fine, humide et pénétrante, n’arrêtait pas de tomber, virevoltante au moindre souffle de vent. Ce n’était pas suffisant pour recouvrir la route abondamment salée, mais assez pour effacer en une journée toutes les traces de la veille. La circulation n’était pas très intense, il semblait que l’activité, comme la nature, s’était endormie. Il faisait froid et humide, d’autres précipitations importantes, peut-être neigeuses, étaient attendues. Le ciel était gris bien sûr, et la nuit ne tarderait pas à accabler le paysage d’un sombre avenir. Les arbres des taillis tendaient désespérément leurs squelettes vers de gros nuages terrifiants. Depuis les quinze jours que la neige était omniprésente, la plupart des branches de ces arbres nus avaient perdu leur chargement de poudre blanche. Et pour d’autres, il suffisait d’un souffle de vent pour qu’elles se dévêtissent, dans un chuintement à peine perceptible. La petite route reliait la départementale à la petite ville de Cagny. C’était un raccourci bien pratique qui permettait de rejoindre le parking de la gare de Longueau. À quelques centaines de mètres de la station, la route était surplombée par cet immense viaduc qui enjambait la vallée marécageuse. Ce que l’on appelait la rocade, mais en réalité c’était l’autoroute qui contournait la ville par le sud en surplombant la vallée. Le flot des véhicules épargnait ainsi le centre-ville qui, à grands frais, avait été tristement abandonné aux piétons. Parallèlement à la route, sur un remblai de quelques mètres, la ligne de chemin de fer émergeait tout juste, elle aussi, de la couche de neige. On ne distinguait que les rails, les traverses n’étaient plus visibles qu’à de rares endroits. Comme la petite route, les voies s’engouffraient sous le viaduc dans la direction de Paris. De l’autre côté des voies, la falaise de craie du plateau picard ajoutait sa grisaille au décor ambiant. En face, dans la vallée, le marais. Cette immense étendue d’étangs constitue le lit de la rivière qui coule sa tranquillité dans la réserve Saint-Ladre, avant de se mêler à la Somme à Camon, entre Longueau et Amiens. 

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LVI-Les Doutes

 

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Ta peau d'or était toute ma richesse.

Gil Pasteur. 


                                         La nouvelle s’était bien sûr répandue dans l’agence, et l’ambiance avait changé. J’étais donc contrainte d’être là, pour faire tourner la boîte, Lorena avait perdu toute motivation. J’en étais particulièrement affectée. Je m’étais imaginée que l’ayant tirée d’affaire, elle était devenue plus forte. Heureusement, Rosine se révéla avoir les qualités qui faisaient défaut à son amie. Cette aventure aura au moins l’avantage de m’enseigner la modestie quant à mes capacités à gérer les employées. Rosine prenait ses marques, elle devenait de jour en jour plus affirmée, plus sûre d’elle ; elle devenait la patronne. Chose curieuse, Lorena acceptait cet état de chose avec naturel, elle se soumettait à Rosine comme elle le faisait avec moi. L’agence reprit peu à peu sa vitesse de croisière. Lorena ne serait pas la négociatrice de la vente de l’agence. C’était un échec pour moi. Linda ne disait rien, son calme m’étonnait un peu, Alors j’allais au devant de ses critiques.
« Tu m’en veux ?
—Pas du tout, tu sais ce que tu fais, je n’ai pas le moindre doute là-dessus. Et pour moi, rien ne change, je suis à toi, ici ou ailleurs, où tu voudras, ça n’a pas d’importance. Quand tu prendras un billet pour ailleurs, n’oublie pas d’en prendre un autre pour moi.
—J’ai bien peur que ça ne soit pas aussi simple.
—Pourquoi ? Là où tu vas, on fusille les négresses ?
—Je ne sais pas encore où je vais, je n’ai pas encore de projets précis.
—Cela m’est égal, je ne suis pas pressée. Ne crois pas que tu pourras te débarrasser de moi. Même si c’est pour faire ton ménage, ta vaisselle ou ton jardin.
—Tu es un amour de fille Linda, et tu laisserais Laurie ?
—Elle est si jolie qu’elle me remplacera vite, et puis elle en a peut être marre de chercher après moi la nuit ! »
Elle avait toujours un langage très imagé qui me plaisait beaucoup.
Je demandai à Rosine si elle voulait participer aux négociations.
« Je poserai une nouvelle fois la question à la miss, mais comme elle ne voudra rien faire, je suis d’accord.
—Bon alors demande lui de me préparer la situation à fin décembre, en attendant le bilan définitif.
—Ok Tu l’auras. » Je pris rendez vous avec Monsieur XXX. La réunion trimestrielle d’Amiens sera le 15 Avril. Il faudra que je prévienne Louis que j’aurai besoin d’un entretien en particulier. En fonction de ça, tout sera plus clair. Je n’avais encore rien dit à Simone, ni rien dit à Maud. J’étais persuadée que rien ne serait simple. On ne faisait plus l’amour, et Maud n’était pas contente. Depuis l’enterrement de Marie-Noëlle, ma libido était tombée à zéro. J’avais pris quelques doses avec mes hommes, et ça s’arrêtait là. Mais elle ne laissait pas voir sa déception, et elle s’occupait toujours aussi bien d’Axelle. Elle la faisait beaucoup travailler, et elle organisait aussi ses loisirs entre le cheval, la piscine, le patin à glace, la danse et la musique. Puis un soir, alors que je lui avais proposé de dîner avec nous, elle me demanda pourquoi.
« Je ne comprends pas, à moins qu’il se passe quelque chose qui m’échappe, je ne comprends pas. Je n’ai pas l’impression d’avoir vieilli aussi vite. Promets-moi de m’expliquer.
—Il n’y a pas grand-chose à expliquer. Mais je te dirai le moment venu, quand j’aurai quelque chose à dire.
—Avec ça je suis renseignée.
—Ne m’en veut pas Maud chérie. Tu n’as rien à te reprocher. C’est moi qui traverse une période difficile, mais ça va passer.
—Tu ne disais pas ça pour les hommes dernièrement.
—C’était une promesse que j’avais faite. Et je tiens mes promesses. Il n’y en aura plus. » Je rencontrais Monsieur XXX, en compagnie de Rosine. Apparemment, il la trouvait à son goût, il ne s’en détachait pas les yeux plus d’une seconde. Elle était particulièrement jolie. Elle avait laissé ses cheveux blonds roux flotter sur ses épaules, et elle portait un débardeur noir qui lui serrait la poitrine, faisant ressortir les deux globes au-dessus. Son sourire et son regard rieur faisait le reste. On ne pouvait pas la contempler sans la trouver d’emblée aussi belle que sympathique. J’expliquai à Monsieur XXX que des évènements importants étaient venus modifier mes ambitions, et que j’étais décidée à abandonner cette affaire pour créer autre chose, ailleurs. Ce qui voulait dire en clair :
« J’aurai besoin d’argent pour investir, inutile d’espérer le bon coup. »
Il semblait intéressé, et l’on prit rendez vous pour l’examen de la situation.
Claudine travaillait toujours avec intelligence, elle ne semblait pas être affectée par les prochains évènements.
« J’ai un rendez vous à Lille, avec notre client, il serait très honoré que tu m’accompagnes. Ça te dit ?
—Bien sûr, je t’accompagnerai. C’est quand ?
—Après demain ça ira ? Je te prendrai chez toi vers neuf heures.
—Ok, il y aura des croissants tous chauds.
—Je suis contente. Merci. » Je la regardai sortir de mon bureau. J’adorais ses hanches, qui se balançaient joliment, j’admirai ses jambes étirées par les talons aiguilles. Elle avait monté ses cheveux brun roux en chignon, et sa nuque semblait réclamer les baisers. Pour fermer la porte elle se retourna un peu histoire de me donner un profil sur la poitrine bien placée, et son ventre plat. Elle me sourit, heureuse. J’avais une petite idée de la démarche. Aussi je prévins Odile et Maud que demain soir je ne serais peut être pas rentrée, et de ne pas m’attendre. A part l’œil soupçonneux de Maud, cela ne posa pas de problème. Je n’étais pas maître du jeu, je verrai bien si Claudine s’était lancée dans un plan de séduction. Je ne pris rien pour me changer, je mis simplement une trousse de toilette dans mon attaché case. Mais je me faisais sûrement des idées. A l’heure dite, je vis la Volvo noire de Claudine tourner au coin de la place. Je lui ouvris la porte, et elle entra toute pimpante, l’œil pétillant, et m’embrassa d’un baiser léger sur les lèvres, qui n’étaient pas encore maquillées. Je lui servis un café et un croissant tout chaud comme promis.
« Tu n’as pas oublié tes documents ?
—Bien sûr que non. J’ai tout prévu ! » S’en suivit un franc sourire. La route fut agréable, la voiture était spacieuse, confortable et semblait puissante. Elle était très silencieuse, et l’on pouvait se parler sans avoir besoin d’élever la voix. Ça sentait le cuir, le neuf, j’étais bien.
« J’adore cette voiture. Je sens que je vais mettre ma BM à la poubelle. J’aime bien voir mes femmes au volant de voitures de luxe. Je ne comprends pas Linda qui persiste avec son horrible Golf.
—Elle est jeune et elle a les fesses musclées, elle ne sent rien.
—Elle a les fesses très sensibles au contraire, et très douces à caresser.
—Tu vois, la Golf a des qualités ! Mais la Volvo, pour les fesses c’est encore mieux.
—Je vérifierai !
—J’y compte bien !
—Et ta prochaine voiture ?
—Je choisirai la plus confortable, la Velsatis peut être ! Le reste je m’en fiche. A moins que : la Aston Martin James Bond me fait vibrer !!
—Avec les sièges rabattables ?
—Ce n’est plus de mon âge. » La journée se passa très bien, je laissai Claudine mener le jeu. Le client accepta notre invitation à déjeuner dans un restau de la rue de Béthune. On repartit le soir avec notre commande, et le plaisir d’avoir passé une bonne journée. Sur l’autoroute, arrivées à hauteur le l’aire d’Assevillers, Claudine mit son clignotant.
« Tu as besoin de carburant ?
—C’est à peu près ça. » Puis arrêtant la voiture sur le premier parking, elle me regarda et me dit :
« J’ai réservé une chambre à l’hôtel Mercure, au cas où tu me dirais « oui »
—Tu as bien fait Claudine, j’ai envie d’un gros câlin.
—Alors allons-y. » La chambre était assez jolie, et parfaitement insonorisée. Par la fenêtre, on voyait l’autoroute et l’on n’entendait absolument rien. Claudine vint se réfugier tout contre moi. Je lui caressai la nuque, le cou, et quand elle redressa la tête je l’embrassai avec toute la douceur possible. Je l’embrassai, je la regardai, je l’embrassai. Elle était à peine plus petite que moi, et je détaillai son visage qui me sembla d’une jeunesse inattendue. Je me plongeai dans ses yeux d’un vert de jade, qui ne me quittaient pas. On dit aussi des yeux pers, je crois. C’est elle qui parla en premier.
« C’est la première fois, il faudra que tu sois patiente, il faudra que tu m’apprennes, je veux que tu sois heureuse de notre première caresse. » J’étais décidée à faire en sorte qu’elle soit heureuse, j’aimais bien « les premières fois » En général les femmes se donnent avec volonté, sans arrière pensée, totalement. Je dévêtis Claudine avec un maximum de tendresse, pour découvrir une féminité de rêve. Je le fis très lentement, ponctué de bisous et de caresses. Je savais que je provoquerai quelques frissons, et que les seins seraient durs, et dressés vers ma bouche. La poitrine n’était pas extravagante, mais d’une extrême sensualité ; Je comptais les grains de beauté, je respirais son parfum, j’appréciais le satin de sa peau. J’aimais la ligne de ses hanches, et ses cuisses un peu fortes. J’aimais ses bras musclés qui remontaient un peu les épaules. Elle avait le physique original d’une femme qui soigne sa ligne par le sport, elle était de toute beauté. Elle avait pris le parti d’être totalement épilée, (sans doute pour me plaire) et le mont de Vénus très formé, était d’un velours étonnant. Elle paraissait beaucoup plus jeune que son âge, j’étais totalement sous le charme, je bannissais d’emblée, toutes les bonnes raisons qui auraient du me retenir, j’avais envie de fermer les yeux et de mourir d’amour dans ses bras. Je décidai de ne rien faire, de ne pas lui imposer
« ma façon » de faire. Je me souvins de ma première fois avec Michèle, et je lui dis :
« Fais-moi l’amour.
—Mais je ne sais pas.
—Fais comme tu as envie. Il n’y a pas de mode d’emploi. »
Et comme elle avait envie de moi, qu’elle y avait pensé, qu’elle en avait rêvé peut être, elle se jeta à l’eau, et je savourai sa douceur, ses audaces, et je sus comme ça, ce qui lui plaira de ressentir sous mes caresses. Ce qu’elle n’osa pas, je lui réservais, mais je dois dire que j’ai passé des instants de vrai bonheur sous ses doigts et ses lèvres. Il y eut plus d’amour que de performances sexuelles. J’adorais ce genre de rencontre où tout est découverte, surprise, et récompense. C’était une première fois, mais il y eut une seconde, puis une troisième. A la troisième fois, elle eut un orgasme très violent, à la limite de la cascade de plaisir. Elle-même fut étonnée de la puissance de cette réaction, quand elle arrive pour la première fois. Epuisée mais lucide, elle se reposa contre moi, déposant quelques baisers sur mes seins.
« C’était plus fort que je ne l’attendais, c’était impensable il ya quelques heures encore. Je dois être ce soir la femme la plus heureuse de la terre. Je me disais en te regardant vivre, que si toutes ces femmes nourrissaient un tel amour pour toi, c’est qu’il devait y avoir quelque chose ?
« C’est la première fois mon amour, si nous avons la chance de nous aimer encore, tu verras que le plaisir peut grimper à des sommets exceptionnels. C’est l’amour au féminin, c’est l’amour découverte, c’est l’amour sans limites. Cela n’a rien à voir avec l’amour hétéro. C’est une autre planète. Je ne veux pas dire que l’amour hétéro n’est rien, au contraire, mais les sensations sont différentes. Moi j’aime les deux, mais à choisir je reviendrai vers toi sans hésiter.
—Je ne voudrais pas paraître ni jalouse ni indiscrète, mais les autres femmes de l’agence. Tu les aimes toutes autant ?
—Je les aime toutes avec passion, toutes différemment. La seule clé de ces amours, c’est de ne ressentir aucune jalousie. S’il y a le moindre sentiment de jalousie il faut arrêter net, cela ne peut apporter que le malheur. En vérité, nous nous aimons toutes, et nos relations sont quelques fois plurielles.
—Vous faites l’amour à plusieurs ?
—Souvent. C’est une situation que j’aime beaucoup. Faire l’amour avec Lorena et Rosine, c’est un bout de paradis.
—Je n’avais pas pensé que c’était possible.
—C’est possible et assez fréquent. C’est ce qui fait que nous avons des liens très étroits entre nous.
—Je ne sais pas si je pourrais.
—Il n’y a rien d’obligatoire, c’est la liberté totale. Tu y viendras naturellement. Les filles sont amoureuses et n’appartiennent à personne. Elles ne te diront jamais non.
—Alors tu vas me lâcher ?
—Je n’ai pas dit ça, mais si demain tu veux faire l’amour à Linda ou une autre, il n’y aura aucun problème.
—Linda, je suis très attirée par Linda.
—Linda est une belle amoureuse. Elle est fidèle, elle est très excitante. J’ai toujours aimé les filles de couleur, et là c’est un amour incomparable. Et sa petite amie Laurie est délicieuse. Tu sais, toutes les lesbiennes ne sont pas comme nous. J’ai donné ma jeunesse à un seul amour, mon corps réclamait autre chose sans doute. Je t’aime Claudine, et je ne donnerais ma place à personne. Je suis flattée que tu m’aies choisie pour virer ta cuti.
—Sans toi, ça ne serait jamais arrivé. Tu sais, je suis au courant que tu prépares ta sortie de nos vies. Même si je ne retrouve pas de travail, je garderai un souvenir émerveillé de tout ce temps que j’ai passé à tes côtés. La suite m’importe peu. Je veux profiter au maximum du temps qui me reste pour être à toi. Je ne connaitrai jamais les motifs de ta décision, et je pense que si tu le fais c’est qu’il n’y a pas d’autre solution. Tu ne t’es jamais trompée, tu as un sens des affaires exceptionnel. Tu pourras toujours compter sur moi.
—Qu’as-tu dis à Hubert pour expliquer ton absence ?
—Je lui ai dit que je passerai la soirée avec toi. Mais sans plus.
—Tu ne pourras rien lui cacher. Tu n’auras plus jamais le même visage, la même attitude, le même regard. Tous ceux qui t’aiment verront à la première seconde que quelque-chose a basculé dans ta vie.
—Tu le crois vraiment ?
—Bien sûr, tu vas avoir cette aura qui te suivra partout. Et quelques fois, elle te précèdera.
—Mon aura ?
—Cette chose inexplicable qui fait que deux lesbiennes se reconnaissent toujours. Et cette même aura, découragera les hommes de te faire la cour, à moins qu’ils soient homo ou bi.
—C’est étrange, si ce n’était pas toi qui me dise cela, je n’en croirai pas un mot. —Tu verras, en arrivant au bureau demain, toutes les filles le sauront tout de suite. C’est la même chose pour les hommes. Je pense que ton mari s’attend depuis longtemps à ce que nous ayons une aventure. J’aurais eu des remords, si je t’avais draguée par ruse. Mais là, je suis la victime, c’est toi qui a tout fait.
—Oui, j’en suis la première étonnée. Tu es sûre que tu n’aurais pas préféré être avec une autre ?
—J’en suis certaine. Ce soir j’aurai aussi des comptes à rendre.
—Tu as quelqu’un ?
—Oui, j’ai quelqu’un à la maison, quelqu’un que tu connais.
—Je ne vois pas.
—Maud.
—Ta belle mère ?
—Oui, c’est une amoureuse exceptionnelle, je lui dois tout, et je l’adore. C’est une femme cultivée, d’une bonté infinie. C’est la reine de mes amours. Sans elle je ne serais rien.
—Et pourquoi me le dis-tu ?
—Parce qu’il n’y a pas de raison que tu ignores tout de ma vie.
—Et ça a commencé quand ?
—Quelques jours après mon mariage. Mais je l’avais détectée à la première seconde de notre première rencontre. Et si tu as l’occasion de lui faire un câlin, il ne faut pas la perdre.
—Je n’y aurais jamais pensé.
—Toi peut-être mais elle, si ! Elle voit tout, elle comprend tout, rien ne lui échappe. Elle s’occupe bien de ma fille. C’est pour moi une bénédiction. Chose étrange, elle a été le prof de philo de Luigi. Un sale gosse qui la faisait tourner en bourrique.
—Et que dit-elle de ton départ ?
—Je ne lui ai pas dit. Mais je pense qu’elle l’a deviné.
—Avec toi on ne s’ennuie jamais. Je passerais des heures à t’écouter.
—Je ne prétends pas n’avoir fait que des choses bien. Je suis une femme amoureuse, Marie-Noëlle disait que je ne pouvais pas passer à côté d’une fille sans mouiller ma culotte. C’est pour ça que je n’en mets pas souvent.
—Il faudra que tu me parles de Marie-Noëlle. C’est une fille un peu mystique dans l’armée, elle a laissé des marques.
—Oui, et pourtant elle s’y est toujours conduite de façon exemplaire. Je n’arriverais jamais à la cheville de son honnêteté.
—Hubert dis que le colon l’a envoyée au casse pipe.
—Hubert sait tout, il est comme Maud, il comprend tout, il prévoit tout.
—Il sera étonné d’apprendre ton départ.
—Non, il doit déjà le savoir, et lui, il a compris pourquoi. —Tu lui en as parlé ? —Non, pas du tout.
—J’avoue que je ne comprends pas tout.
—Tu comprendras, j’en suis certaine. On se rhabille ou on passe la nuit ici ?
—On se rhabille, c’est plus sage.
—Je vais faire couler le bain. Et on se prendra un repas au restaurant, tu auras toujours un ticket à montrer pour expliquer ton retard. Mais je n’y crois pas beaucoup.
—Un dernier mot, s’il te plait ?
—Oui ?
—Quand vous vous êtes retrouvés le jour de ta libération, Hubert a été correct ? —Il a été très correct. Je sentais qu’il était amoureux, bien qu’ayant toujours eu une attitude hors de tous reproches. Moi j’estimais que je lui devais beaucoup, pour le plaisir que j’avais eu à être sous ses ordres, et la complicité professionnelle que nous avions eu. J’ai cru que je pourrais me montrer reconnaissante. J’étais malgré tout inquiète, car je n’avais jamais eu de rapports avec un homme, j’étais vierge. Et quand je me suis mise en civil, pour être plus jolie je n’ai pas mis de soutien gorge, ce qui l’a troublé. J’ai cru que je lui devais bien, de me laisser aimer s’il en avait envie. Il m’a embrassée, Il a déboutonné mon chemisier pour regarder mes seins, et quand j’ai senti que j’étais dans les bras d’un homme, j’ai eu ce malaise, un étourdissement, mes jambes m’ont lâchée. Il m’a transportée sur le lit, il a reboutonné mon chemisier, et m’a passé des glaçons sur le visage. Il voulait appeler le médecin, mais j’ai refusé. Il est parti avant que Marie-Noëlle ne rentre.
—Et avec ton mari, ça a fait la même chose ?
—J’en avais tellement peur qu’il s’est passé plus d’un an, avant d’accepter de faire l’amour avec lui, et encore, j’y suis allé par petites doses. J’avais pris des leçons.
—Des leçons ?
—Oui, ça fera l’objet d’une autre confidence.
—C’est a peu près ce qu’il m’a raconté. Il m’avait dit qu’il avait admiré tes seins, et ça l’avait rendu fou. Maintenant je comprends pourquoi.
—Ils étaient plus bandants à cette époque !
—Très belle expression. Quand j’étais à coté de toi, tout à l’heure, je me sentais dans cette situation là. Je bandais comme une folle.
—Tu fais de rapides progrès. Allons dans la mousse. » Le repas fut très agréable, dans une salle de restaurant feutrée en lumière tamisée. Claudine était la compagne parfaite. J’étais heureuse d’être avec elle, j’avais bien fait d’accepter ses avances. Le lendemain, au bureau, ça n’a pas manqué. Quand Claudine est arrivée, ce n’était pas la peine de faire un dessin. Les femmes sont parfois étonnantes. Mais toutes semblèrent heureuses, lui sourirent peut être plus qu’à l’habitude, l’embrassèrent de façon plus appuyée. C’est Linda qui osa la première.
« Nous n’avons encore rien fait ensemble que déjà tu me trompes ? Viens m’embrasser ma Claudine et raconte moi. Elle a été gentille avec toi la dame ?
—Oui, très gentille. Elle m’a emmenée au restaurant, et j’ai repris deux fois du dessert !
—Oh alors c’est le grand amour ! Bienvenue au club !» Et le baiser de Linda était très appuyé. Quand j’arrivais, à mon tour, Seule Lorena vint me voir pour me dire :
« Cela veut dire que je suis définitivement sur la touche ?
—Pas du tout, j’attends que tu te reprennes et que tu redeviennes la femme brillante que j’aime à la folie.
—Oui, l’excuse est un peu facile. » Et elle repartit dans son bureau. J’allais retrouver Claudine qui était déjà au travail, élégante et joyeuse. « Bonjour ma chérie, ça va comme tu veux ?
—Oui, très bien mon amour, tu as bien dormi ?
—Comme une montagne et toi ?
—Oui, très bien, Hubert était couché, mais il ne dormait pas. J’ai commencé à lui dire que nous avions fini très tard, et que l’on avait dîné ensemble.
—Alors il m’a répondu :
« J’espère de tout mon cœur qu’elle t’a rendu très heureuse, et que ta vie en sera ensoleillée. Je sais qu’elle n’essaiera jamais de nous séparer, et qu’elle ne mettra pas en péril l’amour que nous avons l’un pour l’autre. Viens contre moi. Et je me suis endormie dans ses bras, et j’étais bien.
—J’ai toujours su qu’il était exceptionnel ce mec ! » Quand je rentrai le soir, j’eus à affronter le chagrin de Maud.
« C’était encore une promesse ? Tu en a encore beaucoup comme ça ?
—Non, c’est la dernière. Il faut que je te parle.
—Au point où j’en suis.
—J’ai mis l’agence en vente. J’ai l’intention de quitter Compiègne début Juillet, et la France en fin d’année au plus tard.
—Et tu m’enterres à quel moment ?
—Je ne peux pas faire autrement. Ma vie ici s’est arrêtée quand Marie-Noëlle est morte.
—Et quelle est la vraie raison pour laquelle tu te sauves ?
—Je ne peux pas te le dire.
—Dis plutôt que tu n’as pas le courage de me le dire.
—Pense ce que tu veux. Je n’ai rien à te reprocher, et je t’aime comme au premier jour.
—Je pense que tu as eu raison. »



Et voilà, l’étonnante perspicacité de Maud.





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Par eve anne
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