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  • : Le blog d'eve anne, Madrid.
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Heure d'Hiver

   

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   L'Hiver

 

 

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Vulnerant omnes
Ultima Necat

 

 

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Je suis comme je suis,
Je plais à qui je plais.

ego sum ego sum
sicut qui similis

 

 

 

 

Bonne Année



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Extraits

 

Rencontre en Forêt
carrefour11

J’ai fait une sortie hier soir en fin d’après midi, et je ne sais pas pourquoi, j’ai pris mon VTT au lieu du vélo. Dans les chemins de la forêt j’ai été doublée plusieurs fois par le même gros 4-4. J’ai eu l’impression que le mec voulait attirer mon attention. J’ai remarqué, au moment où il me doublait qu’il ne portait rien, il était torse nu. Nos regards se sont croisés, Puis il est parti loin devant. Il faisait doux, pas de vent, la forêt sentait bon. . . . . . . . . Un peu après, au coude du chemin, j’ai vu le 4-4 arrêté, dans un endroit où le chemin se rétrécissait, il n’y avait plus de place pour passer à droite, le taillis touchait la voiture, et un tout petit passage à gauche. 

La devise du Quebec
Hôtel du Parlement - Copie

Québec hiver 1876, en fin de matinée le soleil donnait à la ville gelée, les mille feux du diamant. Le froid était vif et les passants emmitouflés étaient peu nombreux. Pourtant, sur le trottoir ensoleillé, un homme ne semblait pas ressentir de gêne à déambuler tête nue, normalement vêtu, ou plutôt anormalement vêtu dans l’air glacé. Il n’avait pas de gants, et son regard bleu était perdu dans le rêve où il flottait. Il tenait à la main un petit rouleau de papier, et ce feuillet enroulé faisait de lui l’homme le plus heureux de la terre. Il suffisait de le regarder pour remarquer le sourire qui illuminait son visage d’homme intelligent et déterminé. Il venait d’avoir quarante ans, son allure était alerte, et son élégance impeccable attirait le regard.

Le testament de Benjamin  Briggs
Le testament de Benjamin Briggs

Les arbres du square Victoria commençaient à dérouler leurs feuilles. Florane-Marie D’Auteuil avançait à pas légers le long de la bordure du trottoir de la rue du Square Victoria. Malgré le soleil qui avait embelli la journée, l’air était encore frais. Elle tenait bien fermé contre sa gorge le col de fourrure de son manteau d’hiver. Florane était la fille d’un diplomate français décédé au cours de l’hiver dernier. Après un séjour de trois ans en Bavière. Elle vivait à Montréal depuis deux ans. Elle s’y plaisait mieux, et il y faisait moins froid qu’à Québec. Elle trouvait aussi la ville plus moderne et plus vivante. Elle ne venait pas souvent dans le parc, elle était généralement occupée dans l’institut où elle travaillait le plus souvent.

 Autoroute du Nord
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Autoroute du Nord, nuit de samedi à dimanche, 2 heures du matin, la chaussée est luisante, la pluie n’arrête pas de tomber, depuis des jours et des jours. Échangeur de Bapaume, les lumières de la cité toute proche se mêlent aux lumières bleues des gyrophares des ambulances et des voitures de gendarmerie. Les clignotants jaunes du Samu, et de puissants projecteurs éclairent une zone d’activité intense. De la fumée, des cris, des ordres jetés, des silhouettes fluorescentes s’agitent dans toutes les directions. Une très forte odeur d’essence s’est répandue, tout se déroule au milieu du bruit infernal des groupes électrogènes et des compresseurs. De l’autre coté du muret central les bolides ralentissent à peine sous l’œil préoccupé des gendarmes trempés.

            La Massane
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Les premières gouttes de l’averse s’écrasaient bruyamment sur les dalles de pierre. Lucile venait de refermer la porte du garage de l’hôtel, il était temps, à peine avait-elle reçu quelques gouttes. Elle adossa son vélo contre le mur et plaça avec soin l’antivol d’acier. Elle remonta directement à sa chambre par l’escalier de service. Il faut dire que l’équipement cycliste bariolé de réclames et de couleurs vives n’est pas tellement seyant pour les femmes habituées naturellement aux arcanes de l’élégance. Elle ouvrit tout de suite la fenêtre, et contempla avec ravissement l’orage au plus fort de sa fureur. Le tonnerre était d’une violence inouïe, et l’écho renvoyé par la montagne toute proche amplifiait les grondements incessants. 

Les Travers de Ms Philipson
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Le trajet entre Paris et Londres en Eurostar n’allait pas être suffisamment long pour calmer l’excitation de Magali. Elle regarda sa montre; dans 5 minutes ce sera le tunnel, et moins d’une heure pour arriver gare de Waterloo. Quinze jours auparavant, Magali avait quitté le lycée un peu plus tôt, pour absence de son professeur d’Anglais. C’est ce qui explique qu’elle ait elle-même ramassé le courrier dans l’entrée de l’immeuble cossu, rue de Turbigo, tout près de la place de la République. Au milieu d’un amoncellement de publicités, journaux, lettres etc, l’une d’entre elles lui était personnellement adressée. C’était une enveloppe anonyme, sans flamme ni cachet, ni marques reconnaissables. Elle attendit d’être à l’intérieur de l’appartement qui surplombait magnifiquement la capitale, pour ouvrir le pli qui, a priori, ne lui disait rien de bon. Elle monta directement dans sa chambre, d’où l’on découvrait toute la partie nord de Paris, jusqu’à la butte Montmartre, à demi visible dans la brume de printemps en cette fin d’après midi.

         La brosse à Dents
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Ce n’était pourtant pas un jour exceptionnel. Un samedi comme un autre, sauf que c’était l’été, que la chaleur était déjà accablante, et que je me sentais légère, en pleine forme et heureuse. Pourquoi ? Je ne saurais le dire, j’étais bien c’est tout. Madrid était une fournaise, mais cela faisait maintenant pas mal de temps que je m’y étais installée, et franchement, je ne regrettais rien. Ma fille était avec moi, et le samedi matin nous avions pris l’habitude de faire nos courses pour la semaine. Il était encore tôt, mais nous n’étions pas pressées, bien qu’étant attendues pour déjeuner à la finca où nous avions nos amis. Nos amis et nos habitudes, c’est là que nous avons logé avant de trouver cette petite villa du nord de Madrid, avec sa petite piscine et ses pins parasols. Cette villa, nous l’avons louée toute meublée. C'est-à-dire avec le minimum, ce qui lui donnait un genre particulièrement spartiate avec ses murs blancs et ses meubles foncés. On s’y était attachées, et pour nous, c’était le paradis. Nous n’avions plus que quelques achats de peu d’importance, mais je devais passer absolument à la pharmacie pour acheter de l’huile solaire.

 Résistance et Trahison
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Le 19 mai 1940 restera à jamais le jour le plus sombre de l’histoire d’Amiens. Tandis que le général de Gaulle, à la tête d’une division blindée, contient l’avancée des troupes allemandes dans le Vimeu et la région d’Abbeville, l’armée nazie bombarde la ville préfecture de la Somme. Tout le centre-ville et les gares de chemin de fer sont rasés. L’ancien secrétaire général de la Somme, Jean Moulin, apprend la nouvelle de la destruction de la ville, et revoit dans ses récents souvenirs la belle cité telle qu’il l’a connue, la préfecture d’Amiens et son propre bureau où il a travaillé au service de l’État. Il n’accepte pas que tout cela soit souillé par la présence ennemie. Amiens s’enfonce dans quatre années de souffrance et de terreur. La communauté amiénoise se divise. Certains acceptent la fatalité. D’autres la refusent et résistent. Et d’autres encore se mettent du côté des plus forts. Jean-Marc Laurent n’a que 16 ans en 1942 lorsqu’il entre dans le réseau “Centurie”. Simple cheminot, il intègre les FTP, unités combattantes clandestines. Il participe à de nombreuses opérations contre l’armée allemande.

  La Chapelle St Domice
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Depuis que Karen avait disparu, Adrianne vivait l'enfer. Elles étaient amies de longue date. Ce qui semblait être pour les autres une camaraderie d'adolescentes était en réalité un grand amour partagé. Karen et Adrianne poursuivaient avec brio leurs études de médecine. L'une serait Sage femme, et l'autre voulait être gynéco. Elles n'en étaient pas encore là, elles avaient encore quelques années à travailler comme des esclaves pour espérer arriver à quelque chose. Karen et Adrianne étaient des filles sans histoire. Discrètes, inséparables, Elles étaient admises et aimées par les étudiants de leur université. Elles étaient lesbiennes disaient quelques-uns, elles étaient amoureuses disaient les autres. Certains, les plus proches, disaient qu'elles s'aimaient passionnément. Toutes deux très jolies, leur sourire n'avait d'égal que le pétillement de leurs prunelles. Elles étaient gaies (joyeuses) elles aimaient la vie, elles aimaient le monde, les fleurs les animaux, elles étaient surtout le reflet du bonheur total. Mais tout cela, c'était avant. Avant ce terrible accident qui emporta en quelques secondes la vie de Karen. . .

              Aneseau
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Tout à côté du lieu dit « La Pierre aux Fées » à quelques pas du vieux château, à la lisière du grand bois qui bordait jadis le village de Folleville, elle vivait dans une pauvre chaumière. « La Vieille Dame » ! C’est ainsi qu’on l’appelait aux alentours, vivait en recluse, et ne sortait que le soir venu. On la craignait. On l’évitait .Elle possédait, dit-on, des pouvoirs démoniaques : « Elle jette des sorts, elle mène les loups les nuits de pleine lune …» C’est ce que l’on chuchotait, à l’abri des regards de peur d’être entendu de La Vieille Dame. Ou peut-être même des adeptes de ses remèdes ou de ses pratiques. En effet, on lui prêtait également bien d’autres pouvoirs, elle n’avait pas son pareil pour combattre la fièvre. De bon matin elle vous faisait marcher dans l’herbe d’un pré couvert de rosée, cueillir par-ci, quelques poignées de feuilles de plantain, les jetant par-là, derrière, sans vous retourner. La pratique était efficace, autant que celle qui consistait à guérir les maux de ventre en prenant à jeun une infusion de la deuxième pelure du sureau qu’elle avait cueilli à la nouvelle lune, en récitant une prière aux saints Côme et Damien.

     Destruction Massive
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Saddam est un homme qui doit être intelligent, et dangereux, Il a déclenché une guerre qu'il n'a pas su gagner, et s'en est pris plein les yeux. C'est maintenant un homme blessé, parce qu'il a perdu devant l'Occident et ça, il ne le pardonnera jamais. Il rumine sa vengeance et son esprit tordu imagine des milliers de scénarios tous plus terrifiants les uns que les autres. Il a beaucoup investi dans la fabrication des armes bactériologiques et chimiques, et les ateliers de fabrication de ces potions tragiques ont été vite reconstitués. Aujourd'hui il tient sa vengeance, il a convoqué ses fidèles pour leur faire part de son plan, leur demandant leur appui pour le mettre à exécution. En ressortant de son bureau, sur les trois "généraux" dans le secret, deux se sont suicidés, pour ne pas avoir à accomplir cette tâche, tant elle était terrifiante, irréversible et incontrôlée. Et le déroulement des opérations a commencé. L'arme absolue: Les Kurdes, et la compassion de l'occident pour les martyrs de l'Irak. Il fallait y penser.

  L'Infirmière d'Ambazac
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« Bonjour, excusez moi de vous déranger, je m’appelle Ghylaine, et je suis infirmière à Ambazac. » Laurence se retourna, et fut surprise de la vision qui s’offrait à elle. La jeune femme était assez jolie, la trentaine, brune et le visage assez fin. Elle était un peu plus grande, très mince, les cheveux mi-longs, coiffés « à la diable ». Le maquillage assez discret, un rouge à lèvres très rouge, les sourcils très noirs, les paupières ombrées. Un grain de beauté sur la lèvre supérieure gauche. Le premier examen était favorable. Ghylaine souriait, Laurence lui rendit son sourire. « Je suis Laurence, et je n’ai pas besoin de piqûres ! Que puis- je pour vous ? —Voilà, je vous ai aperçue au concert d’Aixe-sur-Vienne samedi soir. Je vous ai vue prendre des photos, j’en ai pris aussi, je vous propose que nous les regardions ensemble. » Le sourire ne l’avait pas quittée en prononçant ces mots. Laurence trouva l’idée excellente, quoique peut être un peu intéressée :

      Les Etoiles Eteintes
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Sarah restait dans le mausolée pour mieux méditer. Elle appréciait que le décor soit aussi sobre, que le lieu soit aussi calme, que la lumière soit diffuse, et la fraîcheur aussi agréable. Seul flottait dans l'air ce parfum de géraniums, mêlé à celui de la canne à sucre, omniprésent à Saint-Benoît de La Réunion. Elle tira la porte derrière elle. Coupée du monde extérieur, elle serait mieux pour prier et se recueillir sur la tombe de sa belle amie. Elle aimait ce mur de marbre brut, ce dépouillement de tout objet de culte: pas de croix, pas de Christ, pas de Maries. Dehors, les géraniums en fleur ceinturaient l'édifice, mais dedans, aucune fleur, que la pierre, le marbre, la lumière. Une plaque de bronze sculptée à l'effigie d'une jeune femme aux longs cheveux épars, au visage fin comme l'avait Florane quand elle était arrivée dans sa vie. Pour que cet endroit soit tel qu'il est, Florane avait dû en définir tous les détails elle-même. Sarah pensait que le service des pompes funèbres pourrait peut-être lui donner quelques détails sur les derniers jours de Florane, et peut-être, qui sait, lui faire rencontrer les gens qu'elle connaissait, ou même qu'elle fréquentait ?

      L'Adjudant Moreau
gendarmerie-nationale

Roger Lheureux arriva au 4 rue de Seclin. Il était 9 h 15. L’ouverture de la centrale était à huit heures. Quand il lança un « salut » à la ronde, aucun de ses collègues ne lui répondit. Roger n’était pas à proprement parler un bon copain, mais il était le numéro deux de la centrale syndicale départementale, et à ce titre, il était plus craint que respecté. Ce qui choquait ses collègues de travail, c’est qu’il arrivait régulièrement en retard, et généralement dans un état de violence éthylique mal dissimulé. Chaque matin, Roger faisait une halte au « Café de la Savonnerie » situé juste en face de l’usine qui produisait des millions de tonnes de lessive en poudre. Dans ce café, nul besoin de passer sa commande, le patron vous sert d’emblée un café accompagné d’une « bistouille ». La bistouille étant ce petit verre de genièvre qu’il fallait boire en premier lieu et vider le second verre dans le café. Souvent on remettait ça, et après la deuxième ou troisième bistouille, on allait travailler. À cette époque, les accidents du travail étaient nombreux, et bien sûr, l’employeur était toujours l’unique responsable.

        Un Douze Avril
Joëlle et moi

Un 12 avril …. Oui c’était un 12 avril, je m’en souviens très bien, c’était le jour d’anniversaire de ma maman, et j’étais allée déposer une potée de tulipes sur sa tombe, des tulipes perroquets rouges et blanches, ses préférées. C’était la fin de l’après midi, à l’heure où le soleil, bas sur l’horizon, allonge les ombres, et colore la nature du vert jaune des feuilles naissantes, du bleu de ciel et de blanc nuages. Il faisait beau, il faisait doux. Sur l’autoroute il y avait peu de circulation ou du moins elle était fluide. Pas d’excès de vitesse, j’étais en balade. Je rentrais chez moi, il me restait tout juste une demi-heure de trajet. J’arrivai à proximité d’une aire de repos : « Aire de Tilloloy Ouest » et machinalement je mis le clignotant, je ralentis dans la chicane et débouchai sur le grand parking. Je m’arrêtais souvent à cet endroit, d’abord parce que sur mon trajet habituel je n’ai pas tellement le choix, mais surtout pour le bois qui entoure ce parking, c’est vraiment très forêt, c’est superbe.

            Joyeuse Noelle
Joyeux Noelle

Pour moi, Noel est rarement joyeux. Ici, là où je vis, à Madrid, La Navidad se fête bien entendu, mais ce n'est pas le même Noel qu'en France. Les jouets pour les enfants sont offerts le jour de l'épi Fanny, La Navidad est surtout une fête religieuse, où la messe de minuit se paie l'intérêt général. Autre raison et pas des moindres, ma grande fille rejoint son père en France. Ainsi elle ne souffre pas d'un dépaysement total. Voir son père, c'est bien vite dit. C'est un homme orgueilleux, très occupé, pas du tout papa gâteau. Mais Axelle a le coeur sur la main et elle accepte avec le sourire l'accueil réservé de son papa. Heureusement, le papa s'est remarié, forcément, il avait besoin d'une esclave pour lui porter le café au lit. Cette esclave s'appelle Rachel. C'est une de mes amies, elle est très belle, nous nous aimons beaucoup, en secret bien sûr. Je crois qu'elle est plus jolie que moi, un peu plus jeune il est vrai, Nous nous voyons rarement maintenant que je suis expatriée. Elle s'occupe très bien de ma fille, elle l'adore, elle n'a pas d'enfant, tous ses efforts n'ont jamais abouti. Rachel est pharmacienne. Son officine n'était pas très loin de mon immeuble, ainsi je ne rechignais jamais à aller me chercher les rares médicaments que je prenais. J'ai toujours fait beaucoup de sport. Du vélo, de la piscine. C'est ce qui me vaut sans doute d'être encore présentable aux 44 ans que je viens de fêter il y a deux jours. Rachel aussi fait du sport, mais en vraie compiégnoise, elle a choisi de faire du cheval.

         Le Petit Laurent
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Entre son bonnet bleu et son masque de chirurgien, on ne voyait que ses yeux noirs. Pourtant, quand il tournait son regard sombre vers l’une ou l’autre d’entre nous, on comprenait instantanément ses désirs, sans qu’il eût prononcé la moindre parole. J’étais devant lui, et j’étais l’assistante de l’autre chirurgien qui lui faisait face. L’entente des deux hommes était remarquable, c’était le meilleur « bloc » de tout l’hôpital. Je passais les instruments qu’on me réclamait, tout en essayant de ne pas regarder le champ opératoire, je ne m’y habituerai jamais. Pourtant, délimité par le drap bleu ciel et les linges blancs tâchés de rouge, l’ouverture ne ressemblait à rien que l’on puisse identifier, sans être du métier. Moi je ne l’étais pas, je passais les outils, comme une autre fille aurait pu le faire aussi bien. Et pour ne pas regarder l’opération en direct, je portais les yeux sur le chirurgien aux yeux noirs, ou sur son assistante qui me faisait face, dont les yeux étaient d’un bleu sauvage. De l’assistante on ne voyait que la proéminence de son imposante poitrine.

 Le Chaos de Targasonne
Le Chaos de Targasone

Sur les hauteurs des Pyrénées-Orientales, la Cerdagne est un vaste plateau ensoleillé, un encorbellement entre le mont du Carlit, et celui de Puigmal, tous deux culminants aux alentours de 3000 mètres. La Cerdagne est à une altitude de 1600 mètres en moyenne, et elle a la particularité d’être une région fertile, bien que de haute montagne, puisque l’on y récolte des céréales, du blé principalement. On y vient de Perpignan par la route qui monte à Font Romeu, ou par le côté Espagnol en traversant l’Andorre. Dans la partie occidentale de la Cerdagne, on trouve un lieu particulièrement mythique, « Le Chaos de Targasonne » Plutôt qu’un lieu, on pourrait dire un pays, voire une région, puisqu’il s’étend sur 50km. Le Chaos est un amoncellement de roches granitiques -par exemple- dont l’origine et la formation ne paraissent pas évidentes. Curieusement, on trouve aussi ce genre de relief dans la forêt de Fontainebleau ou dans la Lozère.

        Le Coupe Chou
Le coupe chou-1

S’il existe un lieu magique à Paris, c’est bien la gare de Lyon. Pas cette gare TGV souterrainement austère et sans âme, mais la gare de surface, la vraie, celle qui fait vibrer le cœur dès que l’on aperçoit l’horloge, du boulevard. J’ai toujours aimé les trains, depuis ma plus tendre enfance quand, avec mes parents et ma sœur, nous partions à la mer. La Gare de Lyon à l’heure des grands départs est habitée d’un esprit particulier. Peut-être est-ce simplement la concentration des voyageurs en attente. C’est cette odeur particulière, faite d’humanité, d’ozone et de poussière. Ce grand espace face aux quais, animé de ses panneaux affichant les horaires, et les milliers d’yeux, levés vers les chiffres verts qu’ils ne semblent pas comprendre. Et puis ce sont tous ces jeunes avec sacs au dos, assis sur les murets des escaliers descendant au sous-sol. Ils fument, ils mangent d’énormes sandwiches, vident quantité de boîtes de bière ou de Coca. Ils dorment ou s’embrassent, l’amour des fois, se fout du décor. En haut de l’escalier, ce superbe restaurant : « Le Train Bleu » qui fit briller de ses ors, la redoutable Nikita, alias Anne Parillaud.

            Jolie Luna
Lena Gercke

Sur les pavés de la place St Jacques, Rachel avait beaucoup de difficulté à marcher avec ses talons aiguilles, et se casser un talon maintenant, ne serait pas pour lui remonter le moral ! Rien n’allait vraiment bien depuis une semaine. Elle avait du mal à effacer de son esprit ce qui s’était passé, et ce soir-là, elle n’avait pas envie de rentrer chez elle, et de se retrouver seule avec ses idées noires. Sa petite fille était pour le week-end chez sa grand-mère. Elle entra dans le café le plus proche. Le Coq d’Or l’un des plus joliment décorés de la ville. Elle n’était pas une habituée des lieux, d’ailleurs elle entrait rarement dans un café. Il y avait du monde, de la musique jazzy, de la fumée, comme dans tous ces endroits-là, en fin d’après-midi. Elle s’approcha difficilement du bar et demanda un Tonic. Le barman la servit, puis, son verre à la main, elle chercha dans la salle un endroit libre pour se poser.

            La Mante
Les DrusCouleur

Je la reconduisis à la porte. Les quelques pas qu’elle fit devant moi suffirent à provoquer mes plus secrètes fêlures. Sa démarche, ses bottines à hauts talons, son jean élimé aux fesses, ses fesses rondes perchées sur des jambes interminables, ce perfecto, qui était choisi sans doute uniquement pour mettre ses fesses en valeur, et cette chevelure de jais, coupée court, très bas sur la nuque, avec cette mèche savamment rebelle qu’elle remettait en place d’un mouvement de tête des plus étudié. Deux anneaux dorés apparaissaient alternativement au rythme de son pas décidé…..Elle s’arrêta sur le palier, se retourna… Gros plan sur une poitrine agressive, moulée dans un pull col roulé blanc. Visage bronzé, ses yeux noirs lancèrent un éclair, histoire d’humaniser son sourire crispé. Elle commença à descendre les degrés, je fermai la porte appuyai mon front sur le chambranle, et je restai ainsi les yeux fermés, imprégnée de ces images qui repassaient en boucle, dans mon souvenir immédiat.

      Les Jeux de St Elme
Les Jeux de St Elme

Juin 1999 ! décès de mon père, puis en octobre, celui de ma mère. Après 63 années de mariage, la pauvre femme n'a sans doute plus estimé utile de continuer à vivre. Ils ont ainsi rejoint au paradis, leur fille décédée neuf ans plus tôt, à l'âge de quarante-huit ans. Il avait quatre-vingt-sept ans, elle en avait quatre-vingt-deux. Ils ont donc élevé trois enfants : deux filles et le garçon que je suis. Quelques mois plus tard, il fallut se décider à tirer un trait sur la matérialité de leurs existences : Vendre la maison où nous avons grandi, et la débarrasser de tous les meubles et objets leur ayant appartenu. Voir la maison de notre enfance complètement vide fut pour ma sœur et moi, une douloureuse épreuve. Au moment de charger les derniers cartons, ma sœur me désigna celui qui était resté un peu à l'écart.

     Les Jours de Liesse
Les Jours de Liesse

Il faisait un temps superbe ce jour-là. Dans la petite bourgade de Saint André, cette petite ville touristique de Haute-Provence près du lac du Castillon, la saison touristique était à peine commencée. Pourtant, il y avait pas mal de monde en ville, et déjà quelques nageurs courageux dans les eaux glacées. Pour certains c’était déjà les vacances, mais pour d’autres, le travail était encore d’actualité. Il faisait déjà chaud. Pourtant, la ville est à neuf cents mètres d’altitude. Le soleil comme toujours dans cette région était de la partie. Derrière les baies vitrées des bureaux, les employés commençaient à souffrir de la chaleur. Heureusement, la matinée de travail touchait à sa fin. Guillaume avait l’impression que ses clients étaient convaincus, et qu’il remporterait ce marché difficile. Il était assez fier de cette présentation. Bien sûr, il n’était pas seul à avoir réussi à établir ce climat de confiance, qu’il sentait maintenant installé chez ses interlocuteurs.

   Les Tricots de Marguie
Les Tricots de Marguie

Marguerite Dupain était une femme au grand cœur. Pourtant on ne peut pas dire qu’elle avait été gâtée par la vie. Née de parents miséreux de la région de Douai, à Goeulzin plus exactement, elle avait, toute sa jeunesse, traîné ses galoches le long du canal, trouvant dans cette campagne ouvrière tous les motifs qui pouvaient alimenter ses rêves. Elle s’imaginait par exemple qu’un intrépide marinier l’emporterait un jour sur sa péniche, et l’emmènerait ainsi de l’autre côté du monde, là où il n’y aurait que joies et que richesses. Son père, fut l’un des derniers ouvrier de la dernière brasserie du village, et comme bien souvent, il était le meilleur client de son patron.

   Le Miracle Impossible
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C'est ainsi que Jésus parvint dans une ville de Samarie appelée Sychar, non loin de la terre donnée par Jacob à son fils Joseph, là même où se trouve le puits de Jacob. Fatigué du chemin, Jésus était assis tout simplement au bord du puits. C'était environ la sixième heure.Arrive une femme de Samarie pour puiser de l'eau. Jésus lui dit: "Donne-moi à boire." Ses disciples, en effet, étaient allés à la ville pour acheter de quoi manger.Mais cette femme, cette Samaritaine lui dit: "Comment? Toi, un Juif, tu me demandes à boire à moi, une femme samaritaine!" Les Juifs, en effet, ne veulent rien avoir de commun avec les Samaritains.Jésus lui répondit: "Si tu connaissais le don de Dieu et qui est celui qui te dit: "Donne-moi à boire", c'est toi qui aurais demandé et il t'aurait donné de l'eau vive."La femme lui dit: "Seigneur, tu n'as même pas un seau et le puits est profond; d'où la tiens-tu donc cette eau vive?

          Noire d'Ecume
Noire d'écume

Voyager est sûrement ce qui me motive le plus. Lorsque j'ai choisi de faire ce métier, je n'y avais pas spécialement songé, ou alors, ce n'était pas l'élément fondamental de mon choix. Et pourtant, c'est ce qui m'apporte le maximum de joies. J'adore voyager. Me rendre au pied levé dans telle ou telle ville, dans ce pays ou un autre, est pour moi le plus grand des plaisirs. Ce n'était pas a priori évident. Il faut apprendre à voyager, comme il faut acquérir l'envie de voyager. Tout ce que l'on va rencontrer sera un étonnement. Je ne dis pas un enchantement, puisque sur notre terre, il se trouve malheureusement quantité d'endroits d’où l'on a plus envie de fuir plutôt que de séjourner. Quand j'ai su que je devais me rendre à Cadix (Cadiz en espagnol), j'ai ressenti ce petit pincement au cœur, signe de plaisir intense. Ce n'était pourtant pas la première fois. Je m'y étais déjà rendue, en coup de vent, une seule journée, et je m'étais juré d'y revenir. Cette fois, j'étais décidée à rester le temps qu'il faudrait pour la visiter, et pour en ressentir l’ambiance et le passé.

              Soledad
Roissy

Elle est moche cette voiture, avec cette inscription comme un tatouage ridicule à l’arrière « Taxis Lefèbvre » « Longues distances » « Roissy-Compiègne » C’était une Espace Renault, ce gros machin carré qui, à peine parti était déjà arrêté deux cents mètres plus loin au premier feu rouge. C’était comme une hésitation, cette voiture arrêtée. C’était la dernière chance, soit d’en descendre, soit de courir pour la rattraper. Mais Jane ne bougea pas, et personne n’en descendit. Les yeux pleins de larmes, elle ne distinguait plus nettement le véhicule. Elle le vit repartir, tourner au coin de la rue et disparaître. Axelle lui serrait la main comme pour dire, « ne pleure pas je suis là ». Ce n’était pas la première fois que sa « tata » partait en voyage. Mais Jane bien sûr ne lui avait pas dit que ce départ était le dernier, et qu’il n’y aurait pas de retour. Ainsi va la vie des gens qui assument leurs choix, la vie est unique, il n’est pas toujours écrit qu’une rencontre change forcément la vie, la vie se vit en suivant le chemin décidé. La vie ne change pas toujours de vie.

              Manon
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Quand la boîte aux lettres fut ouverte, les trois quarts de son contenu se répandirent sur le sol. Manon se baissa, difficilement, car les talons et la jupe serrée ne sont pas spécialement faits pour cet exercice. Elle ramassa un à un tous les journaux de pub de télé, toutes les propositions des mages de la région, toutes ces enveloppes pleines de factures, et d’autres feuillets divers. Au beau milieu de ce fatras, un document attira son attention. Elle le plaça sur le haut de la pile que sa main contenait avec difficulté. Puis elle referma la boîte, se dirigea vers l’ascenseur, après avoir pianoté le digicode. Elle retrouva avec délice l’appartement illuminé de soleil, avec son parquet brillant, ses jolis rideaux de voile de lin, ses fleurs et ses tableaux, sa bonne odeur de parfums et de cire, cette odeur si caractéristique des alcôves féminines. Manon posa le tout sur la table du salon, et partit dans la salle de bain au cas où quelque réparation serait nécessaire. Il fallait qu’elle se change pour aller faire quelques courses au Champion tout proche. Ceci étant fait, elle jeta un coup d’œil sur le document qu’elle avait ramassé.

            Fait Divers
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A 300km /heure, le Thalys filait vers Bruxelles en longeant l’autoroute du Nord. Dans le compartiment de première classe, confortablement installé, bercé par le ronronnement régulier du TGV, Albert se laissait aller à sommeiller. Il adorait ce train, où le confort était parfait, le seul endroit où il savait pouvoir réellement se reposer. Il faut dire que sa vie était quelque peu agitée, et le stress prenait souvent le relais de la volonté et de la détermination. Il était installé sur le fauteuil à coté de la vitre qui donnait coté autoroute. Il savait que les voitures qu’il voyait, roulaient au moins à 150km/h. Pourtant, il avait l’impression qu’elles allaient au ralenti. Il remarqua une BMW qui sur la file de gauche doublait toutes les voitures avec une aisance étonnante. Malgré tout il la perdit de vue très rapidement. Sur les fauteuils de l’autre coté de l’allée, il y avait deux jeunes femmes, qui se regardaient en se parlant à voix basse, quelques fois un sourire illuminait les visages.

 

Les Dryades

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J'ai déjà par mes nouvelles, abordé beaucoup de sujets. Peut être font-ils partie de "tout le reste". Je ne suis pas une fervente admiratrice de Simone de Beauvoir, (sauf quand le rôle est tenu par la divine Anna Mouglalis) et je ne me reconnais pas dans les féministes de tous bords. Pourtant, s'il y a un trait de ma personnalité qui surclasse tous les autres, c'est bien mon amour de la femme. Je suis lesbienne donc, puisque c'est l'étiquette que l'on colle aux tribades modernes, mais là encore, ce n'est pas vraiment ça, puisque je suis mariée, et j'ai une fille d'un premier mariage. Je tiens à vivre ma vie comme tout le monde, le plus simplement possible. J'allais dire le plus "normalement" possible, mais je sais que cela aurait fait bondir certaines âmes guerrières. Rassurez-vous, je ne vise personne. Une vie de famille, c'est ce que j'ai toujours souhaité, en faisant la part de ma vie et de mon autre vie. Mon alter ego est une entité qui existe, qui influe bien évidemment sur mon autre vie. J'espère simplement que personne autour de moi, n'en souffre. Si quelqu'un ignore ma bisexualité, c'est que ça ne l'intéresse pas, car je ne dissimule rien, je vis comme ça vient. Je vis au grand jour, et j'aime au grand jour. Je n'ai aucune arrière-pensée, aucune envie de dissimulation. "Je roule plein phares". Ma devise pourrait être le titre de ce blog, "O me quieres O me dejas. Ce qui veut dire en clair, "Ou tu m'aimes ou tu me laisses". C'est d'autant plus facile à comprendre que je vis en Espagne, banlieue de Madrid près de l'aéroport. Je suis en Espagne depuis 6 ans bientôt. Je m'y suis installée pour raison professionnelle, quand l'envie m'est venue de faire "autre chose, autrement". Ce n'est pas pour raconter ma vie, mais plutôt pour raconter mon histoire, ce qui bien sûr, est différent. Je ne suis pas une pro des blogs. Il y a encore quelques mois, j'ignorais tout de cette façon de s'exprimer. J'avais vu bien sûr les merveilles réalisées par ma belle amie Ana, et sans ce stupide accident qui m'a clouée durant quelques semaines, je ne me serais jamais lancée dans cet exercice. 

 

Chapitre 1

Les Demoiselles de St Ladre

 

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Samedi 15 décembre 2007 La petite route était noire et luisante au milieu de toute cette neige grisâtre. À peine dégagé, le ruban d’asphalte était étroit, et les voitures se croisaient avec difficultés. Il avait neigé fortement depuis le début de ce mois de décembre. Déjà, mi-novembre, quelques flocons avaient blanchi la campagne. Et depuis, une neige très fine, humide et pénétrante, n’arrêtait pas de tomber, virevoltante au moindre souffle de vent. Ce n’était pas suffisant pour recouvrir la route abondamment salée, mais assez pour effacer en une journée toutes les traces de la veille. La circulation n’était pas très intense, il semblait que l’activité, comme la nature, s’était endormie. Il faisait froid et humide, d’autres précipitations importantes, peut-être neigeuses, étaient attendues. Le ciel était gris bien sûr, et la nuit ne tarderait pas à accabler le paysage d’un sombre avenir. Les arbres des taillis tendaient désespérément leurs squelettes vers de gros nuages terrifiants. Depuis les quinze jours que la neige était omniprésente, la plupart des branches de ces arbres nus avaient perdu leur chargement de poudre blanche. Et pour d’autres, il suffisait d’un souffle de vent pour qu’elles se dévêtissent, dans un chuintement à peine perceptible. La petite route reliait la départementale à la petite ville de Cagny. C’était un raccourci bien pratique qui permettait de rejoindre le parking de la gare de Longueau. À quelques centaines de mètres de la station, la route était surplombée par cet immense viaduc qui enjambait la vallée marécageuse. Ce que l’on appelait la rocade, mais en réalité c’était l’autoroute qui contournait la ville par le sud en surplombant la vallée. Le flot des véhicules épargnait ainsi le centre-ville qui, à grands frais, avait été tristement abandonné aux piétons. Parallèlement à la route, sur un remblai de quelques mètres, la ligne de chemin de fer émergeait tout juste, elle aussi, de la couche de neige. On ne distinguait que les rails, les traverses n’étaient plus visibles qu’à de rares endroits. Comme la petite route, les voies s’engouffraient sous le viaduc dans la direction de Paris. De l’autre côté des voies, la falaise de craie du plateau picard ajoutait sa grisaille au décor ambiant. En face, dans la vallée, le marais. Cette immense étendue d’étangs constitue le lit de la rivière qui coule sa tranquillité dans la réserve Saint-Ladre, avant de se mêler à la Somme à Camon, entre Longueau et Amiens. 

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Le  Testament de Benjamin  Briggs.


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Adélaïde Sud Australia

 

Dimanche 19 mai 1901

 

 

159540tn_Sarah60ans.jpgC'était le début de la saison froide à Adélaïde. Enveloppée dans son châle, Sarah était à demi allongée sur le canapé d'osier au beau milieu de la terrasse de cette magnifique demeure de style victorien. Elle venait là tous les matins, régulièrement depuis 27 ans. De cette terrasse, elle avait une vue étendue vers la mer. C'était la raison de son choix, quand elle avait fait construire cette immense maison : pouvoir contempler l'océan. Sarah, sans jamais l'avoir avoué, attendait, qu'un navire apparaisse à l'horizon, elle était sûre que malgré le progrès, ce serait un navire comme les goélettes de jadis, avec de jolies voiles gonflées de vent. Tout le monde dans la maison savait ce qu'elle attendait, mais personne n'en parlait jamais. Ce matin là, il se passerait quelque chose de particulier : Une messe serait dite dans la chapelle de la propriété. Sophia Mathilde serait là avec son fiancé Maxime, Arthur serait là également avec sa jeune femme et son fils. Et puis le mari de Sarah, Lusciano.
Personne ne savait pourquoi, ce jour là, la petite chapelle regorgerait de fleurs. Sarah n'avait pas envie d'en parler, elle était perdue dans ses pensées, elle vivait dans un autre monde.
Seul peut être Lusciano aurait pu deviner, mais il ne se sentait pas tellement concerné. Ce qui était de bons souvenirs pour Sarah, ne l'était pas forcément pour lui.
Pendant toute la durée de l'officie, Sarah resta à genoux, le rosaire entre les doigts.
Puis enfin, après que le prêtre eut prononcé son « ite missa es », la famille se dirigea vers la salle à manger, où avait été dressé une table de fête.
Sarah venait d'embrasser ses enfants et petits enfants, d'adresser quelques mots désagréables à son mari, et donné des ordres à ses domestiques. Ils se réunirent au salon pour prendre « l'apéritif ». Sarah quitta la pièce un moment, elle n'avait plus absorbé d'alcool depuis qu'elle était arrivée dans ce pays.
Elle retourna sur la terrasse, la mer l'attirait encore plus aujourd'hui que les autres jours.
Et cette fois là, elle distingua un point sur l'horizon. Cela ne pouvait être un navire marchand ou militaire, un panache de fumée en aurait signalé l'approche. Cela ne pouvait être qu'un voilier, un baleinier ou autre navire de pêche, qui utilisait encore la voile, qui était mieux adaptée et moins coûteuse que le charbon.  Elle sourit, et retourna rejoindre ses invités. Son obsession de la mer finira par avoir raison de sa santé.
Sarah était encore une très jolie femme. Elle venait d'avoir soixante ans, et elle avait bien vieilli. La taille serrée, la gorge imposante, elle était toujours vêtue avec goût, et ses manières étaient celles d'une dame de la haute Société. Sarah d'Aveiro Cobb, était aussi immensément riche, peut être la plus grosse fortune de la ville, ou même de l'Australie britannique.
Le repas fut généreux et de bon goût. Sarah suivait des yeux chacun de ses invités. Sa préférée de tous, Sophia Mathilde, excessivement jolie, avait reçu en héritage la beauté de sa maman, et sa ligne d'une féminité sculpturale. Elle avait de jolis yeux noirs, si jolis que Maxime, son benêt  de fiancé ne les quittait pas des yeux. En regardant le jeune homme, Sarah haussait les épaules, et pensait que « décidément, le temps ne les avait pas rendus plus séduisants » Elle parlait des hommes évidemment. Bien qu'étant l'épouse du Commandant d'Aveiro, ses soupirants étaient nombreux. Et Sarah répétait comme une litanie :
« Je passe beaucoup de mon temps à être désagréable avec ce genre de prétendants. »
Elle proposa d'aller prendre le café sur la terrasse. Une nuée de serviteur dressèrent la table et approchèrent les fauteuils.
Elle regarda l'horizon. Le navire était toujours là, la tâche avait grossi, le navire approchait.
« Que regardez-vous Sarah ? » demanda Lusciano.
- Je me demande si c'est un aviso ou une frégate ? Vous, le roi des Pirates, pardon des Corsaires, qu'en pensez vous ?»
Lusciano partit dans une autre pièce et revint avec une longue vue.
« Vous n'avez pas raison ma chère, ce n'est ni l'un ni l'autre. C'est un gréement de goélette, visiblement un navire de croisière. Un sentimental de la marine à voiles sans doute.
A ces mots, les sens de Sarah se mirent en éveil. Elle ne quitta plus la terrasse, et observa pendant des heures le voilier qui faisait route sur Adélaïde. Les vents n'étaient pas favorables, et le marin tirait des bords pour se rapprocher de la cote. Ses invités quittèrent la maison, mais elle n'était pas sûre de les avoir embrassés. 511813tn_Sophia.jpg Seule Sophia Matilde resta à ses côtés. Elle ne savait pas le pourquoi des attentes de sa mère, mais instinctivement elle en sentait l'importance. Le soir tombait, on ne distinguait plus rien que les lumières de la ville légèrement au dessous. Adélaïde est d'un relief plutôt plat, seule une petite montagne surplombe la ville. C'est sur le flanc de cette montagne que Sarah fit construire sa demeure. Elle l'avait baptisée d'un nom dont personne ne connût jamais la raison. « Victoria Place »

Seul le Commandant d'Aveiro savait ce qu'était le tourment de Sarah. Mais il n'en parla jamais à personne. Et personne ne s'enquit auprès de lui. Mais ce nom, lui-même  en ignorait l'origine. Le lendemain, il faisait soleil. Sarah se précipita sur la terrasse. Plus trace du voilier : soit il était au port, soit il avait continué sa route.
« Dommage » pensa Sarah, 
« Je me suis encore fait des idées. Je ne sais pas pourquoi je m'entête à cultiver une légende. Ce qui a été ne peut revenir, c'est simplement une chance que ça ait existé »
La matinée de ce mardi se passa comme les autres jours. Sarah s'était levée de bonne heure, et dès sept heures du matin, elle était dans son vaste bureau au siège de la banque, dont elle exerçait elle-même la direction. Le bureau était d'un luxe inouï, avec, ce qui étonnait beaucoup les visiteurs, de très grands portraits de célébrités. Et quand on lui faisait compliment de ses goûts, elle répondait :
« Ne vous laissez pas impressionner,  c'est du toc ! » 
 Et les gens repartaient rassurés.
Vers les dix heures, la directrice adjointe demanda à être reçue.
« Madame, il y a en bas un homme qui veut absolument vous rencontrer. Il dit que c'est important. Je pense que c'est encore un parvenu qui veut vous soutirer quelque argent.
- Oui, bien sûr ma chère Hortense, mais aujourd'hui je suis de bonne humeur. Faites le monter. Et faite le asseoir sur le sofa en face du miroir.
Sarah laissa le visiteur  poireauter quelques instants, se leva, fit pivoter le tableau qui faisait face à son bureau, et contempla le visiteur à travers le miroir sans tain.

687Lucien.jpgC'était un homme jeune, avec beaucoup d'allure, habillé à la dernière mode, visiblement il venait d'Europe, « Il n'y a que les français pour montrer autant d'élégance » pensa t'elle. Le visage avait les traits fins, Sarah eut le sentiment qu'elle l'avait déjà vu. Il avait le cheveu clair, Il ne portait pas de barbe mais la moustache. Un œillet blanc remplaçait sa pochette.
« Entrez monsieur, Que puis je pour vous ?
- Oh, pas grand-chose Madame, je vous présente mes respects, et demande votre pardon de vous déranger pour si peu. Je suis venu simplement pour vous remettre un message. J'ai parcouru la moitié du globe pour vous le remettre en main propre. Je vous prie d'ailleurs de m'excuser, mais j'avais promis de vous le remettre hier.
Sarah se mit à trembler violemment, et sembla perdre l'équilibre. Le jeune homme se précipita et avança un fauteuil.
« Excusez moi, ce n'est rien, j'ai quelques fatigues ces temps ci.
- Voulez vous que je vous laisse, ou que j'appelle quelqu'un ?
- Non, je vous en prie, demeurez. »
Sarah serra le pli sur son cœur, et se décida à rompre le cachet.
Quelques mots seulement occupaient le centre du message.
«  Je demande ton pardon, j'en ai besoin pour aller où je vais. Je t'aime. Florane. »
Sarah sentit que les meubles et les murs commençaient une valse infernale. Elle s'évanouit.
Le jeune homme appela. La directrice adjointe se trouvait encore tout près, sans doute écoutait-elle à la porte. Le jeune homme avait récupéré le message, il ne devait être lu que par Sarah.
Le médecin arriva et recommanda de reconduire Sarah chez elle pour qu'elle s'y repose.
Le jeune homme demanda à l'accompagner. Le médecin haussa les épaules,
« Pourquoi pas ? »
Sarah eut besoin de plusieurs heures pour reprendre vie. Quand elle sortit de sa chambre, on lui dit qu'un jeune homme l'attendait au salon. Mais si elle le voulait, on pouvait l'éconduire.
« Non je le reçois à l'instant. »
« Excusez-moi Monsieur de vous faire perdre votre temps !
« Mon temps vous appartient madame. »
Sarah sourit en entendant la phrase.
« Pouvez vous me dire qui vous êtes Monsieur ? »
Le jeune homme hésita un moment.
« Je suis Lucien Benjamin D'Auteuil. Pour vous servir Madame.
-Lucien Benjamin d'Auteuil ? Vous êtes le fils de...............Florane Marie d'Auteuil ? »
- Oui Madame, son fils unique.
Sarah sentait dans sa poitrine que les battements se son cœur allaient s'accélérant.
« Vous êtes venu seul ?
- Oui Madame
- Votre Père ?
- Il est ici, m'a-t-on dit, je ne le connais pas, je ne l'ai jamais rencontré. »
Sarah tourna le dos de la façon  la plus impolie, mais elle ne voulait pas laisser voir son visage tordu de douleur.
Il se passa un temps qui parût très long à Lucien. Mais celui-ci comprenait la douleur de Sarah et attendit qu'elle fût en état de poursuivre. Elle avait un petit mouchoir de dentelle avec lequel elle essayait d'éponger ses larmes. Puis elle se retourna.
- Et Votre mère, pourquoi ne vous a-t-elle pas accompagné ?
- Elle a quitté ce monde l'an passé. »
« Mon Dieu » s'écria Sarah en faisant le signe de la croix.
« C'est trop pour une seule journée. Auriez vous ces jours prochains, quelques heures  à me consacrer, ou êtes vous pressé par le temps ?
- Je suis venu à bord du voilier que m'a laissé ma mère. Il est au port, il peut m'attendre.
- C'est vous qui êtes arrivé hier dans la soirée ?
- Oui madame, je suis confus, à quelques heures près....
- Ne le soyez pas monsieur. Revenez me voir demain à la Banque Victoria, là où l'on s'est rencontré ce matin. Disons vers les dix heures. Est-ce que cela vous agrée ?
- Parfaitement, Madame, je vous présente mes hommages.
Lucien benjamin prit congé, et Sarah se réfugia sur la terrasse, enveloppée dans son châle, mais pour la première fois elle ne regardait plus l'horizon, c'était devenu inutile. Elle avait les yeux perdus, beaucoup plus loin, dans le passé, quelques jours après un violent cyclone. Le soir venu, Lusciano venait de rentrer de sa tournée, il salua son épouse :

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« On m'a dit que vous avez eu de la visite ? Qui était-ce ?
- C'était votre fils.
- Mon fils ? Grand dieu si j'en avais un, je serais le plus heureux des hommes.
- Réjouissez-vous mon ami, vous en avez un !
- Si quelqu'un se prétend être mon fils, ça ne peut être qu'un imposteur.
- Même si sa mère s'appelle Florane ?
- Mon dieu !
- Oui comme vous dites mon ami, mais je crois que Dieu n'y est pour rien. Lorsque Florane nous a quitté à Saint Benoît, elle portait votre enfant.
- Mais c'est impossible.  C'est une machination. Quelqu'un d'autre a du lui faire cet enfant.
- Florane avec un autre homme ? Vous délirez mon ami !
- Et pourquoi ne serait ce pas possible ?
- Parce que vous êtes le père, en plus il vous ressemble.
- Florane vous avait rejoint parce qu'il vous fallait une femme. Il n'était pas prévu qu'elle tombe amoureuse de vous. Mais c'est arrivé. Elle vous a aimé à la folie. Et vous n'avez fait que la décevoir ! Elle avait un cœur immense, une volonté de fer, vous n'avez fait que la mépriser ...... et l'engrosser.
- Je ne pouvais agir autrement.
D'après les dates que m'a fournies le jeune homme, Florane était enceinte de près d'un mois quand elle nous a quittés, et elle le savait forcément. Sachant cela et devant votre conduite irresponsable, elle n'avait pas d'autre choix que de nous quitter.
- Florane était une criminelle dangereuse.
- Ne soyez pas ridicule, Florane a eu le courage que nous n'avons pas eu. En plus elle vous a sauvé la vie.
- Et comment cela ?
- Quand elle nous a surpris ensemble, elle ne vous a pas tué.
- J'avais mon épée.
- Vous plaisantez, Florane n'a pas eu peur de votre épée, pas plus qu'elle n'a eu peur des trois cents livres du marin. Quand nous étions à Montréal, elle ne craignait personne à l'épée. Je le sais parce que nous avons pratiqué l'escrime ensemble.
- Vous ?
- Oui moi, je ne suis pas que la gourde qui vous a épousé ! Et la vérité c'est qu'elle ne vous a pas tué parce qu'elle pensait que je vous aimais.
- Je ne crois pas à cette histoire.
- Libre à vous de mourir idiot. Florane n'est plus, c'est la seule chose qui m'attriste.
- C'est une machination !
- Qu'importe puisque l'on ne vous demande rien.
- On me demande quand même d'être le père....
- Non, personne ne vous demande rien, Commandant. »
Lusciano savait que lorsqu'elle l'appelait « Commandant » c'était que la colère était proche.
Il préféra sortir en claquant la porte.
« L'imbécile ! Comment ai-je pu être aussi stupide ? Florane, ma belle Florane, mon bel amour, comment as-tu pu me laisser vivre si loin de  ton amour ?
Le lendemain à dix heures sonnantes, Lucien était à la porte du bureau de Sarah. Elle le fit entrer.
« On s'embrasse ?»
- Avec plaisir, par quoi voulez vous commencer ?
- Quelques questions préliminaires.
- Je vous écoute.
- Que savez-vous de notre histoire, celle qui nous a liées, votre mère et moi ?
-Tout Je crois. Ma mère avait souhaité que je n'ignore rien de sa vie, je pense qu'elle m'a tout dit. Peut être pas ses moments d' intimité, mais tout le reste oui.
- Vous savez alors quelle est la signification de votre prénom ?
- Certainement, Lucien est le nom de mon père -en français- et Benjamin le nom de votre mari, pour lequel elle avait une grande admiration. Elle a d'ailleurs bien insisté en précisant qu'il n'y avait jamais eu d'aventure entre elle et votre mari.
- Elle vous a raconté notre voyage, ses motifs, son déroulement, ses surprises ?
- Oui, dans le détail. C'est une belle aventure. Dommage que vous ne l'ayez pas terminée ensemble.
- Croyez bien que je le regrette, et ça depuis toujours.
- Et pour vous apporter le sourire, sachez que La Marie Céleste a été retrouvée intacte quinze jours après l'avoir abandonnée, et qu'elle est bien classée dans les vaisseaux fantômes. Les hypothèses les plus farfelues ont fleuri de partout.
- Nous nous sommes séparées vous le savez à saint Benoît après le cyclone. Florane savait qu'elle attendait un enfant, elle ne l'avait dit à personne. Et comme le Commandant avait jeté son dévolu sur moi, désespérée, elle a quitté le navire en compagnie de Paloma, une jolie danseuse rencontrée sur le navire.
- Oui, elle m'en a parlé, C'est elle qui m'a mis au monde, m'a-t-on dit. Elle a accompagné ma mère pendant une dizaine d'années. C'était une femme très douce. Elle a quitté ma mère pour une tournée à travers le monde, on ne l'a jamais revue.
- Et nous, nous avons gagné l'Australie directement. Ma servante à l'époque, ma belle Amiya, a repris le bateau pour l'Inde, le pays de sa famille.
- Oui, mère 'a souvent parlé d'Amiya et de son extraordinaire beauté.
- Il est dans mes projets également de tenter de la retrouver.
- Vous savez aussi, bien sûr, quelle était la nature du chargement de notre navire ?
- Oui bien sûr.
- Dés que nous sommes arrivés ici, tout a été très vite. En Australie, quand on a de l'argent on peut tout faire, tout de suite. J'ai donc pu bâtir un empire financier. Lusciano est resté avec moi, et ensemble nous avons géré notre fortune, mais il n'y eut plus jamais d'amour. Notre amour a sombré à Saint Benoît.
Quand je dis notre fortune, cela comprend la vôtre également et celle d'Amiya. J'ai bloqué l'argent qui doit vous revenir, et l'ai fait prospérer. Vous êtes immensément riche, et nous devons cette chance au courage de votre mère.
- Ma mère m'a parlé de cet or que vous avez transporté. Elle m'a dit que si vous m'en parliez, elle vous faisait savoir qu'elle ne revendiquait pas le moindre penny. Elle prétend que vous avez été plus heureuse à Montréal qu'avec une fortune sous les pieds.
- C'est la vérité. Mais tout cet or était là, il fallait bien en faire quelque chose, et je ne vous apprends rien en vous disant qu'il vaut mieux être riche que le contraire. Je ne connaissais pas  tous les projets de mon mari, et j'ai essayé de faire pour le mieux. Si je n'avais pas eu cette occupation, je serais morte depuis longtemps.
Actuellement, nous avons une banque, où nous nous trouvons actuellement, nous sommes présents dans les industries du luxe, nous avons des mines de cuivre et les usines de traitement, une ferme d'élevage de moutons, avec neuf mille têtes, nous avons des terres de culture, de deux cent milles acres, nous avons plusieurs navires de commerce, nous prêtons à l'état, et nous occupons trois mille salariés.
Mais tout cela, pour reprendre une expression célèbre, c'est du toc ! Si on me proposait d'échanger tout cela pour revivre l'amour que j'ai vécu avec Florane, je n'hésiterais pas une seconde. »
Lucien sourit à cette évocation.
« Et votre mari, vos enfants ?
- Mes enfants étaient là hier. Si vous aviez été à l'heure, vous les auriez
rencontrés. Vous ferez leur connaissance. Après tout, vous êtes un peu de la famille.
Quant à mon époux, le Commandant, je ne l'ai jamais vraiment aimé. Je lui ai cédé, c'était une bêtise qui m'a coûté l'amour de Florane. Je l'ai payée pendant trente ans. Ce n'est pas un mauvais homme, mais après avoir aimé Florane, je ne pouvais aimer quelqu'un d'autre, homme ou femme.
- Seriez vous choqué monsieur d'entendre parler de l'amour que peut ressentir une femme pour une autre femme ?
- Pas du tout, Je n'ai jamais vu ma mère aimer un homme, et je ne m'en trouve pas plus mal.
- Et que lui est il arrivé ?
- Elle est décédée de maladie. Après avoir beaucoup souffert.
- Mais qu'a-t-elle fait toute sa vie ?
- Elle a repris la charge de son père, et elle a été diplomate pour le gouvernement Français.
- C'est comme ça que j'ai voyagé dans le monde.
- Ma mère et moi avons dû apprendre l'Italien, le Russe et le Japonais. J'en oublie peut être, elle parlait couramment huit langues.
- Le pays où nous avons séjourné le plus longtemps fut l'Argentine, quand elle vivait avec Paloma. Paloma était dans son pays, une très grande artiste, une danseuse renommée. Elle était très célèbre dans tous les pays hispaniques. Elle a toujours été dévouée. Sans elle, ma mère serait morte.
- J'y ai souvent songé. Cette femme a sûrement aimé Florane...............Qui ne l'aurait pas aimée ?
- Et ce voilier avec lequel vous êtes venu ?
- J'en ai hérité de ma mère. C'est elle qui l'a fait construire. C'est une réplique le La Marie Céleste. Elle était une experte en navigation. Nous avons fait de très longues croisières. Nous avons dû faire plusieurs fois le tour du monde.
Et comment s'appelle-t-il ?
- Presque comme votre maison, le « Victoria Square. » c'est curieux non ?
-Pas tellement. Votre mère avait le goût des symboles. Allons déjeuner voulez vous ? Je suis heureuse de vous inviter dans votre restaurant.
- Mon restaurant ?
- Votre restaurant Lucien, il faut vous faire à cette idée que la moitié de la ville vous appartient.
- Je pense que votre réussite vous honore.
- Ne vous laissez pas impressionner, c'est du toc !
- Du toc ?
-Oui, ne faites pas attention, je radote un peu. »
Le restaurant était un lieu de luxe feutré. Il avait le style Français dans un décor anglais.
«  C'est du toc aussi ? » Demanda Lucien.
-Oui, bien sûr, le toc c'est tout ce qui est luxe dont je pourrais me passer, c'est-à-dire à peu près tout.
- Le restaurant s'appelait «  Rue du Molinel »
- Ce qui veut dire ?
- La  rue du Molinel, est une grande rue de Lille où votre mère est née. Vous ne le saviez pas ?
- Pour Lille oui, pour la rue non. Je vois jusqu'où sont allées vos confidences.
- Mon mari dit que vous êtes un imposteur. Moi je ne le crois pas.
- S'il le croit, c'est dommage, mais cela n'a aucune importance, puisque je ne revendique rien. Je suis simplement venu vous porter un message, vous parler de ma mère, et faire votre connaissance. Mais je vais vous montrer quelque chose. Peut être l'ai-je volé également ? » 47725TN_SarahCross.jpg

Lucien sortit de sa poche, un écrin à bijoux, et le tendit à Sarah. Sarah poussa un immense soupir en contemplant le bijou. Une croix d'émeraudes avec 4 diamants. Elle dévissa le pied de la croix et sortit le billet écrit de sa main. Elle ne se souvenait plus exactement des mots, mais elle fit la relation avec le message de Florane.
« En guise de pardon, je lui donne mon amour pour l'éternité. »

Et vous Monsieur, quel est votre métier ?
« Diplomate actuellement, mais je compte me lancer dans l'industrie automobile qui est me semble t il d'un très grand avenir.
- Oui, votre choix est judicieux. Nous suivons ce sujet de très près.
- Ma mère a amassé une confortable fortune. Partout où elle s'est installée elle a créé là une industrie, là des cultures, son empire est immense.
J'en suis fort impressionnée. Votre mère était une femme extraordinaire.
Nous allons repartir chez moi, mais faites moi visiter votre goélette. S'il vous plait.
- Avec grand plaisir Madame. »

Le « Victoria Square », était effectivement la réplique de la Marie Céleste. Un peu moins longue peut être, mais les mêmes proportions, la même ligne parfaite.
A l'intérieur, tout avait été reconstruit à l'identique. Pas de luxe, le confort est resté celui d'il y a trente ans. Sur la table à cartes, le compas, le chronomètre et le sextant portent les initiales BSB : Benjamin Spooner Briggs. Dans la cale, une petite quantité d'eau est embarquée. En voyant l'air amusé de Sarah, Lucien expliqua.
« C'est une volonté de ma mère. Elle m'a affirmé que le navire ne pouvait voguer sans cela. »
Dans la cabine, un placard, et dans ce placard une robe sur un cintre : La robe bleu marine de Sarah.
« Voilà pourquoi je ne la trouvais plus...... » Dit elle avec le sourire.
« Lucien, acceptez vous de passer la soirée à la maison ? Je vais prévenir ma fille, mon mari de toute façon sera là, Arthur habite trop loin.....
-Avec grand plaisir. »
Le reste de la journée passa en confidences réciproques.

............. Florane se sentant partir, avait occupé ses derniers jours à préparer le voyage de son fils. Et ses dernières heures à lui répéter sans cesse ce que Sarah devait savoir. Elle avait un doute : que Sarah ne reçoive pas Lucien. Mais elle espérait le contraire. Un amour comme le leur ne pouvait exister à sens unique.
« Où avez-vous élu domicile ?
Nous avons vécu partout. La terre entière est notre domicile. Actuellement je suis en mission en Afrique du Nord, mais ma maison se trouve à La Rochelle. Le plus joli port de France.
« Je croyais que c'était Marseille ?
- Pour le commerce oui, mais pour le romantisme, la Rochelle est mieux. ! Et puis c'est sur l'océan.
- La sépulture de votre mère s'y trouve ?
- Non, la sépulture de ma mère se trouve à Saint Benoît, Elle a choisi ce lieu parce que c'est là que mon père l'a rejetée. Elle  repose dans un mausolée dans le petit cimetière de la ville.
- C'est là que je l'ai abandonnée aussi. Dieu me pardonne. J'ai vécu ce remord toute ma vie. »
Le soir était venu, avec la fraîcheur de saison. Les invités sont arrivés, Sophia et son fiancé, Lusciano, et quelques autres personnes proches de la maison.
Lucien fut présenté comme le fils de la  grande amie et associée que Sarah avait connue au Canada.
Et les papotages commencèrent dés l'apéritif. Lucien, qui ne semblait pas tellement intéresser les convives, devint la vedette quand les invités apprirent qu'il était français. Il parla beaucoup de Paris, de ses voyages, de sa ville d'adoption, de son métier, un peu de politique, Mais il ne parla pas de sa mère. Sarah ne le quittait pas des yeux, étudiant avec soin sa façon de se comporter. Elle vit qu'elle n'était pas la seule, Sophia Matilda semblait en admiration.
De tout le repas, Lusciano n'avait pas desserré les dents.
Lucien quitta la maison pour rejoindre son hôtel. Dès qu'il fut parti, Sarah s'adressa à Lusciano :
« Je vous fais mes compliments Commandant, pour la façon dont vous avez accueilli votre fils.
Il vous faudra pourtant vous habituer à sa présence. J'ai maintenant l'âge et l'occasion de laisser la place à plus jeune que moi. Ce garçon me parait tout à fait qualifié pour prendre la direction de notre empire. Et puis, je pense que les surprises ne sont pas finies ..... Je vous salue Commandant»
Le matin de bonne heure, on déposa un pli à la réception de l'hôtel.
« Mon cher Lucien. Il n'est pas possible que vous repartiez avant que nous n'ayons eu l'occasion de nous rencontrer et de nous entretenir. J'ai des quantités de chose à vous dire, et quantité de questions à vous poser.»
C'était signé : Sophia Matilda.
Et au même moment Sarah lisait le message laissé par Sophia Matilda.
« Mère, je ne comprends pas que vous ne m'ayez jamais parlé de ce Monsieur Lucien.
Je suis sous le charme, et lui ai demandé de surseoir à son départ. »
Sarah sourit : « J'en étais sûre. »
Lucien accepta de prolonger son séjour. Il rencontra Sophia Matilda. Ce fut le coup de foudre immédiat. Pendant près d'un mois, ils ne se quittèrent plus. Sarah regardait grandir cette passion avec satisfaction. Elle fut totalement heureuse lorsque Maxime fut définitivement éconduit.
La semaine suivante, les fiancés étaient sortis en mer pour une croisière de quelques jours et une escale dans l'île de Tasmanie, qui venait tout juste de rejoindre l'état Australien. Sarah voulut en  profiter pour se changer les idées, et se  fit conduire au nouveau théâtre de la ville, où était présenté un tout nouveau spectacle de Flamenco et autres danses typiques des pays hispaniques.
Dans le hall du théâtre, elle lut avec attention les affiches qui présentaient le spectacle.
Une phrase parmi d'autres attira son attention :
« Un ballet mis en scène par Paloma Maya Vargas »

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Sarah fut prise d'un léger tremblement. « Et si c'était............. » Le spectacle fut un enchantement. Sa nouveauté, la beauté de ses danseuses, la qualité des chants, ravirent la totalité des spectateurs de la haute société d'Adélaïde. Ce n'était pas souvent que l'on pouvait voir  un spectacle original de cette qualité. A la fin, Sarah attendit que la salle fût vide, et demanda à être conduite auprès de Paloma Maya Vargas. Comme elle était la mécène du théâtre, on ne put lui refuser.
Dans la loge, il y avait beaucoup de monde, beaucoup de fleurs, et beaucoup de jolies danseuses. Paloma aperçut Sarah  qui venait de pénétrer dans la pièce. Elle se leva, n'en croyant pas ses yeux.
« Sarah ? Est ce bien vous ?
- Oui Paloma, vous n'avez pas changé. Toujours aussi jolie ! Mes compliments pour votre spectacle. »
Le bruit des voix était élevé. Paloma entraîna Sarah par la main dans l'alcôve qui jouxtait la loge.
« Sarah, je trouve que vous n'avez pas tellement changé non plus, toujours ce regard de braise, et cette silhouette.... Si vous saviez combien de fois j'ai souhaité vous revoir !
- C'est la même chose pour moi. Notre rencontre fut brève, mais suffisante pour que vous ayez marqué mon souvenir.
- Sarah, je suis si heureuse de vous voir. Peut être pourrez vous me donner des nouvelles de Florane, êtes vous toujours ensemble ? Mon dieu quel bel amour vous avez vécu ! Florane m'a tellement parlé de vous. Votre souvenir l'a privé d'autres amours. Que devient-elle ?
- Florane est décédée l'an passé. Je l'ai appris seulement le mois dernier. Et d'ailleurs, à cette occasion on m'a beaucoup parlé de vous ! Quelle coïncidence quand même ! Le monde est véritablement petit.
- Et qui vous a parlé de moi, et qui vous a appris cette triste nouvelle ?
- Lucien Benjamin, le fils de Florane, il est arrivé ici il y a deux mois. »
Le regard de Paloma était devenu fixe, et son visage était d'une pâleur extrême.
«  Et quel âge a ce garçon ?
- Vous le savez bien, il a une trentaine d'année, il m'a dit que vous aviez assisté sa mère pour le mettre au monde. »
Paloma resta un moment silencieuse. Son visage était maintenant crispé. Elle prit d'une main tremblante le poignet de Sarah.
« Que Dieu nous protège Sarah, J'ai vécu dix années d'une douce  complicité avec Florane, Une complicité totale mais sans vraiment d'amours. Et je puis vous jurer par tous les saints que

Florane n'a jamais eu d'enfant. »

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Par eve anne
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