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  • : Le blog d'eve anne, Madrid.
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Heure d'Hiver

   

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   L'Hiver

 

 

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Vulnerant omnes
Ultima Necat

 

 

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Je suis comme je suis,
Je plais à qui je plais.

ego sum ego sum
sicut qui similis

 

 

 

 

Bonne Année



BonneA              

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Extraits

 

Rencontre en Forêt
carrefour11

J’ai fait une sortie hier soir en fin d’après midi, et je ne sais pas pourquoi, j’ai pris mon VTT au lieu du vélo. Dans les chemins de la forêt j’ai été doublée plusieurs fois par le même gros 4-4. J’ai eu l’impression que le mec voulait attirer mon attention. J’ai remarqué, au moment où il me doublait qu’il ne portait rien, il était torse nu. Nos regards se sont croisés, Puis il est parti loin devant. Il faisait doux, pas de vent, la forêt sentait bon. . . . . . . . . Un peu après, au coude du chemin, j’ai vu le 4-4 arrêté, dans un endroit où le chemin se rétrécissait, il n’y avait plus de place pour passer à droite, le taillis touchait la voiture, et un tout petit passage à gauche. 

La devise du Quebec
Hôtel du Parlement - Copie

Québec hiver 1876, en fin de matinée le soleil donnait à la ville gelée, les mille feux du diamant. Le froid était vif et les passants emmitouflés étaient peu nombreux. Pourtant, sur le trottoir ensoleillé, un homme ne semblait pas ressentir de gêne à déambuler tête nue, normalement vêtu, ou plutôt anormalement vêtu dans l’air glacé. Il n’avait pas de gants, et son regard bleu était perdu dans le rêve où il flottait. Il tenait à la main un petit rouleau de papier, et ce feuillet enroulé faisait de lui l’homme le plus heureux de la terre. Il suffisait de le regarder pour remarquer le sourire qui illuminait son visage d’homme intelligent et déterminé. Il venait d’avoir quarante ans, son allure était alerte, et son élégance impeccable attirait le regard.

Le testament de Benjamin  Briggs
Le testament de Benjamin Briggs

Les arbres du square Victoria commençaient à dérouler leurs feuilles. Florane-Marie D’Auteuil avançait à pas légers le long de la bordure du trottoir de la rue du Square Victoria. Malgré le soleil qui avait embelli la journée, l’air était encore frais. Elle tenait bien fermé contre sa gorge le col de fourrure de son manteau d’hiver. Florane était la fille d’un diplomate français décédé au cours de l’hiver dernier. Après un séjour de trois ans en Bavière. Elle vivait à Montréal depuis deux ans. Elle s’y plaisait mieux, et il y faisait moins froid qu’à Québec. Elle trouvait aussi la ville plus moderne et plus vivante. Elle ne venait pas souvent dans le parc, elle était généralement occupée dans l’institut où elle travaillait le plus souvent.

 Autoroute du Nord
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Autoroute du Nord, nuit de samedi à dimanche, 2 heures du matin, la chaussée est luisante, la pluie n’arrête pas de tomber, depuis des jours et des jours. Échangeur de Bapaume, les lumières de la cité toute proche se mêlent aux lumières bleues des gyrophares des ambulances et des voitures de gendarmerie. Les clignotants jaunes du Samu, et de puissants projecteurs éclairent une zone d’activité intense. De la fumée, des cris, des ordres jetés, des silhouettes fluorescentes s’agitent dans toutes les directions. Une très forte odeur d’essence s’est répandue, tout se déroule au milieu du bruit infernal des groupes électrogènes et des compresseurs. De l’autre coté du muret central les bolides ralentissent à peine sous l’œil préoccupé des gendarmes trempés.

            La Massane
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Les premières gouttes de l’averse s’écrasaient bruyamment sur les dalles de pierre. Lucile venait de refermer la porte du garage de l’hôtel, il était temps, à peine avait-elle reçu quelques gouttes. Elle adossa son vélo contre le mur et plaça avec soin l’antivol d’acier. Elle remonta directement à sa chambre par l’escalier de service. Il faut dire que l’équipement cycliste bariolé de réclames et de couleurs vives n’est pas tellement seyant pour les femmes habituées naturellement aux arcanes de l’élégance. Elle ouvrit tout de suite la fenêtre, et contempla avec ravissement l’orage au plus fort de sa fureur. Le tonnerre était d’une violence inouïe, et l’écho renvoyé par la montagne toute proche amplifiait les grondements incessants. 

Les Travers de Ms Philipson
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Le trajet entre Paris et Londres en Eurostar n’allait pas être suffisamment long pour calmer l’excitation de Magali. Elle regarda sa montre; dans 5 minutes ce sera le tunnel, et moins d’une heure pour arriver gare de Waterloo. Quinze jours auparavant, Magali avait quitté le lycée un peu plus tôt, pour absence de son professeur d’Anglais. C’est ce qui explique qu’elle ait elle-même ramassé le courrier dans l’entrée de l’immeuble cossu, rue de Turbigo, tout près de la place de la République. Au milieu d’un amoncellement de publicités, journaux, lettres etc, l’une d’entre elles lui était personnellement adressée. C’était une enveloppe anonyme, sans flamme ni cachet, ni marques reconnaissables. Elle attendit d’être à l’intérieur de l’appartement qui surplombait magnifiquement la capitale, pour ouvrir le pli qui, a priori, ne lui disait rien de bon. Elle monta directement dans sa chambre, d’où l’on découvrait toute la partie nord de Paris, jusqu’à la butte Montmartre, à demi visible dans la brume de printemps en cette fin d’après midi.

         La brosse à Dents
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Ce n’était pourtant pas un jour exceptionnel. Un samedi comme un autre, sauf que c’était l’été, que la chaleur était déjà accablante, et que je me sentais légère, en pleine forme et heureuse. Pourquoi ? Je ne saurais le dire, j’étais bien c’est tout. Madrid était une fournaise, mais cela faisait maintenant pas mal de temps que je m’y étais installée, et franchement, je ne regrettais rien. Ma fille était avec moi, et le samedi matin nous avions pris l’habitude de faire nos courses pour la semaine. Il était encore tôt, mais nous n’étions pas pressées, bien qu’étant attendues pour déjeuner à la finca où nous avions nos amis. Nos amis et nos habitudes, c’est là que nous avons logé avant de trouver cette petite villa du nord de Madrid, avec sa petite piscine et ses pins parasols. Cette villa, nous l’avons louée toute meublée. C'est-à-dire avec le minimum, ce qui lui donnait un genre particulièrement spartiate avec ses murs blancs et ses meubles foncés. On s’y était attachées, et pour nous, c’était le paradis. Nous n’avions plus que quelques achats de peu d’importance, mais je devais passer absolument à la pharmacie pour acheter de l’huile solaire.

 Résistance et Trahison
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Le 19 mai 1940 restera à jamais le jour le plus sombre de l’histoire d’Amiens. Tandis que le général de Gaulle, à la tête d’une division blindée, contient l’avancée des troupes allemandes dans le Vimeu et la région d’Abbeville, l’armée nazie bombarde la ville préfecture de la Somme. Tout le centre-ville et les gares de chemin de fer sont rasés. L’ancien secrétaire général de la Somme, Jean Moulin, apprend la nouvelle de la destruction de la ville, et revoit dans ses récents souvenirs la belle cité telle qu’il l’a connue, la préfecture d’Amiens et son propre bureau où il a travaillé au service de l’État. Il n’accepte pas que tout cela soit souillé par la présence ennemie. Amiens s’enfonce dans quatre années de souffrance et de terreur. La communauté amiénoise se divise. Certains acceptent la fatalité. D’autres la refusent et résistent. Et d’autres encore se mettent du côté des plus forts. Jean-Marc Laurent n’a que 16 ans en 1942 lorsqu’il entre dans le réseau “Centurie”. Simple cheminot, il intègre les FTP, unités combattantes clandestines. Il participe à de nombreuses opérations contre l’armée allemande.

  La Chapelle St Domice
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Depuis que Karen avait disparu, Adrianne vivait l'enfer. Elles étaient amies de longue date. Ce qui semblait être pour les autres une camaraderie d'adolescentes était en réalité un grand amour partagé. Karen et Adrianne poursuivaient avec brio leurs études de médecine. L'une serait Sage femme, et l'autre voulait être gynéco. Elles n'en étaient pas encore là, elles avaient encore quelques années à travailler comme des esclaves pour espérer arriver à quelque chose. Karen et Adrianne étaient des filles sans histoire. Discrètes, inséparables, Elles étaient admises et aimées par les étudiants de leur université. Elles étaient lesbiennes disaient quelques-uns, elles étaient amoureuses disaient les autres. Certains, les plus proches, disaient qu'elles s'aimaient passionnément. Toutes deux très jolies, leur sourire n'avait d'égal que le pétillement de leurs prunelles. Elles étaient gaies (joyeuses) elles aimaient la vie, elles aimaient le monde, les fleurs les animaux, elles étaient surtout le reflet du bonheur total. Mais tout cela, c'était avant. Avant ce terrible accident qui emporta en quelques secondes la vie de Karen. . .

              Aneseau
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Tout à côté du lieu dit « La Pierre aux Fées » à quelques pas du vieux château, à la lisière du grand bois qui bordait jadis le village de Folleville, elle vivait dans une pauvre chaumière. « La Vieille Dame » ! C’est ainsi qu’on l’appelait aux alentours, vivait en recluse, et ne sortait que le soir venu. On la craignait. On l’évitait .Elle possédait, dit-on, des pouvoirs démoniaques : « Elle jette des sorts, elle mène les loups les nuits de pleine lune …» C’est ce que l’on chuchotait, à l’abri des regards de peur d’être entendu de La Vieille Dame. Ou peut-être même des adeptes de ses remèdes ou de ses pratiques. En effet, on lui prêtait également bien d’autres pouvoirs, elle n’avait pas son pareil pour combattre la fièvre. De bon matin elle vous faisait marcher dans l’herbe d’un pré couvert de rosée, cueillir par-ci, quelques poignées de feuilles de plantain, les jetant par-là, derrière, sans vous retourner. La pratique était efficace, autant que celle qui consistait à guérir les maux de ventre en prenant à jeun une infusion de la deuxième pelure du sureau qu’elle avait cueilli à la nouvelle lune, en récitant une prière aux saints Côme et Damien.

     Destruction Massive
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Saddam est un homme qui doit être intelligent, et dangereux, Il a déclenché une guerre qu'il n'a pas su gagner, et s'en est pris plein les yeux. C'est maintenant un homme blessé, parce qu'il a perdu devant l'Occident et ça, il ne le pardonnera jamais. Il rumine sa vengeance et son esprit tordu imagine des milliers de scénarios tous plus terrifiants les uns que les autres. Il a beaucoup investi dans la fabrication des armes bactériologiques et chimiques, et les ateliers de fabrication de ces potions tragiques ont été vite reconstitués. Aujourd'hui il tient sa vengeance, il a convoqué ses fidèles pour leur faire part de son plan, leur demandant leur appui pour le mettre à exécution. En ressortant de son bureau, sur les trois "généraux" dans le secret, deux se sont suicidés, pour ne pas avoir à accomplir cette tâche, tant elle était terrifiante, irréversible et incontrôlée. Et le déroulement des opérations a commencé. L'arme absolue: Les Kurdes, et la compassion de l'occident pour les martyrs de l'Irak. Il fallait y penser.

  L'Infirmière d'Ambazac
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« Bonjour, excusez moi de vous déranger, je m’appelle Ghylaine, et je suis infirmière à Ambazac. » Laurence se retourna, et fut surprise de la vision qui s’offrait à elle. La jeune femme était assez jolie, la trentaine, brune et le visage assez fin. Elle était un peu plus grande, très mince, les cheveux mi-longs, coiffés « à la diable ». Le maquillage assez discret, un rouge à lèvres très rouge, les sourcils très noirs, les paupières ombrées. Un grain de beauté sur la lèvre supérieure gauche. Le premier examen était favorable. Ghylaine souriait, Laurence lui rendit son sourire. « Je suis Laurence, et je n’ai pas besoin de piqûres ! Que puis- je pour vous ? —Voilà, je vous ai aperçue au concert d’Aixe-sur-Vienne samedi soir. Je vous ai vue prendre des photos, j’en ai pris aussi, je vous propose que nous les regardions ensemble. » Le sourire ne l’avait pas quittée en prononçant ces mots. Laurence trouva l’idée excellente, quoique peut être un peu intéressée :

      Les Etoiles Eteintes
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Sarah restait dans le mausolée pour mieux méditer. Elle appréciait que le décor soit aussi sobre, que le lieu soit aussi calme, que la lumière soit diffuse, et la fraîcheur aussi agréable. Seul flottait dans l'air ce parfum de géraniums, mêlé à celui de la canne à sucre, omniprésent à Saint-Benoît de La Réunion. Elle tira la porte derrière elle. Coupée du monde extérieur, elle serait mieux pour prier et se recueillir sur la tombe de sa belle amie. Elle aimait ce mur de marbre brut, ce dépouillement de tout objet de culte: pas de croix, pas de Christ, pas de Maries. Dehors, les géraniums en fleur ceinturaient l'édifice, mais dedans, aucune fleur, que la pierre, le marbre, la lumière. Une plaque de bronze sculptée à l'effigie d'une jeune femme aux longs cheveux épars, au visage fin comme l'avait Florane quand elle était arrivée dans sa vie. Pour que cet endroit soit tel qu'il est, Florane avait dû en définir tous les détails elle-même. Sarah pensait que le service des pompes funèbres pourrait peut-être lui donner quelques détails sur les derniers jours de Florane, et peut-être, qui sait, lui faire rencontrer les gens qu'elle connaissait, ou même qu'elle fréquentait ?

      L'Adjudant Moreau
gendarmerie-nationale

Roger Lheureux arriva au 4 rue de Seclin. Il était 9 h 15. L’ouverture de la centrale était à huit heures. Quand il lança un « salut » à la ronde, aucun de ses collègues ne lui répondit. Roger n’était pas à proprement parler un bon copain, mais il était le numéro deux de la centrale syndicale départementale, et à ce titre, il était plus craint que respecté. Ce qui choquait ses collègues de travail, c’est qu’il arrivait régulièrement en retard, et généralement dans un état de violence éthylique mal dissimulé. Chaque matin, Roger faisait une halte au « Café de la Savonnerie » situé juste en face de l’usine qui produisait des millions de tonnes de lessive en poudre. Dans ce café, nul besoin de passer sa commande, le patron vous sert d’emblée un café accompagné d’une « bistouille ». La bistouille étant ce petit verre de genièvre qu’il fallait boire en premier lieu et vider le second verre dans le café. Souvent on remettait ça, et après la deuxième ou troisième bistouille, on allait travailler. À cette époque, les accidents du travail étaient nombreux, et bien sûr, l’employeur était toujours l’unique responsable.

        Un Douze Avril
Joëlle et moi

Un 12 avril …. Oui c’était un 12 avril, je m’en souviens très bien, c’était le jour d’anniversaire de ma maman, et j’étais allée déposer une potée de tulipes sur sa tombe, des tulipes perroquets rouges et blanches, ses préférées. C’était la fin de l’après midi, à l’heure où le soleil, bas sur l’horizon, allonge les ombres, et colore la nature du vert jaune des feuilles naissantes, du bleu de ciel et de blanc nuages. Il faisait beau, il faisait doux. Sur l’autoroute il y avait peu de circulation ou du moins elle était fluide. Pas d’excès de vitesse, j’étais en balade. Je rentrais chez moi, il me restait tout juste une demi-heure de trajet. J’arrivai à proximité d’une aire de repos : « Aire de Tilloloy Ouest » et machinalement je mis le clignotant, je ralentis dans la chicane et débouchai sur le grand parking. Je m’arrêtais souvent à cet endroit, d’abord parce que sur mon trajet habituel je n’ai pas tellement le choix, mais surtout pour le bois qui entoure ce parking, c’est vraiment très forêt, c’est superbe.

            Joyeuse Noelle
Joyeux Noelle

Pour moi, Noel est rarement joyeux. Ici, là où je vis, à Madrid, La Navidad se fête bien entendu, mais ce n'est pas le même Noel qu'en France. Les jouets pour les enfants sont offerts le jour de l'épi Fanny, La Navidad est surtout une fête religieuse, où la messe de minuit se paie l'intérêt général. Autre raison et pas des moindres, ma grande fille rejoint son père en France. Ainsi elle ne souffre pas d'un dépaysement total. Voir son père, c'est bien vite dit. C'est un homme orgueilleux, très occupé, pas du tout papa gâteau. Mais Axelle a le coeur sur la main et elle accepte avec le sourire l'accueil réservé de son papa. Heureusement, le papa s'est remarié, forcément, il avait besoin d'une esclave pour lui porter le café au lit. Cette esclave s'appelle Rachel. C'est une de mes amies, elle est très belle, nous nous aimons beaucoup, en secret bien sûr. Je crois qu'elle est plus jolie que moi, un peu plus jeune il est vrai, Nous nous voyons rarement maintenant que je suis expatriée. Elle s'occupe très bien de ma fille, elle l'adore, elle n'a pas d'enfant, tous ses efforts n'ont jamais abouti. Rachel est pharmacienne. Son officine n'était pas très loin de mon immeuble, ainsi je ne rechignais jamais à aller me chercher les rares médicaments que je prenais. J'ai toujours fait beaucoup de sport. Du vélo, de la piscine. C'est ce qui me vaut sans doute d'être encore présentable aux 44 ans que je viens de fêter il y a deux jours. Rachel aussi fait du sport, mais en vraie compiégnoise, elle a choisi de faire du cheval.

         Le Petit Laurent
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Entre son bonnet bleu et son masque de chirurgien, on ne voyait que ses yeux noirs. Pourtant, quand il tournait son regard sombre vers l’une ou l’autre d’entre nous, on comprenait instantanément ses désirs, sans qu’il eût prononcé la moindre parole. J’étais devant lui, et j’étais l’assistante de l’autre chirurgien qui lui faisait face. L’entente des deux hommes était remarquable, c’était le meilleur « bloc » de tout l’hôpital. Je passais les instruments qu’on me réclamait, tout en essayant de ne pas regarder le champ opératoire, je ne m’y habituerai jamais. Pourtant, délimité par le drap bleu ciel et les linges blancs tâchés de rouge, l’ouverture ne ressemblait à rien que l’on puisse identifier, sans être du métier. Moi je ne l’étais pas, je passais les outils, comme une autre fille aurait pu le faire aussi bien. Et pour ne pas regarder l’opération en direct, je portais les yeux sur le chirurgien aux yeux noirs, ou sur son assistante qui me faisait face, dont les yeux étaient d’un bleu sauvage. De l’assistante on ne voyait que la proéminence de son imposante poitrine.

 Le Chaos de Targasonne
Le Chaos de Targasone

Sur les hauteurs des Pyrénées-Orientales, la Cerdagne est un vaste plateau ensoleillé, un encorbellement entre le mont du Carlit, et celui de Puigmal, tous deux culminants aux alentours de 3000 mètres. La Cerdagne est à une altitude de 1600 mètres en moyenne, et elle a la particularité d’être une région fertile, bien que de haute montagne, puisque l’on y récolte des céréales, du blé principalement. On y vient de Perpignan par la route qui monte à Font Romeu, ou par le côté Espagnol en traversant l’Andorre. Dans la partie occidentale de la Cerdagne, on trouve un lieu particulièrement mythique, « Le Chaos de Targasonne » Plutôt qu’un lieu, on pourrait dire un pays, voire une région, puisqu’il s’étend sur 50km. Le Chaos est un amoncellement de roches granitiques -par exemple- dont l’origine et la formation ne paraissent pas évidentes. Curieusement, on trouve aussi ce genre de relief dans la forêt de Fontainebleau ou dans la Lozère.

        Le Coupe Chou
Le coupe chou-1

S’il existe un lieu magique à Paris, c’est bien la gare de Lyon. Pas cette gare TGV souterrainement austère et sans âme, mais la gare de surface, la vraie, celle qui fait vibrer le cœur dès que l’on aperçoit l’horloge, du boulevard. J’ai toujours aimé les trains, depuis ma plus tendre enfance quand, avec mes parents et ma sœur, nous partions à la mer. La Gare de Lyon à l’heure des grands départs est habitée d’un esprit particulier. Peut-être est-ce simplement la concentration des voyageurs en attente. C’est cette odeur particulière, faite d’humanité, d’ozone et de poussière. Ce grand espace face aux quais, animé de ses panneaux affichant les horaires, et les milliers d’yeux, levés vers les chiffres verts qu’ils ne semblent pas comprendre. Et puis ce sont tous ces jeunes avec sacs au dos, assis sur les murets des escaliers descendant au sous-sol. Ils fument, ils mangent d’énormes sandwiches, vident quantité de boîtes de bière ou de Coca. Ils dorment ou s’embrassent, l’amour des fois, se fout du décor. En haut de l’escalier, ce superbe restaurant : « Le Train Bleu » qui fit briller de ses ors, la redoutable Nikita, alias Anne Parillaud.

            Jolie Luna
Lena Gercke

Sur les pavés de la place St Jacques, Rachel avait beaucoup de difficulté à marcher avec ses talons aiguilles, et se casser un talon maintenant, ne serait pas pour lui remonter le moral ! Rien n’allait vraiment bien depuis une semaine. Elle avait du mal à effacer de son esprit ce qui s’était passé, et ce soir-là, elle n’avait pas envie de rentrer chez elle, et de se retrouver seule avec ses idées noires. Sa petite fille était pour le week-end chez sa grand-mère. Elle entra dans le café le plus proche. Le Coq d’Or l’un des plus joliment décorés de la ville. Elle n’était pas une habituée des lieux, d’ailleurs elle entrait rarement dans un café. Il y avait du monde, de la musique jazzy, de la fumée, comme dans tous ces endroits-là, en fin d’après-midi. Elle s’approcha difficilement du bar et demanda un Tonic. Le barman la servit, puis, son verre à la main, elle chercha dans la salle un endroit libre pour se poser.

            La Mante
Les DrusCouleur

Je la reconduisis à la porte. Les quelques pas qu’elle fit devant moi suffirent à provoquer mes plus secrètes fêlures. Sa démarche, ses bottines à hauts talons, son jean élimé aux fesses, ses fesses rondes perchées sur des jambes interminables, ce perfecto, qui était choisi sans doute uniquement pour mettre ses fesses en valeur, et cette chevelure de jais, coupée court, très bas sur la nuque, avec cette mèche savamment rebelle qu’elle remettait en place d’un mouvement de tête des plus étudié. Deux anneaux dorés apparaissaient alternativement au rythme de son pas décidé…..Elle s’arrêta sur le palier, se retourna… Gros plan sur une poitrine agressive, moulée dans un pull col roulé blanc. Visage bronzé, ses yeux noirs lancèrent un éclair, histoire d’humaniser son sourire crispé. Elle commença à descendre les degrés, je fermai la porte appuyai mon front sur le chambranle, et je restai ainsi les yeux fermés, imprégnée de ces images qui repassaient en boucle, dans mon souvenir immédiat.

      Les Jeux de St Elme
Les Jeux de St Elme

Juin 1999 ! décès de mon père, puis en octobre, celui de ma mère. Après 63 années de mariage, la pauvre femme n'a sans doute plus estimé utile de continuer à vivre. Ils ont ainsi rejoint au paradis, leur fille décédée neuf ans plus tôt, à l'âge de quarante-huit ans. Il avait quatre-vingt-sept ans, elle en avait quatre-vingt-deux. Ils ont donc élevé trois enfants : deux filles et le garçon que je suis. Quelques mois plus tard, il fallut se décider à tirer un trait sur la matérialité de leurs existences : Vendre la maison où nous avons grandi, et la débarrasser de tous les meubles et objets leur ayant appartenu. Voir la maison de notre enfance complètement vide fut pour ma sœur et moi, une douloureuse épreuve. Au moment de charger les derniers cartons, ma sœur me désigna celui qui était resté un peu à l'écart.

     Les Jours de Liesse
Les Jours de Liesse

Il faisait un temps superbe ce jour-là. Dans la petite bourgade de Saint André, cette petite ville touristique de Haute-Provence près du lac du Castillon, la saison touristique était à peine commencée. Pourtant, il y avait pas mal de monde en ville, et déjà quelques nageurs courageux dans les eaux glacées. Pour certains c’était déjà les vacances, mais pour d’autres, le travail était encore d’actualité. Il faisait déjà chaud. Pourtant, la ville est à neuf cents mètres d’altitude. Le soleil comme toujours dans cette région était de la partie. Derrière les baies vitrées des bureaux, les employés commençaient à souffrir de la chaleur. Heureusement, la matinée de travail touchait à sa fin. Guillaume avait l’impression que ses clients étaient convaincus, et qu’il remporterait ce marché difficile. Il était assez fier de cette présentation. Bien sûr, il n’était pas seul à avoir réussi à établir ce climat de confiance, qu’il sentait maintenant installé chez ses interlocuteurs.

   Les Tricots de Marguie
Les Tricots de Marguie

Marguerite Dupain était une femme au grand cœur. Pourtant on ne peut pas dire qu’elle avait été gâtée par la vie. Née de parents miséreux de la région de Douai, à Goeulzin plus exactement, elle avait, toute sa jeunesse, traîné ses galoches le long du canal, trouvant dans cette campagne ouvrière tous les motifs qui pouvaient alimenter ses rêves. Elle s’imaginait par exemple qu’un intrépide marinier l’emporterait un jour sur sa péniche, et l’emmènerait ainsi de l’autre côté du monde, là où il n’y aurait que joies et que richesses. Son père, fut l’un des derniers ouvrier de la dernière brasserie du village, et comme bien souvent, il était le meilleur client de son patron.

   Le Miracle Impossible
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C'est ainsi que Jésus parvint dans une ville de Samarie appelée Sychar, non loin de la terre donnée par Jacob à son fils Joseph, là même où se trouve le puits de Jacob. Fatigué du chemin, Jésus était assis tout simplement au bord du puits. C'était environ la sixième heure.Arrive une femme de Samarie pour puiser de l'eau. Jésus lui dit: "Donne-moi à boire." Ses disciples, en effet, étaient allés à la ville pour acheter de quoi manger.Mais cette femme, cette Samaritaine lui dit: "Comment? Toi, un Juif, tu me demandes à boire à moi, une femme samaritaine!" Les Juifs, en effet, ne veulent rien avoir de commun avec les Samaritains.Jésus lui répondit: "Si tu connaissais le don de Dieu et qui est celui qui te dit: "Donne-moi à boire", c'est toi qui aurais demandé et il t'aurait donné de l'eau vive."La femme lui dit: "Seigneur, tu n'as même pas un seau et le puits est profond; d'où la tiens-tu donc cette eau vive?

          Noire d'Ecume
Noire d'écume

Voyager est sûrement ce qui me motive le plus. Lorsque j'ai choisi de faire ce métier, je n'y avais pas spécialement songé, ou alors, ce n'était pas l'élément fondamental de mon choix. Et pourtant, c'est ce qui m'apporte le maximum de joies. J'adore voyager. Me rendre au pied levé dans telle ou telle ville, dans ce pays ou un autre, est pour moi le plus grand des plaisirs. Ce n'était pas a priori évident. Il faut apprendre à voyager, comme il faut acquérir l'envie de voyager. Tout ce que l'on va rencontrer sera un étonnement. Je ne dis pas un enchantement, puisque sur notre terre, il se trouve malheureusement quantité d'endroits d’où l'on a plus envie de fuir plutôt que de séjourner. Quand j'ai su que je devais me rendre à Cadix (Cadiz en espagnol), j'ai ressenti ce petit pincement au cœur, signe de plaisir intense. Ce n'était pourtant pas la première fois. Je m'y étais déjà rendue, en coup de vent, une seule journée, et je m'étais juré d'y revenir. Cette fois, j'étais décidée à rester le temps qu'il faudrait pour la visiter, et pour en ressentir l’ambiance et le passé.

              Soledad
Roissy

Elle est moche cette voiture, avec cette inscription comme un tatouage ridicule à l’arrière « Taxis Lefèbvre » « Longues distances » « Roissy-Compiègne » C’était une Espace Renault, ce gros machin carré qui, à peine parti était déjà arrêté deux cents mètres plus loin au premier feu rouge. C’était comme une hésitation, cette voiture arrêtée. C’était la dernière chance, soit d’en descendre, soit de courir pour la rattraper. Mais Jane ne bougea pas, et personne n’en descendit. Les yeux pleins de larmes, elle ne distinguait plus nettement le véhicule. Elle le vit repartir, tourner au coin de la rue et disparaître. Axelle lui serrait la main comme pour dire, « ne pleure pas je suis là ». Ce n’était pas la première fois que sa « tata » partait en voyage. Mais Jane bien sûr ne lui avait pas dit que ce départ était le dernier, et qu’il n’y aurait pas de retour. Ainsi va la vie des gens qui assument leurs choix, la vie est unique, il n’est pas toujours écrit qu’une rencontre change forcément la vie, la vie se vit en suivant le chemin décidé. La vie ne change pas toujours de vie.

              Manon
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Quand la boîte aux lettres fut ouverte, les trois quarts de son contenu se répandirent sur le sol. Manon se baissa, difficilement, car les talons et la jupe serrée ne sont pas spécialement faits pour cet exercice. Elle ramassa un à un tous les journaux de pub de télé, toutes les propositions des mages de la région, toutes ces enveloppes pleines de factures, et d’autres feuillets divers. Au beau milieu de ce fatras, un document attira son attention. Elle le plaça sur le haut de la pile que sa main contenait avec difficulté. Puis elle referma la boîte, se dirigea vers l’ascenseur, après avoir pianoté le digicode. Elle retrouva avec délice l’appartement illuminé de soleil, avec son parquet brillant, ses jolis rideaux de voile de lin, ses fleurs et ses tableaux, sa bonne odeur de parfums et de cire, cette odeur si caractéristique des alcôves féminines. Manon posa le tout sur la table du salon, et partit dans la salle de bain au cas où quelque réparation serait nécessaire. Il fallait qu’elle se change pour aller faire quelques courses au Champion tout proche. Ceci étant fait, elle jeta un coup d’œil sur le document qu’elle avait ramassé.

            Fait Divers
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A 300km /heure, le Thalys filait vers Bruxelles en longeant l’autoroute du Nord. Dans le compartiment de première classe, confortablement installé, bercé par le ronronnement régulier du TGV, Albert se laissait aller à sommeiller. Il adorait ce train, où le confort était parfait, le seul endroit où il savait pouvoir réellement se reposer. Il faut dire que sa vie était quelque peu agitée, et le stress prenait souvent le relais de la volonté et de la détermination. Il était installé sur le fauteuil à coté de la vitre qui donnait coté autoroute. Il savait que les voitures qu’il voyait, roulaient au moins à 150km/h. Pourtant, il avait l’impression qu’elles allaient au ralenti. Il remarqua une BMW qui sur la file de gauche doublait toutes les voitures avec une aisance étonnante. Malgré tout il la perdit de vue très rapidement. Sur les fauteuils de l’autre coté de l’allée, il y avait deux jeunes femmes, qui se regardaient en se parlant à voix basse, quelques fois un sourire illuminait les visages.

 

Les Dryades

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J'ai déjà par mes nouvelles, abordé beaucoup de sujets. Peut être font-ils partie de "tout le reste". Je ne suis pas une fervente admiratrice de Simone de Beauvoir, (sauf quand le rôle est tenu par la divine Anna Mouglalis) et je ne me reconnais pas dans les féministes de tous bords. Pourtant, s'il y a un trait de ma personnalité qui surclasse tous les autres, c'est bien mon amour de la femme. Je suis lesbienne donc, puisque c'est l'étiquette que l'on colle aux tribades modernes, mais là encore, ce n'est pas vraiment ça, puisque je suis mariée, et j'ai une fille d'un premier mariage. Je tiens à vivre ma vie comme tout le monde, le plus simplement possible. J'allais dire le plus "normalement" possible, mais je sais que cela aurait fait bondir certaines âmes guerrières. Rassurez-vous, je ne vise personne. Une vie de famille, c'est ce que j'ai toujours souhaité, en faisant la part de ma vie et de mon autre vie. Mon alter ego est une entité qui existe, qui influe bien évidemment sur mon autre vie. J'espère simplement que personne autour de moi, n'en souffre. Si quelqu'un ignore ma bisexualité, c'est que ça ne l'intéresse pas, car je ne dissimule rien, je vis comme ça vient. Je vis au grand jour, et j'aime au grand jour. Je n'ai aucune arrière-pensée, aucune envie de dissimulation. "Je roule plein phares". Ma devise pourrait être le titre de ce blog, "O me quieres O me dejas. Ce qui veut dire en clair, "Ou tu m'aimes ou tu me laisses". C'est d'autant plus facile à comprendre que je vis en Espagne, banlieue de Madrid près de l'aéroport. Je suis en Espagne depuis 6 ans bientôt. Je m'y suis installée pour raison professionnelle, quand l'envie m'est venue de faire "autre chose, autrement". Ce n'est pas pour raconter ma vie, mais plutôt pour raconter mon histoire, ce qui bien sûr, est différent. Je ne suis pas une pro des blogs. Il y a encore quelques mois, j'ignorais tout de cette façon de s'exprimer. J'avais vu bien sûr les merveilles réalisées par ma belle amie Ana, et sans ce stupide accident qui m'a clouée durant quelques semaines, je ne me serais jamais lancée dans cet exercice. 

 

Chapitre 1

Les Demoiselles de St Ladre

 

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Samedi 15 décembre 2007 La petite route était noire et luisante au milieu de toute cette neige grisâtre. À peine dégagé, le ruban d’asphalte était étroit, et les voitures se croisaient avec difficultés. Il avait neigé fortement depuis le début de ce mois de décembre. Déjà, mi-novembre, quelques flocons avaient blanchi la campagne. Et depuis, une neige très fine, humide et pénétrante, n’arrêtait pas de tomber, virevoltante au moindre souffle de vent. Ce n’était pas suffisant pour recouvrir la route abondamment salée, mais assez pour effacer en une journée toutes les traces de la veille. La circulation n’était pas très intense, il semblait que l’activité, comme la nature, s’était endormie. Il faisait froid et humide, d’autres précipitations importantes, peut-être neigeuses, étaient attendues. Le ciel était gris bien sûr, et la nuit ne tarderait pas à accabler le paysage d’un sombre avenir. Les arbres des taillis tendaient désespérément leurs squelettes vers de gros nuages terrifiants. Depuis les quinze jours que la neige était omniprésente, la plupart des branches de ces arbres nus avaient perdu leur chargement de poudre blanche. Et pour d’autres, il suffisait d’un souffle de vent pour qu’elles se dévêtissent, dans un chuintement à peine perceptible. La petite route reliait la départementale à la petite ville de Cagny. C’était un raccourci bien pratique qui permettait de rejoindre le parking de la gare de Longueau. À quelques centaines de mètres de la station, la route était surplombée par cet immense viaduc qui enjambait la vallée marécageuse. Ce que l’on appelait la rocade, mais en réalité c’était l’autoroute qui contournait la ville par le sud en surplombant la vallée. Le flot des véhicules épargnait ainsi le centre-ville qui, à grands frais, avait été tristement abandonné aux piétons. Parallèlement à la route, sur un remblai de quelques mètres, la ligne de chemin de fer émergeait tout juste, elle aussi, de la couche de neige. On ne distinguait que les rails, les traverses n’étaient plus visibles qu’à de rares endroits. Comme la petite route, les voies s’engouffraient sous le viaduc dans la direction de Paris. De l’autre côté des voies, la falaise de craie du plateau picard ajoutait sa grisaille au décor ambiant. En face, dans la vallée, le marais. Cette immense étendue d’étangs constitue le lit de la rivière qui coule sa tranquillité dans la réserve Saint-Ladre, avant de se mêler à la Somme à Camon, entre Longueau et Amiens. 

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IX-Paranthèse
 

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L'Amour aussi a quelques fois besoin d'autre chose.


                                           Une semaine après, je me présentai au 25 ème RGA. Au camp des Sablons à Compiègne. J’étais seule à rejoindre le camp ce jour là. On me donna mon paquetage, et mon logement. C’était dans une baraque « Fillod » elle était séparée en deux, et j’arrivai dans un réduit où il y avait quatre lits, dont un n’était pas occupé, j’en pris possession. Je mis mon treillis, mes rangers, mon béret perché sur mes longs cheveux en chignon. Je me promis de couper mes cheveux à la garçonne à la première occasion. (Je ne le fis jamais) Le caporal de semaine vint m’expliquer ce que je devais faire. Les trois autres filles engagées comme moi, revinrent dans la chambrée. On fit connaissance. L’une d’elles était très belle, et bien que blonde, elle me plaisait beaucoup. Elle s’appelait Marie-Noëlle et le déclic se fit instantanément. Ça, c’est un phénomène que je ne me suis jamais expliqué. Elle était blonde, et avait des yeux totalement noirs, on ne voyait pas de différence entre les pupilles et les iris. C’était un regard étonnant qui lui donnait un charme surnaturel. Cette blondeur lumineuse et ce regard très sombre lui faisait un visage des plus original. Pour le reste, je ne sais pas, le treillis n’est pas très seyant, c’est une banalité que de le dire. Je fus reçue par le Chef de Corps, le Colonel Dumas, honneur que je me devais d’apprécier. Il me réserva un accueil très protocolaire, mais souriant. Et bien sûr la question qui me suivra pendant deux ans,
« Mais que diable venez-vous faire dans l’armée ?
-Essayer de faire comme vous Colonel !
-Bien répondu, et je vous souhaite très sincèrement de faire mieux. Maintenant je vais vous expliquer ce qui va se passer. Et quel sera le déroulement de votre séjour ici. Le stage à l’école d’officiers de réserve auquel vous allez participer durera six mois, ou neuf, je ne sais plus, ne démarre que dans un mois. En attendant vous suivrez le peloton avec vos trois collègues, cela vous permettra de vous mettre dans le bain. » L’entretien dura une bonne heure. Les questions allèrent très loin dans ma vie privée. Je restais très réservée. Non, je n’avais pas de fiancé, je n’étais pas sur le point de me marier, je n’étais pas enceinte. Oui, j’avais quitté l’enseignement, j’ai une licence de lettres modernes. Le bac plus cinq. J’ai travaillé à Lille au journal. Mes parents habitent Compiègne. Mon père est ingénieur. Je suis trilingue, etc etc Le colonel s’étonnait que je sois à l’armée avec un bac plus cinq ! Moi je croyais savoir que les généraux sortaient de Polytechnique, il n’y avait donc rien de choquant. Je retrouvai les filles, et je pris mon premier repas militaire. Une chose est certaine, ce n’est pas ici que je prendrai des kilos. Le soir on est allé en ville, en civil. On a bu un pot dans un bar, et nous sommes rentrées. Il y avait une bonne distance entre le camp des sablons et le centre ville, mais il faisait beau, ce n’était pas désagréable. Dire à quel moment on se prit la main, et qui décida de le faire, je ne sais pas, c’était tellement naturel. Marie-Noëlle avait une jolie voix quand elle me parlait doucement, et le temps du retour passa agréablement. Arrivées à la baraque, les deux autres filles restèrent dehors pour fumer une cigarette, et nous, on resta dedans pour s’embrasser. Ma vie militaire commençait bien. Mes mains engagées sous le pull découvraient un corps de femme des plus attirants. On en était là de nos découvertes quand une des filles entra en coup de vent et nous lança :
« Planquez-vous voila le chef ! » C’était bien, elles avaient tout compris, tout de suite. Le mois de Peloton se passa très calmement. Bien que pas concernée, je participais à toutes les activités, d’abord pour ne pas m’ennuyer, et ensuite pour être avec les filles qui se révélèrent d’une fréquentation agréable. Marie-No était un peu amoureuse, mais elle n’en faisait pas des tonnes. Elle savait que j’étais là pour peu de temps, elle ne voulait pas vivre une séparation délicate, ce qui prouvait, s’il en était besoin, qu’elle avait la tête sur les épaules. On fit l’amour une ou deux fois, profitant que les filles étaient allées au cinéma en ville. C’était cool la vie militaire au Camp des Sablons. Au fond du terrain de la base, il y avait un terrain appelé le « polygone » où les garçons apprenaient la conduite des engins de travaux publics. Il y avait des bulldozers énormes, des grues, des niveleuses, des rouleaux. On m’autorisa à grimper sur un Caterpillar et en prendre les manettes. C’est une expérience inoubliable. C’est facile à piloter, et l’engin avait une puissance énorme. J’ai bien aimé aussi la marche de nuit à la boussole. Le camion nous larguait on ne sait où dans la forêt, nous avions un angle de marche, le lieu d’arrivée, et un temps limite. J’emmenais les filles avec moi, et la boussole dans la poche, on arrivait les premières. Personne ne s’était rendu compte que, native de Compiègne, je connaissais la forêt comme ma poche. Dans cette garnison, il semblait y avoir un maître mot, ne jamais s’ennuyer. Alors on inventait des « exercices », mais on aurait pu dire aussi que l’on inventait des jeux. On faisait du sport sans arrêt, et le parcours du combattant, on le faisait par plaisir. Je ne mangeais pas grand-chose, la bouffe était immangeable. Je perdis trois kilos le premier mois. Même les seins furent réduits d’un bonnet. Mais je n’étais pas fâchée, je me trouvais dans une forme éblouissante. Je passais le week end chez mes parents, je faisais du vélo avec mon père, et…. Marie-No, qui se révéla aussi une fana du vélo. Elle passait le week end avec moi, elle était de Dijon. Quand je reçus l’ordre de marche pour Angers, je me pris un coup de cafard monstre. Marie No et ses copines ne feraient plus partie de mes plaisirs. Il allait falloir tout recommencer. Et s’il n’y avait personne là bas avec qui vivre des moments d’intimité ? Ma seule consolation fut que j’allais leur manquer aussi. Marie-No assuma sa tristesse devant tout le monde, sans honte, sans vouloir cacher ses larmes et les sentiments que nous avions tissés. Qu'on le veuille ou non, pleurer le départ de sa copine devant cent cinquante mecs, présente un certain courage. Nul ne songea à plaisanter ou écourter nos adieux. A vrai dire, aucun n’ignorait notre liaison, et je sentis à cet instant, que nos sentiments étaient compris et respectés.
Arrivée à Angers, je pris place à la terrasse du buffet de la gare. Je n’avais aucune envie « d’y aller ». Sauf que là bas, les choses ne sont pas faites au hasard. Le commandement savait que je devais être dans le train. Une voiture était donc là, à m’attendre. Je voyais le chauffeur chercher quelqu’un des yeux, inquiet de ne trouver personne. J’étais loin de me douter que c’était moi qu’il cherchait. Il s’approcha enfin de moi, et poliment me demanda si j’allais au quartier Eblé. Je répondis que oui, et il me dit qu’il était envoyé pour me conduire là bas. Je lui proposai une boisson qu’il refusa. Je finis mon Schweppes, il m’attendit sans s’impatienter. Je lui demandai si c’était l’habitude de venir chercher les gens au train, il me répondit que oui, mais lui ne le faisait pas souvent. Je remarquai que la grosse berline noire avait un fanion sur l’aile gauche. Je demandai l’explication. Le chauffeur me répondit : C’est la voiture du Général. Je suis son chauffeur. J’allais d’étonnement en étonnement. Il m’ouvrit la porte arrière, et me fit monter à la place du Général. Je croyais rêver. Arrivée au quartier Eblé, je fus étonnée du parfait ordonnancement des lieux. La voiture s’arrêta devant la porte centrale de l’un des trois bâtiments qui entouraient la place d’armes. Deux personnes semblaient attendre. Le premier s’avança, et ouvrit la porte.
« Je suis le Capitaine Ducrocq, et je commande votre compagnie. Je vous souhaite la bienvenue au quartier Eblé, l’école d’application du Génie. Le sapeur untel va monter vos bagages dans votre chambre. Je vais vous conduire au Mess, je vous ai fait tenir un repas au chaud. » Cela continuait. Je me demandai si ce n’était pas moi le Général. Durant le repas, le Capitaine me tint compagnie, me proposa du vin rosé « Côteau du Layon » mais je refusai, je ne buvais de l’alcool qu’en galante compagnie, et encore. Durant le repas, il me parla de mon séjour dans cette école. Ce que je retins de cet entretien, c’est que je n’allais pas chômer ! En sortant du restaurant, le Capitaine me dit :
« Je vous laisse aux soins du sapeur untel. Il va vous installer dans vos quartiers. Comme il n’y a pas d’autres femmes pour l’instant, vous serez seule dans votre chambre, j’espère que vous ne vous ennuierez pas trop. Vous trouverez un livre retraçant l’histoire de cette école, et en plus, l’histoire du Général Eblé qui, comme vous le savez, était le Général de l’Armée de Napoléon 1er, à qui revint l’impossible mission de faire traverser la Bérézina à la grande armée. S’il vous manque quoi que ce soit, demandez au sapeur qui est à votre service. Autre chose, le peloton commence dans deux jours. D’ici là vous êtes au repos. La seule présence obligatoire sera la sonnerie « au drapeau ». Si vous ne prenez pas vos repas au Mess, je vous demanderai de prévenir « la semaine » »
Pour parler poliment, j’étais sur le cul.
J’arrivai dans « ma chambre », et c’était vraiment une chambre. Un magnifique parquet ciré, et quatre lits avec des couvres-lits orange. Il y avait des tables de nuit avec des lampes de chevet. Au milieu de la pièce, une table et quatre chaises, sur le mur en face des lits, des armoires individuelles, et une porte. Deux grandes fenêtres à petits carreaux, avec des rideaux et doubles rideaux assortis aux couvre-lits Le sapeur précisa : « C’est la seule chambre avec des rideaux, c’est la chambres des femmes. Vous n’aurez que votre lit à faire, le ménage sera fait tous les jours par les hommes des services. Vos armoires seront obligatoirement fermées par un cadenas. Et  vous ne laisserez aucune lingerie visible. La porte donne sur le cabinet de toilette.
-Et où peut-on téléphoner ?
-Au fond du couloir, il y a un téléphone à jetons. Vous toucherez un nombre de jetons avec votre solde, mais vous pourrez en acheter plus au foyer.
 Attention, vous devez être en tenue militaire irréprochable dès que vous sortez de votre chambre. La porte de votre chambre ferme à clefs. L’équipe d’entretien a un passe déposé à la semaine.
-Les hommes des services, c’est quoi ?
-Il y a deux compagnies d’élèves officiers commandées chacune par un Capitaine. Elles sont divisées en brigades d’une trentaine d’élèves, commandées par un lieutenant. Et il ya une compagnie de services, ou (de commandement), qui est là pour assurer le quotidien. Le nettoiement, l’entretien, les cuisines, les transports, les bureaux etc. Vous pouvez à chaque instant demander l’aide d’un homme des services. Après le travail, vous pouvez vous rendre en ville, en civil bien sûr. Il y a un bus qui peut vous y conduire, et vous ramener également, il faut consulter les horaires. A moins que je sois occupé par ailleurs, je serai à votre service. En principe vous devrez m’appeler par mon nom, précédé de « Sapeur » c’est le nom des militaires du génie. Mais je m’appelle « Clément », et je préfère que vous m’appeliez comme ça.
-Et moi, vous m’appellerez « eve anne »!
-Nous allons aller voir le sergent fourrier, qui va vous échanger votre paquetage pour quelque chose de meilleure qualité. » Effectivement, les vêtements qui me furent remis étaient magnifiques à côté de ceux que j’abandonnais. Y compris les rangers qui étaient superbes. Clément me précisa qu’il était tout à fait possible de faire retoucher les vêtements, qui n’étaient pas a priori prévus pour les femmes. La tenue de sortie était celle des femmes de l’Armée de l’Air, un tailleur bleu marine, jupe courte, une chemise bleue une cravate, et un bibi sur la tête. Les chaussures étaient au choix, à talons hauts ou plats. J’ai bien cru que je n’étais plus à l’armée, tant le souci du confort et de la présentation était élevé. Clément me donna la réponse.
« Bien que vous n’ayez pas encore vos barrettes, vous êtres déjà considérée comme officier. D’ailleurs, vous ne vous présenterez pas comme « Sapeur untel » mais comme « Elève officier untel » Je demandai ensuite où était le foyer, mais il n’était pas encore ouvert. Clément m’avança quelques jetons de téléphones. Je constatai que d’autres militaires arrivaient continuellement, seuls ou par petits groupes.
« Y aura-t-il d’autres femmes ?
-Je ne peux pas vous le dire, je l’ignore. » Clément m’abandonna. Je fis mon lit, rangeai mes affaires, fis des essayages. Les vestes de treillis devront être rectifiées. A cause de la poitrine évidemment. Les pantalons raccourcis. Les tee-shirts et les chemises étaient un peu justes aussi pour les mêmes raisons. Il n’y avait pas de sous vêtements de prévus pour les femmes. Le tailleur m’allait comme un gant. On me donna un « bon d’achat » pour aller choisir mes chaussures en ville. Il suffisait qu'elles soient de couleur noire. Je téléphonai à mes parents, pour les rassurer. J’appris que Michèle avait appelé pour dire qu’elle allait mieux, et prendre de mes nouvelles. Elle a dit aussi qu’elle venait seulement d’apprendre que je m’étais engagée dans l’armée, et que cela l’avait bouleversée. J’appelai Nathalie tout de suite après. Elle parut heureuse de mon appel, et me donna quantité de détails sur la santé de Michèle, qui semblait se rétablir progressivement. Elle me dit aussi qu’elle pensait beaucoup à moi, et qu’elle regrettait ma main entre ses cuisses. Elle était assez gaie, j’en fus contente. Je n’avais déjà plus de jetons. Ensuite, j’écrivis un petit mot à Marie-No. Deux autres filles arrivèrent dans la soirée. Une grande rouquine assez désagréable, et une petite blonde à cheveux courts assez guillerette. Je ne sentis pas de déclic. Tant pis, je ferai sans. La rouquine commença très fort !
«Je m’appelle Christine. J’espère que vous n’êtes pas lesbiennes, je ne supporte pas !
-Si justement, je suis lesbienne, et tu fais quoi maintenant ?
-Je vais demander à changer de chambre !
-C’est cela, essaie toujours. En tout cas, tu as intérêt à la boucler, car si tu n’aimes pas les lesbiennes, moi je déteste les conasses ! Je suis eve anne, et je fais une tête à celles qui m’emmerdent » Et la blondinette d’en rajouter en riant,
« He ! ça commence bien ! Je sens qu’on va se marrer. Je m’appelle Elodie. Rassurez-vous, moi je suis à voile et à vapeur ! » L’incident en resta là. Et la blondinette s’approcha de moi.
« C’est vrai tu es lesbienne ?
-Non pas du tout,
-Dommage ! » Je n’eus aucun regret, bien que mignonne, elle n’était pas mon type, et je n’avais pas senti le déclic. Puis ce fut l’heure du repas. Je trouvais ça très bon, rien à voir avec le rata servi à Compiègne. La rouquine fit honneur au rosé, mais ne desserra pas les dents. On se pointa ensuite au Foyer. Quelques garçons timides s’approchèrent. On discuta un bon moment. Tous ces garçons buvaient de la bière, la rouquine aussi, et moi je buvais un diabolo menthe. Elodie était partie en ville. La nuit fut paisible, le lit était dur comme j’aime. C’était silencieux, les filles ne ronflaient pas. Le réveil était à six heures. Ce n’était pas le clairon hésitant des Sablons. C’était de la trompette de cavalerie, qui nous joua un réveil « un peu fantaisie » L’eau était chaude, les toilettes très propre, abondance de lavande et d’eau de javel. Petit déjeuner au choix avec jus d’orange, croissants, pain ou pain grillé, café, thé ou chocolat. Quand je raconterai ça, personne ne me croira. Et pourtant c’est bien la vérité. C’était dimanche. Je n’assistai pas à la messe célébrée dans la chapelle du quartier. J’assistai par contre à la prise d’armes du 6ème Génie. Et puis l’après midi, Elodie et moi sommes allées en ville. Le lendemain fut le grand jour, Nous étions sur la place d’armes à 7h30 précises pour hisser les couleurs. Le Général était là, il souhaita la bienvenue au nouveau peloton. Ensuite, le Capitaine fit l’appel des recrues, répartit les élèves en différentes brigades. Il y avait cinq brigades. Je fus dans la cinquième, et les deux autres filles dans la troisième et quatrième. Nous étions 28. L’emploi du temps était simple. Le matin deux heures de sport, ensuite tir et maniement d’armes, exercices de commandement. L’après midi les cours théoriques. Il était prévu au moins une journée à l’extérieur par semaine, pour des exercices de pontage ou de travaux publics. Une fois par mois, il y aurait des manœuvres sur deux ou trois jour. On se répartit par petits groupes, et nous devions travailler par nous même au moins deux heures par jour. Nous n’aurions pas une minute pour souffler. Et le peloton commença comme ça. Le sport était principalement de l’athlétisme, avec du parcours du combattant, et du combat. Je me révélai être dans les meilleures en sport, et au tir, et je tenais le coup pour les marches commando de 20 ou 30 km. Ce qui inspira le respect à mes camarades. Là où j’étais la plus faible, c’était au combat, où tous les garçons étaient beaucoup plus lourds que moi. Il faut dire aussi que je craignais les attouchements et les contacts. On était tellement crevés le soir que l’on n’allait pratiquement jamais en ville. Je mangeais comme quatre, et je perdais du poids. Les cours théoriques, n’étaient pas difficiles, il suffisait d’apprendre et ça j’avais l’habitude. Les élèves officiers qui avaient dans le civil des professions qui pouvaient être utiles, pouvaient donner des cours à leurs collègues. Je fis des cours de français. Je n’avais pas eu les diplômes pour enseigner à des gamins, et là j’étais appréciée pour enseigner à des adultes ! Le français est une des composantes principales des écoles d’officier. Un officier doit pouvoir s’adresser à un auditoire, et s’exprimer sans préparations préalables, et écrire sans fautes. Il y avait un cours d’anglais, mais pas d’Espagnol. J’étais la seule fille dans ma brigade, mais il n’y eut jamais de traitement de faveur, ni d’ailleurs de mots ou gestes déplacés. Ce fut la même chose pour Elodie. Pour la rouquine, ce fut différent c’était une emmerdeuse, et elle devint rapidement la tête de turc de sa brigade. Je me rendais à la piscine d’Angers une à deux fois par semaine le soir. Quand le Capitaine fut au courant, il m’y fit conduire régulièrement en voiture par Clément, et j’eus un abonnement offert par l’armée. Le pauvre Clément en profita pour faire des progrès. Autre arrangement avec le Capitaine: je pus faire venir mon vélo, et il m’accompagna pour des sorties matinales. Quand il ne pouvait pas sortir le dimanche, il ne voulait pas que je sorte seule. C’est mon père qui fit le voyage pour m’amener le vélo. Il fut reçu par le capitaine qui l’invita au Mess. Le Capitaine, roulait bien. Il me mit à l’épreuve en passant par Chemillé et Chalones. Soit environ 120 km. Quand nous étions sortis du quartier, on se tutoyait et je devais l’appeler Henri. Après deux mois à Angers, je n’avais pas encore trouvé une seule fausse note au fonctionnement de cette caserne. Ce n’était que correction, distinction, respect et politesse. Seule condition, il fallait bosser. Et c’était 10 heures par jour, et six jours par semaine. Je n’allais pas en permission chez mes parents. Faire tout ce voyage pour si peu de temps n’en valait pas la peine. Par contre, ils vinrent me visiter par deux fois. Le capitaine me prêta un vélo tout terrain pour visiter la campagne, escortée de Clément bien entendu.
Il y avait une femme dans les bureaux qui me prit en amitié. On prenait nos repas ensemble le midi, et elle venait souvent discuter avec moi. Ce n’était pas une relation « orientée », c’était de la camaraderie pure et simple. Elle m’invita à passer un dimanche chez elle, avec son mari et ses deux enfants. C’était une superbe maison au bord de la Maine, Au Pont-de-Cé. C’était une superbe journée, où, sans réfléchir j’avais sorti mon décolleté « des jours de fête » ! J’eus à subir bien malgré moi quelques attouchements de la part du mari, qui ne dissimulait pas ses « envies ». Je ne retournai plus chez elle, sans dire pourquoi, et elle en fut attristée. Quelques temps après, elle est revenue me voir pour me dire :
« Je crois savoir pourquoi tu ne veux plus venir à la maison. Robert a eu les mains baladeuses, c’est ça ?
-Je ne t’ai rien dit. Je ne me suis pas plainte. Je n’ai pas aimé c’est tout. Mais je t’aime, toi, et j’adore tes enfants.
-Je le sais parce qu’il a fait la même chose avec une autre femme, et je l’ai surpris.
-Et alors ?
-Alors, je viens m’excuser.
-Mais tu n’y es pour rien ma poule, j’ai l’habitude de me faire peloter dans le train, dans le métro, les queues du cinéma. C’est sans arrêt. Parce que j’ai des gros seins ils croient tous que j’aime ça. Mais je ne peux pas tous les tuer ! J’aurais préféré que ce soit toi qui me fasses les caresses.
-Moi ? Parce que…. ?
-Ben oui, ça existe tu sais.
-Oui, je sais, mais je n’ai jamais…
-Je plaisantais. C’est vrai que je préfère les femmes, mais je ne suis pas une névrosée du sexe.
-Ha bon, tu me rassures !
-Prends garde quand même, ton décolleté est assez craquant ! » La jeune femme qui était surnommée « Minouche » par tout le monde à la caserne, m’embrassa sur la joue avant de repartir. Elle resta ma copine, et on reprit nos repas ensemble le midi, avec un café sur la terrasse. C’était une femme équilibrée, belle et sereine, qui respirait l’honnêteté. Je ne comprenais pas qu’un mec qui avait la chance d’avoir une femme comme ça, puisse se livrer à des actions d’une telle bassesse.
Clément vint un soir s'assurer que tout allait bien. Je lui demandai s’il lui serait possible de m’accompagner en ville au cinéma. Il hésita beaucoup.
« Pourquoi, c’est interdit ?
-Non, je ne crois pas, mais on pourrait penser…..
-Tu m’avais dit que tu étais à mon service, et le Capitaine me l’a confirmé. Je ne veux pas y aller seule parce que je ne veux pas être importunée. C’est tout.
-Alors je peux venir avec un copain ?
-Non, toi et moi, comme des amoureux, c’est à prendre ou à laisser.
-C’est d’accord.
-Merci. Mais n’aie pas peur, je n’ai pas l’intention de te violer. » Et il m’emmena au cinéma. Il me ramena au quartier en tout bien tout honneur.
« Eh bien Clément, ce n’était pas si difficile ?
-C’était agréable, mais s’il vous était arrivé quelque chose, j’aurais été responsable de tout.
-Mais j’espère bien, et je lui fis une bise sur la joue. » Ce séjour à Angers fut extraordinaire. J’ai fait des choses inimaginables. Utiliser les explosifs. Organiser la construction d’un pont. Sauter en parachute. Parachuter du matériel de travaux publics. Toutes ses activités, on les dirigeait chacun son tour, avec l’appui du groupe. Faire un pont sur la Loire, nécessite 150 hommes pendant 5 heures et cinquante camions de matériel, une grue et un bulldozer. Et de puissantes vedettes. Préparer un tel chantier est un travail colossal. En quelques mots. Un pont de bateaux est composé de «portières». Les portières sont composées de trois ou cinq bateaux, réunis par un platelage métallique. Ces portières sont construites sur le bord du fleuve, et poussés ensuite par les vedettes pour arriver en synchronisme avec les autres et constituer le pont. Celui-ci est tenu par des câbles. Cette préparation nous demandait nos soirées pendant deux à trois semaines. Aussi les ponts métalliques, et les ponts automoteurs, furent expérimentés. Imaginez-vous : départ à trois heures du matin. Construire les portières. Remonter le fleuve sur la portière, poussée par la vedette, quand le jour se lève. Une heure de ballade comme ça sur la Loire au soleil levant. C’était féerique. Il fallait respecter l’horaire très précisément, nous n’avions droit qu’à une heure de barrage du fleuve, autorisation du préfet, et surveillance par la gendarmerie. Nous avions aussi nos exercices de travaux publics. A la base une carte d’état major. Réaliser une piste d’atterrissage de classe X. Faire les calculs. Les cubages de terre à déplacer, choisir les matériels etc. Ajouter à ça les exercices de combat, les destructions à l’explosif, la réparation des voies ferrées. Et les cours théoriques pour apprendre à faire tout ça. Bref, nous n’avons pas eu une seule minute d’ennui. Je me suis passionnée pour toutes ses activités qui se sont déroulées dans un esprit de camaraderie remarquable. Cinq élèves ont capitulé en cours de route, faute d’énergie, ou d’intérêt, ou peut être de courage tout simplement. Je sais que mes cours de lettres ont été appréciés, et j’ai tenu ma place dans toutes les matières. Le stage a duré neuf mois. Dont un hiver très froid. A la fin du stage, le concours nous traumatisa quelque peu. Suivant le classement, on pouvait avoir un grade de Sous lieutenant, d’Aspirant, ou de Sergent. Le sergent étant équivalent à l’échec. Avec ce grade il y avait une priorité pour choisir le lieu d’affectation. Le concours dura une semaine complète. Sur 150 élèves, je suis sortie 15ème, avec le grade de Sous-lieutenant. Les deux autres filles sont sorties Aspirants. Au lieu d’être heureuse de ce résultat, j’étais triste. La tension était tombée d’un seul coup, et j’allais perdre « tout ça ». J’avais vécu neuf mois d’une activité physique et intellectuelle soutenue, et passionnante, (certes sans amours) et tout allait redevenir banal. Je pleurais, Clément vint me féliciter. Le Général reçut en privé tous les « Sous-lieutenants. Nous avions trois jours pour récupérer, avant de repartir vers nos destinations respectives. Au lieu de repartir par le train, mon père vint me chercher, et emmena mon vélo par la même occasion. Quand je fis mes adieux au Capitaine, il me dit simplement, « Tu étais la seule après ton travail à avoir encore assez d’énergie pour faire des longueurs à la piscine, et des km en vélo. Je suis sidéré.
- Remettez-vous "Mon Capitaine préféré", vous en verrez d’autres, et je lui fis un gros bisou qui claque sur la joue. Les adieux à Minouche et à Elodie se passèrent tristement. Je ne jugeais pas utile de saluer la rouquine. Clément eut du mal à cacher son émotion, et je me trouvais bien ingrate à son endroit. Je lui fis un petit baiser coquin, mais c’était une bien petite récompense pour tous les services qu’il m’avait rendus. Je quittais l’Ecole d’Application du Génie d’Angers avec un cafard monstre, cinq kilos de moins, rien que des muscles, et ma belle poitrine à moitié fondue. Tout ça pour une barrette sur chaque épaule.



 Et pour oublier un amour perdu.  
 



 

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Par eve anne
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