« Il me semble que ce tableau vous plait. Je me
trompe ? » Sarah sursauta en entendant cette voix pourtant très douce. Elle n'avait pas
entendu arriver la jolie femme qui venait d'entrer et qui lui souriait. « Oui, il me
plait beaucoup. -Je suis Carmela Marchale. Je dirige cette petite entreprise de confection. Je
suis très heureuse de vous accueillir. » Sarah ne répondit
pas tout de suite, elle continuait à fixer intensément le tableau. « Oh ! Je
vous prie de bien vouloir m'excuser madame Marchale, mais ce magnifique tableau me rappelle une jeune femme que j'ai bien connue. Mais celle-ci était blonde, il ne peut donc
s'agir de la même personne .... -Je pense que vous êtes Sarah, l'amie intime de Florane
d'Auteuil ? -Mais comment me connaissez vous, je ne me suis pas encore
présentée. -Je vous connais très bien et depuis de longues années » Dit elle en
riant. « Ce tableau représente Florane d'Auteuil, il y a quelques
années. -Mais.... -A l'origine, ce portrait correspondait trait pour trait au modèle, mais une fois terminé, l'artiste, (un jeune Anglais) a trouvé que la chevelure blonde ne
ressortait pas assez, et qu'il manquait un contraste. Il a donc proposé de teindre le modèle en brune, ce qui a plu à Florane, puisqu'elle s'est écriée : « Excellente
idée. De cette façon on pourra faire la confusion avec Sarah. -Ce tableau est
magnifique. Il vous appartient ? -Non hélas, il est là en dépôt, il attend son propriétaire. D'ailleurs, il
n'attend plus, ce tableau est à vous. -A Moi ? Comment
cela ? -Depuis votre séparation, Florane ne vit que dans l'espoir de vous retrouver.
Elle est persuadée que votre rencontre se fera ici, là où a eu lieu votre séparation. Elle savait que, en cas d'absence, pour quelque raison que ce soit, vous passeriez voir les
personnes qui l'ont aimée. Et ce tableau est là, c'est un cadeau pour vous en signe de bienvenue. » Sarah avait du mal à retenir ses larmes, Carmela lui tendit un petit mouchoir brodé. « Venez, allons nous asseoir à côté, nous serons mieux pour discuter. » Carmela introduisit Sarah dans un petit salon, boudoir, alcôve, peut être tout à la fois, mais quelque chose de très féminin, parfumé, isolé de tout. Asseyez-vous
Sarah, vous êtes ici chez vous. « Lorsque je vous dis que je vous connais, c'est la vérité. Florane ne parle
que de vous, ne rêve que de vous, et ne vit que pour vous. Quand elle a débarqué ici, c'était Maman qui tenait boutique à Saint Benoit. Moi je venais de terminer mes études,
et je rencontrais souvent Florane dans le magasin. Mais je ne vais pas tout vous raconter, je laisserai ce soin à Florane qui sera heureuse de tout vous
dire. -Avez-vous une idée de l'endroit où elle se
trouve ? -Je pense que l'on vous a déjà prévenue que Florane est atteinte d'un mal inconnu
qui la ronge chaque jour un peu plus. Moi je sais l'origine de ce mal, combien de fois lui ai-je dit de partir pour Adélaïde. Mais elle pensait que vous aviez refait votre vie et
qu'elle n'existait plus pour vous. Elle répétait cela sans cesse, mais je savais qu'au fond 'elle même elle n'en croyait rien. -Mais comment savait elle que je vivais à Adélaïde ? -Tout le monde le
sait. Vous êtes une femme célèbre, votre empire financier fait bien des envieux. Et de mon côté, j'ai quelques bons clients là bas, et j'avais régulièrement de vos nouvelles.
Rassurez-vous, rien de personnel, les nouvelles qui paraissaient dans la presse. Florane est très admirative de votre réussite, et elle répète souvent, que si vous aviez été ensemble,
rien de tout cela n'aurait pu exister. -Il y a des moments
où l'on pense avoir réussi quelque chose. En cet instant, je crois plutôt que j'ai tout raté. -Reprenez-vous,
vous êtes un exemple pour le monde entier, vous avez réussi là où bien des hommes célèbres échouent lamentablement. Sans jamais déchaîner la chronique, aucune histoire sentimentale
scandaleuse, aucune folie, aucun reproche à vous faire. Les journalistes doivent vous détester, pour ne rien avoir à écrire sur
vous. -Je croyais vivre dans une retraite. Adélaïde n'a rien d'une
capitale ! -J'ai encouragé bien souvent Florane à partir vous rejoindre. Et elle me
répondait inlassablement, « Sarah vit dans sa famille, elle a des devoirs, des responsabilités dans lesquelles je n'ai pas ma place. De plus elle a un mari que je ne souhaite pas
connaître en tant que tel. C'est d'ailleurs à cause de lui que j'ai quitté le bateau, et non à cause de Sarah. Quand elle décidera qu'il est temps de nous retrouver, elle saura me
rejoindre. » « Pour répondre à votre question, je sais qu'elle se trouve en France, avec
le souci de recevoir les soins les plus appropriés. Les médecins n'ont jamais voulu comprendre que c'était en Australie qu'il fallait l'envoyer pour vous revoir. Je ne sais pas où elle
se trouve en France, mais je pense que par les ambassades, vous la retrouverez facilement. -Vous parliez de
mon empire financier, Il appartient en propre à l'armée des Etats Unis d'Amérique. Florane, Lusciano et moi, n'en possédons qu'une infime partie, mais bien
suffisante. -Florane est déjà très riche, elle ne va plus savoir que faire de toute cette
fortune. -Elle le sait très bien, et elle l'a exprimé par testament. Pour autant que j'aie
tout compris, vous seriez héritière à part égale avec mes enfants, Amiya et Paloma. Vous êtes au courant ? -Pas du tout, je ne sais rien de tout cela, et je refuse le moindre denier. -Florane n'a pas d'héritiers directs connus. Je pense qu'elle a fort bien fait. Cela prouve s'il en est besoin, la hauteur de l'estime qu'elle vous
porte. -Je suis flattée d'être sa meilleure amie. Et j'accepte sans réserve de partager
cette amitié avec vous et Paloma. Amiya, je ne la connais pas, mais si vous en parlez, c'est sûrement quelqu'un de bien. Savez vous que Paloma fut pour elle, son seul véritable soutien
pendant des années ? -Oui je sais, je l'ai appris, et j'en ai
honte. -Il ne faut pas. Pour autant que je sache, vous n'avez rien à vous reprocher.
Personnellement je n'ai pas d'héritiers non plus, je n'ai pas besoin de cet argent. -C'est quand on n'a
pas besoin d'argent que l'on gère au mieux une fortune. Vous saurez bien l'utiliser à quelque chose. -Je ne suis pas mariée, et ne le serai jamais. Je suis comme Florane, comme Paloma, comme vous, extrêmement sensible aux charmes de mes semblables, et cela est
irréversible. Pour ne rien vous cacher, et sans ambiguïté, Paloma et moi-même avons été à certains moments, très proches de Florane, j'espère que vous n'en prendrez pas
ombrage. -Qu'allez vous chercher là ? Je sais qu'il est impossible de vivre auprès de
Florane sans l'aimer. » C'est à ce moment seulement que Sarah se mit à observer
Carmela. Elle était plus jeune, d'une dizaine d'années sans doute. Une jolie femme, native
de l'île, à en croire sa couleur de peau très caractéristique. Carmela était une Créole, ou peut être une Métisse, on ne sait exactement voir la différence. Le visage aux traits
européens, le décolleté ravageur, et le corps à la taille fine aux fesses rebondies. Sarah la trouvait très belle, et pour la première fois depuis longtemps retrouva des sensations
oubliées. « Vous êtes très belle
Carmela. -Merci, mais je n'existe pas à côté de vous Sarah, Florane a toujours prétendu que vous étiez la plus belle femme qu'elle n'avait jamais
vue. -Florane a toujours eu tendance à exagérer. D'ailleurs elle était excessive en
tout. -Entière plutôt, c'est une femme honnête, droite, et d'une grande classe. Sa
beauté m'a toujours impressionnée. Elle me disait que je vous ressemblais. A cause de la poitrine sûrement, parce que côté couleur, la différence est grande. Mon père était un militaire
Anglais, et ma maman une créole native de l'île, fille d'une indigène et d'un colon Français. Je suis donc une métisse. Mais ici, nous n'avons pas à souffrir de notre couleur de
peau, les races sont très mélangées. Lorsque nous allions à la plage, Florane admirait ma couleur. Elle disait que j'avais inventé le
soleil. » Nul doute que Florane ait été attirée par cette allure exotique, qui sous
certains points aurait pu rappeler la belle Amiya. Sarah pensait qu'avec quelques années de moins, elle eut tenté de la séduire. Comment résister à une telle
beauté ? « Depuis combien de temps n'avez-vous pas revu
Florane ? -Bientôt deux ans. Paloma a fait une escale de deux jours sur le chemin de
l'Australie, il y a presque un an. -J'ai rencontré Paloma quelques heures à cette occasion, elle présentait un
spectacle de grande qualité. -Paloma est une femme remarquable. Je l'adore. J'ai eu la chance de les
rencontrer toutes les deux quand elles sont arrivées. J'étais bien jeune, et j'ai été absolument émerveillée de la volonté et de la force de ces deux femmes, débarquées dans ce bout de
monde où elles ne connaissaient personne, sans savoir où aller, sans argent, sans vêtements pour ce climat. Ma maman les a prises en amitié, et s'est occupée de tout ce qu'elle pouvait
pour elles. C'est le gouverneur du port de Saint Benoit, qui les a mises en relation dans les heures qui ont suivi leur arrivée. Elles ont eu beaucoup de chance dans leur malheur.
Paloma n'est pas restée très longtemps, un mois à peine, elle est repartie quand Florane était installée. Elle devait rejoindre une troupe d'artistes, dont elle faisait
partie. Elle a débarqué uniquement pour que Florane ne soit pas seule avec sa détresse. C'est absolument remarquable et démontre une générosité
exceptionnelle. -Oui, je sais tout cela, tout est de ma faute, je n'aurais jamais du la laisser
descendre. -C'est la vie, on ne peut pas refaire ce qui a été, et comme il y a des raisons à
tout... -Oui des raisons dont je ne suis pas très
fière. -Florane ne vous en a jamais voulu. Elle a débarqué de votre navire parce qu'elle
était enceinte. Et comme le papa était devenu votre amant, elle ne pouvait pas imposer son état à votre couple. -Paloma m'a pourtant dit que Florane n'avait jamais eu d'enfant ? -Elle n'a pas pu le
garder, Paloma n'en a rien su, Florane a fait une fausse couche quelques jours après son départ, elle ne veut plus en parler. Mais c'est la seule raison qui l'a incitée à
débarquer. -Quel gâchis ! J'aurais du comprendre que ce n'était ni un geste de colère
ni un réflexe de jalousie.....J'ai été stupide. Tout s'est passé si vite..... -Ne vous en voulez
pas, Florane vous a toujours tout pardonné. Mais c'est un épisode malheureux qu'elle souhaite rayer de sa vie. C'est un évènement qui l'a profondément
torturée. J'ignore si le notaire vous a dit que Florane s'est fait préparer un mausolée,
pour y reposer quand le triste moment sera venu. Et l'on peut
s'étonner qu'elle ait choisi ce cimetière, alors qu'elle a une maison en France, et que sa famille est inhumée là bas. Elle a aussi une maison ici à Saint Denis. Elle invoque qu'elle
est déjà morte une première fois en arrivant ici. Elle a choisi le mausolée pour que l'on puisse l'ouvrir de l'intérieur, de même que le cercueil qui l'attend, bien que le couvercle
soit vissé, on peut l'ouvrir de l'intérieur. Florane prétend qu'elle pourra en ressortir, si un jour vous venez vous recueillir sur sa tombe. C'est ainsi, quand sa maladie la fait
souffrir, son esprit bat la campagne à la recherche de son passé. Florane n'a plus de maison à saint Benoît, elle y passe peu de temps, lorsqu'elle y vient, elle vit chez
moi. -Mon dieu, tout cela est bien triste. J'ai besoin de temps pour m'imprégner de
tout ceci, et je vais vous demander la permission de me retirer présentement. Si vous avez quelques instants, je vous propose de nous revoir
demain ? -C'est parfait, je vous consacre ma journée, et nous essaierons de parler de
choses plus gaies. -Ce sera un grand plaisir. Je suis heureuse de vous avoir rencontrée. Je mesure à
vous entendre combien je pouvais être isolée en Australie. Demain, cela vous convient ? -Oui, et je
ressens le besoin d'être votre amie. J'ai été avertie de votre arrivée à la minute où vous avez posé le pied sur le sol de Bourbon. Cela m'a profondément émue. Et depuis, je vous
attendais, je ne savais pas si vous alliez venir. J'étais prête à vous retrouver à votre hôtel.... -Ha ! Encore une question. Florane a laissé chez maître Nemours, des documents à me remettre. Dans ces documents, un recueil de poésies et de croquis de sa
main. Ce recueil porte un nom, il est baptisé « Les étoiles éteintes ». Ce
titre m'intrigue. Avez-vous connaissance de ce document ? Pouvez-vous m'éclairer sur la portée de ce titre ? -Oui, je connais ce document. Florane m'a lu quelques passages, montré quelques dessins qui sont les souvenirs qu'elle a gardés de votre
personne. Le titre possède une signification bien entendu, cela remonte à quelques années.
Nous aimions le soir venu regarder les étoiles, et Florane me disait que dans son pays ce n'était pas les mêmes étoiles. A l'occasion de l'un de mes anniversaires, Florane m'avait
offert un superbe ouvrage intitulé « Astronomie populaire de Camille Flammarion » Et c'est dans cet ouvrage que nous avons appris que les étoiles étaient tellement éloignées
que lorsqu'elles s'éteignaient, leur lumière restait visible pendant de longues années voire des siècles. Et Florane avait fait le parallèle avec votre relation. Vos amours se sont éteintes un triste jour où vous vous êtes séparées, mais leur lumière brille
toujours, et brillera peut être encore après votre disparition. Ainsi êtes-vous toutes deux les étoiles éteintes. Je trouve cette image
somptueuse.» Sarah sourit à cette évocation, il lui faudra du temps pour tout classer dans son
esprit, et dans son cœur. Les deux femmes se rapprochèrent pour s'embrasser. Sarah posa naturellement la
main sur la hanche de Carmela. Elle eut une sensation inattendue, comme si quelque chose était passé entre elles deux. Elles étaient de taille peu différente, Carmela un peu plus
grande, peut être, et de sentir les seins fermes de Carmela contre sa poitrine, la fit chanceler un peu. A moins que ce ne fut le parfum légèrement vanillé qui la troubla ces quelques
instants. C'est toute tremblante qu'elle s'écarta de Carmela, qui, heureuse ou malicieuse, lui souriait. « Reposez vous Sarah, dormez tranquille, je veillerai sur vos rêves. » De retour à sa
chambre, Sarah s'étendit sur la chaise longue, après avoir demandé qu'on lui monte du Champagne. La soirée était douce, et la mer était calme. Pas de voiles à l'horizon. En d'autres
temps, cela l'aurait attristé. En cet instant elle ne s'en aperçut pas. Elle se mit à penser à Florane. Elle l'imaginait en grande discussion avec l'entrepreneur pour réaliser cette
tombe d'où l'on pouvait sortir. Cela la fit sourire, c'était bien une fantaisie de femme riche, ou peut être simplement un léger dérangement dû à son mal. Elle voyait très bien Florane
en compagnie de Carmela. Comme elle avait aimé Amiya, elle a sûrement aimé Carmela. Elles font l'amour à chaque fois qu'elles se rencontrent. Sarah ne pouvait imaginer Florane en
femme aux amours platoniques. Sarah se souvenait très bien que pour Florane, l'amour était sa source de vie. Et pourquoi ne peut-on pas la guérir ? Et si ce que Carmela disait était la vérité ? Ce mal serait dû à leur séparation, le remède serait donc de se
retrouver le plus tôt possible, s'il n'est déjà pas trop tard. Pourquoi au moins ne pas le tenter ? Au fur à mesure de ses réflexions, elle revoyait avec précision le visage de
Carmela, coloré, souriant, avec ce sourire éclatant. Ses longs cheveux noirs ondulés attachés à la mode anglaise avec un nœud de velours. Ce diamant lui perçant la narine, et ses
boucles d'oreille immenses. Plus le temps passait plus l'image était précise, plus Carmela lui paraissait d'une beauté sans égale. Non se disait elle, c'est le Champagne, d'ailleurs je
lui trouve un goût bizarre. Je n'ai pas envie d'aimer cette fille. Tomber amoureuse à mon âge serait pure folie. De toute façon, je m'imagine des choses qui n'arriveront jamais. Carmela
est jolie, aimable, souriante, heureuse de me voir sans doute, mais songe-t'elle que l'on pourrait s'aimer comme deux jeunes femmes ? J'ai trop bu. Je vais me
coucher. Sarah se déshabilla lentement. Elle se dirigea vers la salle de bain, et pour
cela passa devant la psyché. Elle s'arrêta et se regarda des pieds à la tête. « A soixante
ans, aurais-je encore des chances de séduire ? Et pourquoi pas ? Je ne suis pas si vilaine, j'ai la peau douce, je ne suis pas grosse, j'ai encore de l'allure. J'ai les
cheveux gris, mais ce n'est pas si moche. Et ma poitrine pourrait satisfaire les désirs de plus d'une femme
exigeante ? » Ce disant elle laissa tomber le peignoir, et se retrouva nue devant le miroir.
Elle commença un inventaire qui se voulut impitoyable. Mais il se termina avec un satisfecit. Il n'y avait rien à jeter. D'ailleurs, quand elle était nue, on ne voyait que cette
poitrine imposante, qui se tenait bien à sa place, qui bougeait bien avec ses mouvements. Ses tétons étaient toujours aussi sensibles, et les aréoles foncées lui semblèrent très
attirantes. De plus, la taille était mince, les cuisses galbées, le mollet bien formé. Conclusion : elle avait bien vieilli, et tout espoir lui était permis. Face au miroir, elle
se laissa glisser au sol, adossée au lit, et sans s'étonner du geste, elle écarta les jambes et regarda l'âme de son corps d'amoureuse. Sa toison n'était pas très épaisse, mais elle
était restée bien noire, et dans le mouvement des cuisses qui s'ouvraient, ses lèvres s'ouvrirent aussi laissant voir un rose luisant au milieu de cette couleur sombre. Elle décida
qu'elle allait s'épiler, comme le faisait Florane, c'est plus joli, c'est plus propre, c'est comme une bouche qui s'entrouvre pour un sourire ou pour un
baiser. Du bout des doigts elle écarta un peu plus les grandes lèvres, et regarda son
sexe comme s'il s'agissait de celui d'une autre femme. C'est très attirant, ça donne envie d'y déposer ses baisers, de le pénétrer de sa langue pour goûter à l'amour, et ce faisant, son
doigt vint à frôler le capuchon du clitoris. Ce fut comme une brûlure soudaine. Sarah en fut surprise. Depuis combien de temps n'avait elle pas ressenti cette invitation ? Elle
ferma les yeux, et c'est avec l'image de Carmela souriante qu'elle commença à se caresser, doucement, puis impatiente de ressentir ce séisme dans le ventre, ce plaisir que toutes les
femmes adorent, et qu'elle avait pourtant réussi à oublier. Le plaisir arriva très vite, et d'autres suivirent presque aussitôt. Elle se rappelait que Florane savait la faire jouir
durant des heures. A quoi avait pu servir cette séparation ? Pour vivre avec un homme dont elle n'avait plus supporté la moindre caresse ? Quelle idiotie, et cet enfant que
portait Florane, où était le problème ? Elles avaient partagé Amiya, elles avaient partagé l'homme, pourquoi pas l'enfant ? Encore que Florane, avec sa façon d'aimer et de
vouloir être aimée, son désir insatiable de posséder l'autre, elle était tombée dans le piège de l'amour bourgeois. C'est vrai que pour une femme qui n'avait jamais connu le sexe d'un
homme, on peut comprendre qu'avec Lusciano elle avait été surprise. S'il ne l'a pas brutalisée, elle a dû devenir une passionaria du sexe, et sans doute s'est elle fait aimer de
son amant de toutes les façons. Et Sarah le savait pour l'avoir vécu quelques années. On peut être lesbienne, mais quand l'homme est beau, viril, galant et caressant, c'est loin
d'être désagréable. Sarah avait fini la bouteille de Champagne. Elle sonna le service pour en demander une autre. Elle avait tourné la clef pour que l'homme puisse entrer, mais s'était
réfugiée dans la salle de bain. Elle ne fit pas attention au jeu des miroirs, ce qui fit que le garçon put la contempler à son aise dans le plus simple
appareil. Comme pourboire, ce n'était pas si mal. Sarah se resservit et sur le lit cette
fois et recommença ses attouchements. Et puis la coupe de champagne se renversa, la chandelle s'éteignit, l'image de Carmela disparut, et Sarah partit dans un sommeil agité, reprenant
dans ses songes libidineux les mêmes jeux mais en compagnie de Carmela. Quand elle se réveilla, elle avait mal au crâne, son lit était trempé, et son sexe meurtri. Elle resta dans son
bain jusqu'à ce que l'eau soit froide. Elle dû se faire violence pour ne pas repartir dans le plaisir solitaire dans l'eau chaude parfumée. Elle réussit à se retenir un bon moment,
jusqu'à ce que ses yeux tombassent sur le flacon de savon liquide, cylindrique, ayant la bonne hauteur, et le diamètre satisfaisant quoi qu'un peu gros, ce qui la fit hésiter quelques
secondes. Quelques secondes seulement. Le bouchon sphérique du flacon de faïence épaisse
facilita l'introduction, et malgré la dimension importante de l'objet, la pénétration se fit en douceur procurant un plaisir intense. Elle pensa que la forme du bouchon d'ambre
vissé sur le flacon était idéale. Alors, elle sentit l'envie d'aller au bout de ses turpitudes. Elle s'allongea un peu plus profond dans la baignoire, posa un pied sur chaque rebord, et
présenta l'objet entre ses fesses. Elle pensait qu'elle était folle, complètement folle. Jamais un objet de cette taille ne l'avait pénétrée. D'ailleurs, les fois où elle avait pratiqué
ce jeu se comptaient sur les doigts d'une main. Elle enduisit le bouchon de savon liquide, suffisamment pour que qu'il ne soit pas entièrement dissous dans l'eau du bain, et doucement
mais régulièrement elle exerça une pression sur le fond du flacon. Celui-ci, savonné, fit son chemin naturellement. Sarah retenait son souffle. La sensation était indescriptible. Avoir
attendu d'avoir soixante ans pour jouer à ces jeux !! Mieux vaut tard que jamais se dit elle. Son excitation était à son maximum. Le flacon introduit presque entièrement, le
doigt sur le clitoris que les sensations avaient fait sortir de son repaire, Sarah crut qu'elle allait perdre connaissance. Elle commença à retirer le flacon avec d'infinies
précautions. Puis elle recommença à s'occuper de son clito, elle finit par avoir l'orgasme qu'elle souhaitait, qui la fit crier, qui la fit jaillir, qui la laissa épuisée, à demi
consciente. Sarah sortit avec peine de sa baignoire, et alla s'allonger ruisselante sur son
lit. Elle ne se sentait pas bien, la tête lui tournait, et une douleur lancinante lui
rappelait ses débordements. Elle sombra dans un sommeil agité, ou un coma, on ne sait. Elle se réveilla quelques deux heures plus tard. Elle était plus lucide, mais la douleur était
toujours présente. Elle écrivit un mot pour s'excuser et remettre le rendez vous avec Carmela. Elle lui fit porter par le coursier de
l'hôtel. Le coursier s'exécuta, puis revint avec une
réponse : « Rien de grave j'espère, c'est sûrement le climat, les émotions, reposez
vous, je prendrai de vos nouvelles. Votre dévouée
Carmela. » Puis en post scriptum, « J'ai oublié de vous prévenir, prenez garde aux
boissons alcoolisées servies dans les hôtels, elles sont souvent coupées de rhum et mélangées d'épices très aphrodisiaques, et si l'on n'est pas habituée, cela peut rendre
malade. » Sarah resta pétrifiée. C'était donc cela, elle avait été droguée à son insu. Elle
appela le directeur de l'hôtel qui s'empressa, poli, voire obséquieux. « Que
m'avez-vous servi hier soir ? Je vous ai demandé du Champagne ! -C'est le Champagne
de Cilaos madame. Une production locale des plus appréciées. Si vous n'aimez pas, il faut préciser du Champagne français, mais je vous préviens, le prix est
exorbitant. -Du Champagne est forcément français. Et je me fiche du prix ! Si j'avais
voulu votre poison local, je vous l'aurais dit. » Sarah ne décolérait
pas. Etre droguée à son insu. C'est proprement criminel. Je change d'hôtel aujourd'hui même. Ce qu'elle
fit. Elle fit porter son bagage dans l'hôtel voisin. La suite était fraîche et
agréablement décorée. Le balcon plus vaste, la vue sur la mer tout aussi apaisante. Elle appela le Patron de l'hôtel et lui donna des instructions très sévères sur ce qu'elle voulait et
ne voulait pas. Elle retrouva pour l'occasion le ton de commandement qu'elle avait abandonné depuis quelques mois. « Je ne veux que du Champagne français, du vin Français, et de la nourriture saine. Est-ce que je me fais bien comprendre ? Je vous préviens : Si j'ai à me plaindre de votre service, je mets le feu à votre
établissement. -Oui Madame. Bien Madame. Comme il vous plaira
Madame. » Sarah se prépara, au cas où Carmela se manifesterait. Ce qui ne tarda pas.
Quelques instants plus tard, elle se fit annoncer. Le réceptionniste vint en personne demander si Madame Marchale pouvait être
reçue. « Je l'attendais, accompagnez là
jusqu'ici. » Sarah ouvrit la porte avant que Carmela eût frappé. Elle se tenait sur le seuil,
plus belle que jamais, et son parfum poivré emplit la pièce dans un souffle violent. Elle était vêtue d'un costume d'homme, adapté bien sûr à sa morphologie, sur une chemise à jabot
ouverte très basse entre les seins. Et comme il n'y avait que très peu de place entre les seins, autant dire qu'elle avait mis ses seins en vitrine de façon somptueuse. Devant
l'air surpris de Sarah elle précisa : « C'est une de
mes créations, un costume inspiré de ceux que porte Missy, la Comtesse de Morny, le décolleté et les seins en plus. Ça vous
plait ? -Enormément, je ne sais pas si j'oserais, mais c'est une idée
extraordinaire. -Vous oserez, l'effet est immédiat chez les gens en quête d'aventure, homme ou
femme. -Mais je vais faire tâche à vos
côtés ! -Tâche non, vous êtres trop « chic », Mais j'ai une griffe à défendre.
Et je suis très exhibitionniste. Le principal étant que je vous plaise. -Vous me plaisez
Carmela, ma douce amie, je languissais de vous revoir. Je ne sais pas si je saurai à l'avenir me passer de votre présence. D'ailleurs, vous semblez très sûre de votre pouvoir de
séduction. -Vous me faites bien de l'honneur Sarah, sachez que tout ceci est réciproque, et
je n'ai vraiment plus envie de vous quitter. Si vous êtes remise de votre indisposition, je vous invite dans le restaurant le plus chic de
l'île. - Etes-vous sûre que nous ne serons pas
empoisonnées ? -Certaine, mais je comprends que ma mise en garde est arrivée trop
tard. -Oui, c'était le
Champagne. -Je connais, mais l'effet est passager, vous n'en souffrirez
plus. -Dieu merci, mais il n'y avait pas que le
Champagne. -Grands Dieux, et quoi
d'autre ? -Vous Carmela, j'ai rêvé de vous toute la
nuit. -J'espère que ce fut un rêve
agréable. -Ne me faites pas rougir de honte, mais dans mon rêve, nous avons fait des choses
totalement inavouables. » Carmela éclata de rire. « Mais ça c'était prévu, je vous avais dit que je veillerai sur vos rêves. Vous savez, je dois vous l'avouer, je suis une « Loa » et comme telle, un
peu sorcière. J'ai de grands pouvoirs ! -Arrêtez, je vais
finir par vous croire. Et c'est quoi une Loa ? -Une prêtresse
Vaudou, mais rassurez vous, ce sont des coutumes absolument sans danger. D'ailleurs si cela vous agrée, je vous invite Samedi à la prochaine cérémonie. Ensuite, je vous expliquerai ce
que vous voulez savoir sur le Vaudou. Je suis sûre que vous serez très intéressée. -Si vous le
dites..... Ils acceptent les étrangers ? -Seulement s'ils
sont invités et accompagnés. -Mais avant, il nous faudra nous rendre au port pour consulter les départs
possibles pour Marseille. -Oui, je le sais bien, mais je suis malade à la pensée que vous puissiez me
quitter. -J'espère que vous n'userez pas de vos pouvoirs magiques pour m'en
empêcher. -Rassurez vous Sarah, le Vaudou respecte les êtres humains, et fut apporté dans
l'île par les esclaves qui rêvaient de liberté. L'idée de liberté est la base même du vaudou. Vous n'avez rien à craindre. -Vous me rassurez. Si l'on crée d'aussi jolies choses dans vos ateliers, me ferez-vous le plaisir de les
visiter ? -Ce sera une grande joie. Nos ateliers sont généralement fermés à toute visite, à
cause de nos créations ininterrompues. -J'essaierai de ne
pas espionner, Promis juré. » Sarah rassembla ses affaires, son sac, et partit avec Carmela pour une
destination inconnue. En bas de l'hôtel un superbe attelage attendait. Celui-ci les déposa
devant la porte d'une « auberge » Elles furent invitées à entrer par le groom, et elles pénétrèrent dans une grande pièce éclairée par des lustres de bougies. La
décoration semblait luxueuse, et les clients en habit étaient nombreux. Les femmes, toutes de couleur ou presque, semblaient d'une élégance toute parisienne, bien que très
colorée. Leur entrée fit forte impression. Sarah suivi Carmela qui semblait connaître les
lieux. Carmela avançait entre les tables d'une démarche balancée, la tête haute, le
sourire éclatant, et bien des couples se levèrent et la saluèrent au passage. Sarah eut l'impression que la Reine d'Angleterre n'aurait pas fait plus
d'effet. « Quand elles furent assises, Sarah fit la remarque : Vous connaissez
tous ces gens ? -La plupart me connaissent très bien. J'ai une entreprise importante, et ceci
explique cela. -Ils vont me prendre pour votre dernière
conquête ! -Sûrement, mais puisque c'est la
vérité.... » Sarah sourit de toutes ses dents. Elle prit la main de Carmela, la porta à ses
lèvres, et dans un murmure : -Je suis heureuse de
l'apprendre. » Carmela laissa sa main contre la joue de
Sarah : « Maintenant, si quelqu'un doutait encore, c'est fini. Tout le monde est
renseigné. -Cela vous gêne ? -Pas du tout. On ne m'a jamais vue ici avec un homme, et pour cause, et les couples de femmes sont nombreux. -Peut être allons nous déclencher quelque crise de jalousie ? -Cela ne risque pas
d'arriver. Les femmes ici ne sont pas jalouses. Nous vivons dans une communauté où les mœurs sont libres, tant que les gens savent se tenir. Et deux femmes qui se murmurent
des mots d'amour n'ont rien de provoquant. -Charmant
pays.... -Oui, et je saurai vous le prouver. Encore quelques heures et vous serez une
Créole accomplie. » Le maître d'hôtel vint prendre la
commande. « Pour commencer, servez nous un Punch
Créole. Ensuite nous aimerions un « Cari de Langoustes » accompagné d'un
Rougail de légumes. Comme dessert, nous prendront des ananas flambés au
cognac. Cela vous conviendra t il
Sarah ? -Mon dieu ! Oui, surtout que je ne sais pas de quoi il
s'agit ! -Ne vous en faites pas Sarah, vous allez vous
régaler. - Je ne m'en fais que pour mon tour de
taille ! - Et comme
boisson ? - Champagne.
De France évidemment, -Evidemment madame. Je vous félicite de votre choix, et vous souhaite bon appétit. »
|
Derniers Commentaires